Dans son second roman, Le choix du roi, Laurence Lieutaud aborde la question de l’enfant roi et de ses conséquences sur la vie en société. Un thème fort mais pas aussi fouillé que je l’aurais espéré…
La vie de famille de Karine et de Fabien ressemble à celle de beaucoup d’autres à un détail près. Maxime, leur aîné, s’apprête à entrer à Polytechnique. Ne fait pas l’X qui veut ! Avoir un enfant aussi brillant est un privilège dont se gargarisent volontiers père et mère. C’est aussi un magnifique arbre qui cache la forêt de soucis engendrés par Lisa, la cadette aux prises avec une adolescence difficile. Qu’importe, il suffit de regarder dans la bonne direction pour occulter les problèmes. Maxime va bientôt faire sa rentrée et il n’y a que ça qui compte.
Ca compte même plus que cette pauvre fille qui marchait au bord de la route, dans le noir. Quelle idée de venir percuter de plein fouet l’avenir d’un si brillant élément ! Cette fille est morte, c’est un accident, c’est la vie, il faut passer à autre chose, on ne peut plus rien y faire de toute façon. Il n’y pas de quoi en faire tout un fromage après tout. Ca n’était qu’une jeune fille classique, rien à voir avec sa seigneurie. On ne peut pas demander à un futur polytechnicien de gâcher sa vie pour une bêtise de jeunesse, tout de même !
Quand Maxime avoue à sa mère la “grosse bêtise” qu’il a commise, il lui fait jurer en même temps de garder le silence. Karine accepte trop vite sans se rendre compte qu’en faisant cela elle décharge son fils de sa responsabilité tout en devenant complice de son crime. Une double peine pour cette mère. A partir de cet aveu, c’est elle qui enchaîne les nuits blanches, maigrit à vue d’oeil, perd le goût de la vie. Maxime, lui, continue le cours de la sienne comme si rien ne s’était passé. C’était un accident, il faut passer à autre chose…
“Pour la première fois je ne vais pas faire ce que j’ai toujours fait, servir, coûte que coûte, les intérêts du petit roi.”
Dans un jeu de vases communicants, l’autrice nous dépeint la descente aux enfers d’une mère face à la froideur de son fils. Karine a conscience de sa chance : elle a encore son fils quand une autre mère pleure sa fille. Mais quel fils lui reste-t-il ?
Laurence Lieutaud aborde à travers son roman un thème passionnant qui tient à la manière dont on éduque nos enfants aujourd’hui. Pour autant, ce roman a été plutôt une déception pour moi dans la mesure où j’ai eu le sentiment qu’il ne faisait que survoler une question cruciale : quelle société sommes-nous en train de préparer en élevant une génération de petits rois dans l’idée que leurs désirs et intérêts personnels prévalent sur tout le reste ? J’aurais aimé un roman d’envergure, qui marque les esprits comme celui de Lionel Shriver sur l’amour maternel, or c’est tout le contraire. Le choix du roi est – selon moi toujours – un roman qui baigne dans la facilité. Prévisible de la première à la dernière ligne, il se lit vite, s’apprécie sur le moment, mais ne remue rien, ne bouscule pas, ne crée aucun malaise. Je suis navrée de le dire mais j’ai l’impression que l’autrice est passée à côté d’un très beau sujet. Dommage.
L’ESSENTIEL
Le choix du roi
Laurence LIEUTAUD
Edité chez Grasset en GF
Publié le 10/05/2023 en GF
240 pages
Genre : contemporain
Personnages : Karine et Fabien les parents, Maxime et Lisa les enfants
Plaisir de lecture :
Recommandation : mouais
Lectures complémentaires : Il faut qu’on parle de Kevin de Lionel Shriver, Un fils parfait de Mathieu Menegaud, Rosa Dolorosa de Caroline Dorka-Fenech, Jake de Bryan Reardon
RESUME DE L’EDITEUR
Jusqu’ici Maxime était le fils parfait. Aîné brillant, garçon sportif, à 20 ans il s’apprête quitter le foyer toulonnais pour intégrer Polytechnique quand sa cadette, Lisa, enchaîne les colorations capillaires, les piercings et les affronts, au point de décourager sa mère. « Le choix du roi » se vantait jusqu’ici Fabien, leur père. « Un fils en or » clamait Karine. Jusqu’à cette nuit de juillet.
Le 8 au petit matin, Maxime réveille sa mère. Il sent l’alcool, sa chemise est pleine de sang. Il vient de renverser une fille en rentrant d’une soirée. Il l’a laissée sur le chemin où le choc l’a tuée. Avant que le jour vienne, Maxime demande à Karine de se débarrasser de la chemise et de garder entre eux leur macabre secret.
Avant, pendant, après, Laurence Lieutaud rembobine puis accélère le temps en nous faisant vivre les jours qui ont précédé et qui suivent l’accident, du point de vue de différents personnages : la mère de Maxime, la soeur de Maxime, la mère de la victime. A mesure que les policiers mènent l’enquête, Karine découvre son fils sous les traits d’un monstre froid plus occupé à jouer et tuer des soldats sur son ordinateur qu’à penser aux familles qu’il a brisées.
De la première ligne à la dernière, Laurence Lieutaud nous fait traverser les enfers de ses personnages. Certains se débattent dans les filets de la culpabilité et de la peine, d’autres essaient de percer la vérité. Un tel secret peut-il être ainsi enfoui ?
TOUJOURS PAS CONVAINCU ?
3 raisons de lire Le choix du roi
- ça se lit très vite et très facilement
- il est facile de se mettre à la place de cette mère et d’imaginer ce que l’on aurait fait en pareille situation
- ce roman de littérature blanche peut aussi convenir aux amateurs de noir
3 raisons de ne pas lire Le choix du roi
- ça manque d’envergure
- l’histoire est assez prévisible
- ce roman ne nourrit pas la réflexion autant qu’il aurait pu le faire
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