Le roman se présente comme la biographie d’un certain Orlando, un jeune noble anglais du XVIème siècle mais va courir jusqu’en 1928 date de parution du roman, grâce à la magie de l’invention narrative de l’écrivaine. Résumer une intrigue s’étirant sur quatre siècles serait fastidieux, je n’en donnerais que quelques détails.
Jeune homme, Orlando tombe amoureux de la fille de l'ambassadeur de Russie, qui l'abandonnera. Une déception qui le décide à partir comme ambassadeur à Constantinople. Une révolution s’y produit et après une longue période de sommeil d’une semaine, il se réveille devenu femme ! Il fuit les troubles dans la ville en compagnie de gitans, dont il apprécie la compagnie, mais retourne à Londres. Il se consacre à la passion intense qui animera toute sa vie, l’écriture et la poésie, ce qui lui permet de rencontrer des célébrités des lettres et de la bonne société, tout en ne dédaignant pas fréquenter le petit peuple et ses prostituées. J’abrège honteusement, Orlando finit par trouver l’amour, ou ce qui lui ressemble un peu avec un Lord, aventurier des mers, toujours absent et embarqué pour le Cap Horn. Le roman s’achève quand Orlando est devenue une célèbre écrivaine avec un poème qu’elle a mis toute sa vie à écrire.
Je ne vais pas vous mentir, ce n’est pas le roman de Virginia Woolf que je préfère. Ca m’a semblé souvent bien long par des détails ne faisant pas avancer réellement le propos et parfois difficile à suivre, ce d’autant plus que nous savons tous aujourd’hui que le thème du livre est l’androgynie, confirmé par cette étrange première phrase d’ouverture « Il – car il n’y avait aucun doute quant à son sexe », ce qu’on attend longtemps avant d’en voir le bout de la queue.
Néanmoins c’est un bon livre, où l’humour n’est pas absent, discret certes, limite parodique parfois, essentiellement parce qu’il aborde deux thèmes loin d’être frivoles : la littérature et bien sûr l’androgynie. La littérature, parce qu’Orlando travaille sans arrêt un poème qu’il/elle trimballera sans arrêt contre son sein et que parfois c’est Virginia Woolf qui s’exprime directement « la transaction entre un écrivain et l’esprit du temps est d’une délicatesse infinie, et c’est de la finesse d’un arrangement entre les deux que toute la fortune de ses œuvres dépend. »
Mais le sujet principal c’est l’androgynie. Ça débute par le changement de sexe de notre héros, ce qui va lui permettre de comparer les avantages et les inconvénients des deux états, « elle était homme ; elle était femme ; elle connaissait les secrets, partageait les faiblesses des uns et des autres. » Et à Woolf, de prolonger par l’évolution de la situation de la femme à travers plusieurs siècles. Si le roman est dédié à Vita Sackville-West, c’est qu’elle aurait inspiré l’écrivaine pour le rôle d’Orlando.