Je remercie les Editions de La Table Ronde collection Quai Voltaire
pour l'envoi de ce nouveau titre.
Traduit de l'anglais : Leïla Colombier
Elizabeth Jane Howard
Biographie de l'auteure :
Née en 1923, Elizabeth Jane Howard est l’auteur de quinze romans. Les Cazalet Chronicles – The Light Years, Marking Time, Confusion et Casting Off – sont devenus des classiques modernes au Royaume-Uni et ont été adaptés en série pour la BBC et pour BBC Radio 4. Elle a également écrit son autobiographie, Slipstream. Elle est morte en janvier 2014, après la parution du 5e volume des Cazalet Chronicles, All Change.
Présentation de l'éditeur
Londres, 1950. Antonia et Conrad Fleming donnent un dîner pour les fiançailles de leur fils Julian, chez eux, dans le quartier chic de Campden Hill Square. Derrière les apparences policées d’une soirée mondaine, Antonia mesure, à quarante-trois ans, l’échec de son propre mariage.
Londres, 1942. Mrs Fleming retrouve son époux pendant une permission.
Saint-Tropez, 1937. Écourtant ses vacances en famille, Conrad s’échappe pour retrouver sa maîtresse.
Paris, 1927. Antonia, dès sa lune de miel, commence à deviner l’emprise étouffante et sarcastique qu’exercera sur elle son mari.
Sussex, 1926. À dix-neuf ans, Antonia, pour échapper à la jalousie de sa mère et à la passivité de son père, n’a qu’une hâte : se marier…
La Longue-vue, si singulier par sa facture, possède le charme de ces œuvres où l’on voit une vie entière se déployer. On retrouve toute la virtuosité d’Elizabeth Jane Howard dans ce qui n’est que son deuxième roman, sur les illusions perdues d’une femme observant à la longue-vue sa vie écoulée.
Ce roman publié pour la première fois en 1956, explore la vie d'Antonia Fleming. Le récit débute en 1950 alors qu'Antonia est mariée à Conrad, un historien renommé. Leur fils Julian va se fiancer et un repas est prévu pour fêter cette occasion en présence de tout le gotha londonien. Antonia mesure alors la faillite de son propre mariage. Grâce à une construction atypique puisque l'histoire se déploie à rebours, nous voyons défiler différentes périodes de la vie d'Antonia. On remonte ainsi le temps et on découvre les joies et les difficultés de sa vie conjugale. C'est comme une réflexion toute en nuances sur les aléas du mariage dans une société masculine. On comprend un peu mieux les secrets et les regrets que peut avoir Antonia au fil des épisodes de sa vie. L'auteure examine également les thèmes de la maternité, de l'amour, de la trahison et du passage du temps.
On ne peut nier un savoir-faire dans l'exploration subtile des relations humaines, la profondeur psychologique est indéniable. Un roman introspectif qui nous apporte un éclairage fascinant sur la vie d'Antonia à travers plusieurs décennies, avec les changements inhérents au temps qui passe mais aussi à la perte des illusions. On pourrait penser à la crise de la quarantaine mais il y a plus que cela dans cet échec. J'ai toujours beaucoup de plaisir à lire Elizabeth Jane Howard, tout d’abord parce qu'elle me fait voyager dans le temps avec sa prose élégante et la société patriarcale qu'elle décrit mais aussi par sa capacité à capturer les sentiments humains. Une lecture enrichissante qui donne l'opportunité de comprendre que prendre du recul offre une perspective exceptionnelle sur le long terme de toute la dynamique qui se joue entre les personnages. Un roman qui a su me toucher. Un dernier mot pour saluer la sublime couverture. Bonne lecture.
Citations :Or elle ne pouvait pas se contenter de pleurer, de vitupérer, de condamner - comme le font si facilement les enfants ou les politiciens en difficulté ; elle n'avait aucune conviction toute faite et véhémente pour la soutenir ; pas de retraite intérieure où elle pût cesser d'être son propre juge, pas d'être divin débordant d'amour et de sagesse vers qui se tourner... Seulement le squelette des quelque vingt-cinq ans qu'elle avait devant elle, sur lequel greffer le tissu de sa vie.
Ce qu'elle avait accompli pendant tout ce temps était imperceptible : il n'y avait ni coup de projecteur ni rayon de soleil pour révéler ses capacités à s'occuper de leurs deux maisons, à élever leurs deux enfants, à s'apprêter et à apprêter le décor autour d'elle; la judicieuse remarque de Lewis Carroll sur la nécessité de courir autant qu'on le peut pour rester au même endroit s'appliquait aussi bien au mariage qu'au reste; mais, bien entendu, s'en tenir à ce principe ne vous menait nulle part; il n'y avait donc aucune raison d'espérer que le même homme passe un jour de plus en sa vieillissante et familière compagnie.