Dans la cité de Dvern, capitale du Domaine, règne l'effervescence : Jeophras Denio, lé génial et fantasque inventeur, aurait mis au point un merveilleux engin capable - en théorie - d'imiter le vol des oiseaux ! Mais Dvern est soudain en deuil : le prince Nerio de Lethys, cousin de la famille royale, a été assassiné. Et tout accuse Carline, la fille adoptive de Jeophras. Comment l'innocenter ? Dans cette ville perverse aux mille intrigues, où chacun dissimule de sombres secrets, s'improviser détective n'est pas une mince affaire. Une enquête en forme de labyrinthe s'engage, où Jeophras devra suivre les règles tortueuses d'un jeu de l'oie grandeur nature. Où il devra emprunter la difficile voie du cygne...
Pourquoi ce livre ? Honnêtement je n’avais jamais eu vent de ce titre avant de le recevoir dans la Kube. J’ai d’abord été mitigée, tenant en grande estime la qualité des couvertures. Puis je me suis souvenue que je voulais découvrir plus avant Laurent Kloetzer, découvert dans une anthologie puis par une novella. J’ai donc saisi l’occasion !
Et je ne le regrette pas du tout. Très vite, j'ai été embarquée dans cette intrigue mouvementée. On évolue dans un décor fantaisiste qui m’a fait à de nombreuses reprises pensé à l’Italie. Pourtant l'intrigue a la teneur d’un roman policier, avec ce corps mort et l'enquête pour remonter jusqu’au meurtrier. Les quelques premières pages nous plongent directement dans l'intrigue, pas le temps de niaiser. Ensuite, l’intrigue s'installe dans un rythme soutenu. L’auteur parvient à distiller ses indices au compte-goutte tout en nous contant une histoire de nobles dans toute leur cruelle splendeur.
C’est d'ailleurs ce que je retiendrai de ce texte. En dehors d’une intrigue mouvementée, l’auteur nous plonge dans cette histoire de princes avec une violence crue, dans une quintessence de la bestialité humaine.
Quel plaisir de constater que je me suis fourvoyée jusqu'au bout au sujet de cette enquête. Mes hypothèses ont énormément évolué au fil des indices et des révélations, pourtant aucune d’entre elles n'était la bonne. Je ne suis pas une lectrice de polar, peut-être que les connaisseurs n’y trouveront là rien d’original. Toutefois le mélange ici - le décor, la noirceur des personnages, cette enquête grandiloquente - offre une lecture fraîche et entraînante. Bon, petite mention pour le dernier chapitre. Autant j'ai aimé les déductions et révélations de Jeophras et de la comtesse Lara, autant leur échappée me laisse… dubitative.
Étant donné le caractère de chacun, ce fut difficile de s’attacher aux personnages, la plupart jouant le rôle du parfait antagoniste. Toutefois j'ai été fascinée par la personnalité de chacun, la palme allant à Jaran, mystérieux à souhait, ambigu, frivole, tout ce que j’aime dans un personnage. Chaque noble a son propre caractère, chacun est plus ou moins discret, chacun porte son poids de secrets et de surprises. Ce fut un véritable plaisir de découvrir le passé de chacun. A l’opposée, j’ai moins accroché au protagoniste Jeophras, trop naïf, trop érudit. Il se débat élégamment avec son enquête mais je trouve qu’ils raisonne trop bien pour quelqu’un dont ce n'est pas le métier - même s’il est considéré comme érudit. Le fait que le poids de l’affection pour Carline, la présumée coupable, ne le rend pas irrationnel m’a déplu également. Aucun coup de folie, juste du self control solide comme un roc. Quant à Carline elle-même, sa frivolité et ses caprices m’ont déplu mais ça se justifie par son jeune âge et ses multiples traumatismes.
Le style d'écriture se prête particulièrement bien au genre. Efficace, la plume ne se perd pas en fioritures, allant droit au but. Pas de doute, j’avais le sentiment d’avoir un page turner dans les mains.
Je partais défaitiste, ce fut au contraire une excellente lecture - et je suis navrée d'insister mais la couverture ne rend pas hommage à l’intrigue. C'est un monde de fantasy qui déguise le roman policier, qui donne corps à la folle brutalité des puissants. Je ressors ravie de cette lecture, dévorée en quelques heures.
16/20