La Promesse, roman de 1958, vient d’être réédité dans une nouvelle traduction. Le roman s'inspire du scénario du film Ça s'est passé en plein jour dont Dürrenmatt est le principal coauteur et comporte le sous-titre : « Requiem pour le roman policier ». Il existe une autre adaptation cinématographique datée de 2001, The Pledge, film américain réalisé par Sean Penn, avec Jack Nicholson.
Pour une large part il s’agit d’un polar, mais qui va s’avérer beaucoup plus profond et original que ce à quoi nous sommes habitués avec ce genre littéraire, bref, un très bon roman.
Matthias, excellent commissaire, « un solitaire, toujours bien mis, impersonnel, protocolaire, sans relations connues, il ne fumait pas, ne buvait pas, mais possédait son métier comme personne et l’exerçait durement, impitoyablement, suscitant autant de haine que d’admiration » est à quelques jours à peine de sa mutation/promotion en Jordanie quand on lui signale l’assassinat d’une gamine, Gretl, dont le corps a été retrouvé dans une forêt. C’est un colporteur qui a trouvé le corps et prévenu la police mais de nombreux indices le désignent comme le véritable coupable et comme il se pend dans sa cellule, ça arrange bien la hiérarchie policière. Matthias, lui, n’est pas convaincu et il fait la promesse à la mère éplorée de retrouver l’assassin. Il annule son départ pour la Jordanie et à titre privé poursuit l’enquête…
Résumé classique me direz-vous à juste titre, mais court résumé uniquement vous rétorquerais-je. En fait, le roman débute par la rencontre fortuite entre un écrivain (l’auteur ?) et un certain H., commandant de la police de Zürich, ancien supérieur de Matthias, qui va lui raconter toute l’affaire et dont nous savons dès ce début ce que Matthias est devenu.
Nous avons donc une intrigue policière, peut-être pas toujours bien ajustée, mais surtout et c’est ce qui fait l’intérêt de ce livre, une analyse du roman policier en tant que genre littéraire, H. donne les éléments factuels de l’enquête à l’écrivain tout en sachant et lui faisant remarquer que celui-ci en fera une autre histoire, très proche de la réalité certainement mais plus adaptée au concept de roman. Il en veut pour preuve que dans les polars, l’épilogue doit respecter des codes ou des règles, or dans l’affaire qui nous intéresse ici, la solution de l’énigme sort de ce cadre, puisqu’elle réside entièrement dans le hasard ! Hasard absolu qui donnera raison in fine à Matthias mais qui le condamnera à la déchéance et à la folie.
Très bien.