Lire pour rester en vie
Les passeurs de livres de Daraya de Delphine MinouiC’est lors d’un passage dans l’émission La Grande Librairie que j’ai découvert ce roman et que je l’ai d’office inscrit sur ma liste !
L’histoire :
Dans Les passeurs de livres de Daraya nous plongeons dans l’enfer de la guerre civile en Syrie. C’est dans la ville de Daraya que la résistance s’organise avec pour bulle d’air, une bibliothèque souterraine, lieu d’espoir, de discussion, d’ouverture vers le futur.
De 2012 à 2016, la banlieue rebelle de Daraya a subi un siège implacable imposé par Damas. Quatre années de descente aux enfers, rythmées par les bombardements au baril d’explosifs, les attaques au gaz chimique, la soumission par la faim. Face à la violence du régime de Bachar al-Assad, une quarantaine de jeunes révolutionnaires syriens a fait le pari insolite d’exhumer des milliers d’ouvrages ensevelis sous les ruines pour les rassembler dans une bibliothèque clandestine, calfeutrée dans un sous-sol de la ville.
Leur résistance par les livres est une allégorie : celle du refus absolu de toute forme de domination politique ou religieuse. Elle incarne cette troisième voix, entre Damas et Daech, née des manifestations pacifiques du début du soulèvement anti-Assad de 2011, que la guerre menace aujourd’hui d’étouffer. Ce récit, fruit d’une correspondance menée par Skype entre une journaliste française et ces activistes insoumis, est un hymne à la liberté individuelle, à la tolérance et au pouvoir de la littérature.
Editeur : Editions Julliard / 252 pages | Sortie : 16/08/2018
Delphine Minoui :
Delphine Minoui est grande reporter au Figaro, spécialiste du Moyen-Orient. Prix Albert Londres 2006 pour ses reportages en Iran et en Irak, elle sillonne le monde arabo-musulman depuis 20 ans. Après Téhéran, Beyrouth et Le Caire, elle vit aujourd’hui à Istanbul, où elle continue à suivre de près l’actualité syrienne. Elle est également l’auteur des Pintades à Téhéran (Jacob-Duvernet), de Moi, Nojoud, dix ans, divorcée (Michel Lafon), de Tripoliwood (Grasset) et de Je vous écris de Téhéran (Seuil).
Sources : Editions le Seuil
Mon avis :
Que d’émotions en lisant Les passeurs de livres de Daraya. Je suis passé par l’espoir, l’horreur, la résiliation et puis de nouveau la lumière. Le récit est d’autant plus fort qu’il est authentique. Partie d’une photo vue sur les réseaux sociaux, la quête menée par Delphine Minoui va la conduire sur les traces de cette bibliothèque secrète au coeur de Daraya. De recherches méticuleuses, en passant par des relations, elle finit par entrer en contact avec ces « bibliothécaires de la liberté ». Au fil de la lecture j’ai découvert les différentes étapes du conflit qui frappe ce pays depuis 2011. Les espoirs nés autour d’une possible liberté de penser différemment, les premières manifestations pacifiques, les premiers tirs, les premiers morts, les premiers cris de colère. Une montée en puissance dans la destruction d’un idéal égalitaire.
Face à cette crise où se mêlent pouvoirs politiques et pouvoirs religieux, des jeunes hommes de Daraya, bravent les tirs pour récupérer ici et là des livres. Des ouvrages de tous genres ; historiques, politiques, philosophiques.. Des livres interdits apparaissent ainsi dans leurs besaces et viennent garnir les rayons d’une bibliothèque souterraine. Un lieu à l’abri des fameux tonneaux d’explosifs, pourvoyeurs de mort. Un lieu devenu un refuge où chacun peut venir apprendre, voir même enseigner à ceux qui voit chaque jour un voile noir se refermer sur eux. Un refuge contre l’horreur et l’agonie progressive d’une ville et de ses habitants.
Le livre ne domine pas. Il donne. Il ne castre pas. Il épanouit.
Imaginez un jeune homme devenu combattant pour défendre les siens et qui, sur la ligne de front, lit des ouvrages philosophiques. Imaginez des hommes, des femmes et des enfants risquer la mort pour venir partager des mots et des auteurs alors que la faim les tenaille.
Dans Les passeurs de livres de Daraya Delphine Minoui vit par procuration l’angoisse des jours. Chaque absence de connexions suscite les pires craintes, elle découvre derrière un écran les mauvaises nouvelles. Elle apprend avec leurs mots, les déceptions face à la déficience des Nations Unies.
Les jours de désespoirs, je regarde vers l’avenir lâche-t-il avec fougue.
Ce roman est un projecteur braqué sur le courage, la persévérance et la passion de personnes pour qui la lecture est devenu le moyen de rester humain face à un massacre programmé.
Cette lecture est un témoignage dur qui met en avant le fait que les mots et les pensées ne peuvent pas être neutralisés. Que la lecture est un moyen d’évasion, d’espoir et nul ne devrait en être privé.
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