J'avais déjà lu et apprécié Le village perdu de la même autrice, je retrouve ici son imagination tortueuse et sa capacité à élaborer des scénarios vengeresques machiavéliques. Camilla Sten démonte les préjugés que l'on pourrait avoir à son égard: tout d'abord on pourrait tiquer sur la célèbrité toute faite que son nom de famille lui confère dans le monde du thriller suédois puisque Camilla est la fille de Viveca, créatrice des célèbres Meurtres à Sandhamm. Et puis, pour ma part, j'ai tendance désormais à me méfier des romans étrangers traduits pour des maisons d'éditions françaises. La logique voudrait qu'un roman étranger soit traduit en France car il est très bon, mais intérêt commercial oblige, ce n'est pas toujours le cas. Et bien, si Le Manoir des glaces reste un roman de divertissement, il n'en est pas moins bien ficelé et efficace.
La grand-mère d'Eleanor décède dans de brutales circonstances : une personne vêtue de noir tel un cambrioleur l'a poignardée à de multiples reprises avant de s'enfuir sans rien emporter, sous les yeux d'Eleanor qui arrivait au même moment. Atteinte de prosopagnosie (impossibilité à reconnaître les visages), Eleanor ne reconnaît ses proches que par leurs caractéristiques physiques. Difficile dans ce cas de reconnaître l'agresseur de sa grand-mère qui pourrait également sans prendre à elle. Eleanore s'aperçoit que sa grand-mère s'apprêtait à lui délivrer une vérité importante mais elle n'en a pas eu le temps. La jeune femme est sur le point d'hériter de son aïeule d'une vieille demeure perdue au milieu des forêts dans la campagne suèdoise, mais doit avant tout en faire l'inventaire avec sa tante Véronika et un avocat mandaté par Viviane. Sur place, le gestionnaire censé s'occuper de la propriété depuis quarante ans demeure introuvable, une tempête de neige se déchaîne et les hotes se retrouvent bloqués à l'intérieur du manoir, à la merci d'un mystérieux visiteur... Car Eleanore le sent, ils ne sont pas seuls au domaine de Haut-Soleil.
Une vieille demeure pleine de mystère entourée de forêts dont personne ne connaissait l'existence, une tempête de neige, un huis-clos tendu et par dessus tout des bruits étranges, des endroits secrets, un vieux journal intime ayant appartenu à Anushka, une cousine que Viviane maltraitait dans les années soixante... Et surtout une histoire complexe qui mêle passé et présent, dans laquelle se croisent des personnages plus ou moins sympathiques. Une intrigue astucieuse dans laquelle j'ai bien vu venir certains évènements mais je ne m'imaginais pas ce dénouement bluffant. Même si certains arrangements sont faciles, et que quelques clichés alourdissent l'ensemble, j'ai trouvé ce récit addictif et plaisant. Mon seul regret est que l'autrice ne se soit pas plus que cela servi de la prosopagnosie dans son intrigue. Sous réverve d'une bonne concentration pour ne pas s'emmêler dans ce récit complexe, Le manoir des glaces est une lecture très divertissante.
Je remercie Babélio et les Editions du Seuil pour l'envoi de ce roman dans le cadre d'une Masse Critique Privilégiée.