Titre : La double vie de Dina Miller
Auteur : Zoe Brisby
Édition : Albin Michel
Genre : Contemporain historique
Pages : 272
Parution : 6 mars 2024
Qui pourrait croire en voyant cette jeune femme gracile qu’elle vient de tuer l’un des plus grands criminels ?
1961, en pleine guerre froide, Kennedy lance le programme Mercury, point de départ de la conquête spatiale. Huntsville, Alabama, bat au rythme de son Centre spatial et de la toute jeune NASA. Dans le quartier huppé de Rocket District, où vivent les scientifiques et leurs familles, Dina Miller s’installe avec une mission : faire justice. Si les jolies maisons aux façades colorées et au gazon immaculé sont parfaitement entretenues, elles cachent pourtant bien des secrets… Ces brillants chercheurs qui œuvrent au futur radieux de l’Amérique, citoyens exemplaires, époux et pères de famille respectables, sont-ils aussi irréprochables qu’ils le prétendent ?
J’avais rajouté Les mauvaises épouses dans ma pal à sa sortie, puis faute de temps, je ne l’ai toujours pas lu. Mais cette fois-ci, pas question d’attendre, cette couverture magnifique et ce résumé alléchant m’ont donné très envie de le lire. Mais je ne savais vraiment pas dans quoi je mettais les pieds en ouvrant ce livre…
Hannah, David, Esther, Ismaël, Saul…
Nous sommes plongés en 1961 à Rocket District à Huntsville en Alabama. Un quartier huppé très tranquille et pour cause, c’est le quartier dans lequel vivent les scientifiques qui travaillent pour la NASA sur la conquête spatiale. Un quartier parfait sous tout rapport, des maisons très bien entretenues, des femmes au foyer qui prennent soin de leurs maris, qui sont si importants pour l’Amérique. Elles se font d’ailleurs appeler les Bomb wives (en référence au bruit des décollages dans cette petite ville toute proche de la station nasale). Un quartier paisible qui va accueillir une nouvelle habitante, Dina Miller. Elle n’est pas une femme de scientifique, mais une agente du Mossad, elle traque les anciens nazis et il se trouve que dans cette rue bien tranquille, il y en a plusieurs. Les apparences sont parfois trompeuses, Dina est bien décidée à exfiltrer un ancien médecin nazi qui a commis des horreurs de guerre sur les Juifs dans les camps de concentration pour qu’il soit enfin jugé… Dina va devoir se faire une place dans ce quartier, se rapprocher des Bomb wives et plus précisément de Cherry la femme de sa cible.
Elle vit dans un monde de poupées, un monde préfabriqué où les femmes jouent le rôle qu’on leur a attribué. Être belle et se taire.
Je ne sais même pas par où commencer pour vous parler de cette incroyable histoire. Je l’ai déjà dit par ici, il me semble, mais j’aime beaucoup apprendre dans mes lectures. Et croyez-moi ici, j’en ai appris des choses, et pas des belles choses, des choses bien laides de l’histoire du monde et de la conquête spatiale. Quand j’ai lu la note de l’auteure à la fin de l’histoire, j’ai eu un moment d’absence, ces faits qu’elle mentionne dans son histoire sont bien réels, l’opération Paperclip a bel et bien existé… Je ne sais plus trop que penser, mais au moins maintenant, je sais…
J’ai adoré l’héroïne Dina, après avoir vécu un traumatisme pendant son enfance, pendant la Seconde Guerre mondiale et ses rafles abominables, Dina est devenue une agente du Mossad. Elle vit pour rendre la justice à tous ces Juifs déportés, malmenés, torturés et tués. Elle ne vit que pour ça, tel un robot sans émotions. Malgré tout, elle va s’attacher à Avery et Tyler avec qui elle travaille dans un dinner, mais surtout, elle va se lier d’amitié avec Cherry, la femme de sa cible. Malgré cette froideur que peut avoir Dina, c’est une héroïne très attachante, elle arrive encore à avoir de l’empathie, surtout pour Cherry. Elle est déterminée, fonceuse, très intelligente, j’ai adoré la suivre dans cette mission.
J’ai aussi beaucoup aimé Cherry, cette bomb wives qui n’est pas tout à fait intégré dans le fameux cercle des femmes de scientifiques. Elle est plus ronde que les autres, cible des railleries de la chef du troupeau Mandy. Cherry n’a pas confiance en elle, elle se contente d’être une femme modèle, d’entretenir sa maison et de tomber enceinte. Elle n’ose pas se démarquer des autres, elle ne veut pas se faire remarquer, souvent, elle n’ose pas donner son avis au risque d’attirer les foudres de Mandy et des autres. Son amitié avec Dina va la faire énormément évoluer, elle va s’affirmer, mettre ce qu’elle a envie de mettre, se soucier un peu plus d’elle. Elle est loin de se douter que son mari est un monstre, c’est une héroïne, douce, un brin naïve qui m’a énormément touchée.
Je ne vais pas trop en dire sur cette histoire, tant les révélations sont importantes, elles apportent beaucoup dans cette histoire. On ne s’ennuie pas une seule seconde, il y a toujours de la tension, de l’action, des rebondissements. J’ai dévoré cette histoire sans m’en rendre compte, tournant les pages à une vitesse folle.
Mais ce qui m’a marqué le plus dans cette histoire, ce sont les thèmes abordés, je n’étais pas du tout prête à ça, je ne m’attendais pas à être si bouleversée. Évidemment, dans ce livre, il est question de la Nasa et de la conquête spatiale. Mais l’auteure nous montre surtout ce qui se cache dans cette conquête, toute la laideur camouflée par les États-Unis. Je suis encore retourné de tout ce que j’ai appris au cours de cette lecture.
Dans cette histoire, l’auteure nous parle beaucoup des déportations, de ce qui se passait dans les camps, les horreurs que faisaient les nazis. À l’image de ce « médecin » qui réalisait des expériences à tout-va sur des hommes, des femmes et des enfants, des expériences inhumaines toutes plus atroces les unes que les autres. Mais surtout, elle nous montre que ces atrocités ont été passées sous silence pour permettre aux États-Unis d’être en tête sur la conquête spatiale. Effacé le passé de nazis des scientifiques qui travaille pour la Nasa, balayer les monstruosités qu’ils ont faites. Ils sont maintenant de bons citoyens Américains, avec une belle maison, une belle famille et tout le reste. Sachant que Zoe Brisby se base sur des faits réels, cette histoire m’a retournée, je suis encore marqué après avoir refermé ce livre.
L’auteure évoque également la différence entre les blancs et les noires et la ségrégation raciale qui régnait à l’époque. Heureusement, au cours de l’histoire, les choses évoluent positivement, on parle de Martin Luther King et de ses discours d’espoir.
Elle sait que la quête d’une race pure, une race blanche, détruit tout sur son passage. Une quête aussi vaine que stupide, mais qui a coûté et coûte encore des milliers de vies.
Pour un peu plus de légèreté, j’ai adoré ce voyage dans le temps, les 60’s en Amérique, une époque qui me fait rêver. Même si tout n’était pas parfait, j’aime beaucoup me plonger dans cette époque lors d’une lecture. Les dinners, les musiques, l’ambiance, les vêtements, la cigarette (qui était soi-disant bonne pour la santé) tout y était pour qu’on ait vraiment l’impression d’y être.
La double vie de Dina Miller est, pour moi, un énorme coup de cœur. Une plongée dans les années soixante Américaines. Une héroïne attachante, courageuse et déterminée à faire justice. Une histoire basée sur des faits réels qui vous provoqueront un maelström d’émotions, de la haine, de la colère, de l’empathie… Une histoire qui parle de l’opération Paperclip, d’anciens monstres nazis qui ont tranquillement rejoint les États-Unis pour travailler à la Nasa sur la conquête spatiale. Une histoire addictive, on ne s’ennuie pas une seule seconde, de la tension, de l’action, des rebondissements. Une histoire captivante à découvrir et à faire découvrir de toute urgence.