Léonor de Récondo – Le grand feu ***

Par Laure F. @LFolavril

Grasset – septembre 2023 – 234 pages

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« Elle se demande si Venise est une ville d’eau parce que justement tout s’y enflamme. »

Ilaria naît un matin de mai 1699 à Venise. Elle grandit à La Pietà, une institution qui recueille habituellement leus enfants abandonnées et les éduque à la musique ; ses parents, marchands d’étoffes, l’y ont fait rentrer pour qu’elle échappe à la menace de la peste et qu’elle apprenne la musique – qu’elle donne chair à la musique.

À six ans, Ilaria rêve d’être une mouette pour survoler Venise et ses canaux, découvrir la ville dont elle n’aperçoit pas grand-chose depuis sa chambre ; à La Pietà, elle rencontre Antonio Vivaldi et apprend à jouer du violon. Elle se lie d’amitié avec Prudenza, qui vient d’un autre monde social qu’elle… Prudenza qui prend des cours de chants auprès de la fougueuse Maria à la voix d’or, que ses parents paient une fortune. « Ce sentiment si fiévreux de bonheur », Ilaria va le ressentir à treize ans, lorsqu’elle est autorisée à jouer au palais Leoni, chez Prudenza.

L’écriture de Léonor de Récondo, soyeuse et sensitive, se déroule et Venise se déploie sous nos yeux, sa lagune et ses couleurs changeantes, son grand Canal et ses palais, ses ruelles qui résonnent de la rumeur de la mer. Et Ilaria, sa candeur et sa jeunesse, son destin tragique.

Le grand feu, c’est celui de la musique, de la liberté qui étreint le corps, c’est celui aussi, du désir. « Que me restera-t-il si cette vibration profonde disparaît de mes jours? Si cette existence tangible de mon corps s’éclipse? Comment saurai-je, le matin avant d’aller à la messe, que je suis en vie? » Le grand feu, c’est celui de l’amour qui consume.

Je me suis laissée saisir par la beauté de l’écriture de Léonor de Récondo et j’ai littéralement englouti ce roman, jusqu’aux derniers mots, incandescants.