La nouvelle série de Brian Vaughan jette un pont entre les générations. Si les héroïnes de cette aventure sont des gamines d'une douzaine d'années, gros maximum, le public visé est lui plus âgé, et d'autant concerné qu'il a bien connu l'époque mise en scène dans Paper Girls, à savoir les années 80. Des posters (Depeche Mode, l'affiche du mythique concert 101) aux déguisements (Freddy Krueger) en passants par les références culturelles (Reagan, la catastrophe de Challenger) tout est fait pour souligner le moment où le récit se déroule. Outre d'avoir le même âge, ces quatre "copines" ont un boulot typiquement américain en commun, elles distribuent les quotidiens du matin, directement sur le pas de porte des abonnés de leur petite ville de province. La presse digitale n'était pas encore passée par là. Seulement voilà, le premier novembre 1988, peu après Halloween, tout change brusquement, sans qu'il soit possible de comprendre de suite comment, et pourquoi. Car Vaughan choisit d'instaurer un tempo assez lent, et tisse son histoire comme s'il s'agissait d'un long film de deux heures, où la patience est une vertu qui permet de mieux apprécier les étapes de la narration. Ainsi le premier épisode est avant tout centré sur la présentation des quatre héroïnes, et des difficultés qu'elles rencontrent chaque jour dans l'exercice de leur tâche. Des filles qui se substituent aux fameux "paper boys" cela veut dire aussi prendre des risques et se heurter aux petits crétins du coin. Erin, MacKenzie, Tiffany et KJ vont aller de rencontres déroutantes et surprises angoissantes, et se retrouver plongées dans un monde familier et pourtant radicalement différent, au point d'envisager dans un premier temps une invasion extra terrestre.
Paper Girls peut aussi être simplement lu comme le récit emblématique de quatre filles qui traversent une période charnière (et si délicate) de leur croissance, l'adolescence, et doivent composer avec le désir impérieux d'indépendance mitigé par le lot habituel de responsabilités, devant lesquelles il est si tentant de fuir. Devenir un adulte, c'est aussi parier sur l'incertitude du lendemain, accepter de ne pas savoir ce qui nous attend à la prochaine étape, ce qui est exactement le cas dans cette série, où les coups de théâtre se succèdent, avec un conflit générationnel qui semble venu du futur, des sortes de dinosaures volants qui menacent depuis le ciel, et des appareils complexes permettant de se déplacer dans le temps. Sans oublier des références continues à la technologie de notre époque, et la célèbre marque à la pomme, qui fait même tiquer ceux qui comme moi sont des Apple-sceptiques, à jamais non convertis. Vaughan alterne avec intelligence les scènes d'action, et celles où priment les dialogues, pour crédibiliser les réactions et les sentiments des quatre héroïnes. En même temps il nous perd totalement et nous offre de multiples pistes, sans jamais dévoiler où il veut en venir, étoffant les interrogations et les révélations partielles, si bien qu'on ferme ce premier volume (avec un énième twist qui promet un changement de décor) sans rien savoir de ce qui nous attend dans le prochain. Le plaisir de retrouver Cliff Chiang (récemment vu sur Wonder Woman) est évident. Son trait expressif et concis fonctionne à merveille, d'autant plus que le travail de Matt Wilson sur la couleur est remarquable, magnifie les planches, et contribue au climat vintage qui suinte de Paper Girls, comme d'un bon vieux clip sur Mtv, à la fin des années 80. Du réalisme le plus prosaïque au fantastique le plus délirant (Vaughan est toujours aussi bon pour empiler les concepts à vous donner le mal de crâne), voilà donc qu'arrive chez Urban un titre qui a obtenu de prestigieuses récompenses aux States (meilleure nouvelle série aux dernier Eisner Awards, meilleur dessinateur pour Chiang) et mérite à coup sur d'être découvert, d'autant plus que le premier tome est à dix euros. Attention cependant, ces cinq premiers épisodes sont bien loin de montrer toutes leurs cartes, et la suite sera indispensable pour la compréhension des enjeux réels.
A lire aussi : Brian K.Vaughan, l'entretien
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Paper Girls peut aussi être simplement lu comme le récit emblématique de quatre filles qui traversent une période charnière (et si délicate) de leur croissance, l'adolescence, et doivent composer avec le désir impérieux d'indépendance mitigé par le lot habituel de responsabilités, devant lesquelles il est si tentant de fuir. Devenir un adulte, c'est aussi parier sur l'incertitude du lendemain, accepter de ne pas savoir ce qui nous attend à la prochaine étape, ce qui est exactement le cas dans cette série, où les coups de théâtre se succèdent, avec un conflit générationnel qui semble venu du futur, des sortes de dinosaures volants qui menacent depuis le ciel, et des appareils complexes permettant de se déplacer dans le temps. Sans oublier des références continues à la technologie de notre époque, et la célèbre marque à la pomme, qui fait même tiquer ceux qui comme moi sont des Apple-sceptiques, à jamais non convertis. Vaughan alterne avec intelligence les scènes d'action, et celles où priment les dialogues, pour crédibiliser les réactions et les sentiments des quatre héroïnes. En même temps il nous perd totalement et nous offre de multiples pistes, sans jamais dévoiler où il veut en venir, étoffant les interrogations et les révélations partielles, si bien qu'on ferme ce premier volume (avec un énième twist qui promet un changement de décor) sans rien savoir de ce qui nous attend dans le prochain. Le plaisir de retrouver Cliff Chiang (récemment vu sur Wonder Woman) est évident. Son trait expressif et concis fonctionne à merveille, d'autant plus que le travail de Matt Wilson sur la couleur est remarquable, magnifie les planches, et contribue au climat vintage qui suinte de Paper Girls, comme d'un bon vieux clip sur Mtv, à la fin des années 80. Du réalisme le plus prosaïque au fantastique le plus délirant (Vaughan est toujours aussi bon pour empiler les concepts à vous donner le mal de crâne), voilà donc qu'arrive chez Urban un titre qui a obtenu de prestigieuses récompenses aux States (meilleure nouvelle série aux dernier Eisner Awards, meilleur dessinateur pour Chiang) et mérite à coup sur d'être découvert, d'autant plus que le premier tome est à dix euros. Attention cependant, ces cinq premiers épisodes sont bien loin de montrer toutes leurs cartes, et la suite sera indispensable pour la compréhension des enjeux réels.
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