Léopold, libraire idéal. (c) Albin Michel Jeunesse.
En cette Journée mondiale du livre, quatre albums jeunesse à destination des enfants des classes maternelles
qui parlent de... livres et de leurs usages, qui en jouent et
plaident pour la lecture.
A quoi servent les livres? 😏
Les choses se compliquent lorsqu'un autre bouc passe le pas de la porte et demande "un bon livre". Léopold a à peine choisi un titre pour le visiteur que celui-ci en mange les pages. "Non, les livres ne sont pas faits pour être mangés!" Ah non? Voilà le libraire confronté à un fameux défi, répondre à la question de son nouveau client: "A quoi servent les livres si ce n'est pas à être mangés?" Pour lui, il explore tous ses rayonnages, croit faire les meilleurs choix. Raté, le bouc dévore tous les livres qui lui sont proposés. Sans même les payer.
La solution, touchante, viendra de la femme de Léopold. Elle l'invite à se souvenir du premier livre qu'il n'a pas mangé tellement il l'avait enthousiasmé. "Il [le livre] m'a fait réfléchir et grâce à lui, je me suis senti moins seul." Il retrouve le volume et le propose à son jeune client. Et cela marche. Le jeune bouc est pris par l'histoire, à tel point qu'il en réclame plein d'autres.
La révélation. (c) Albin Michel Jeunesse.
Bigre! L'annonce en titre fait frémir, "Le livre qui peut lire dans ton esprit". Qu'a donc concocté l'Italienne Marianna Coppo en convoquant une Madame Loyale répondant au nom de Lady Rabbit (traduit de l'italien par Christian Demilly, Grasset Jeunesse, 48 pages)? Car c'est bien sur une scène de théâtre joliment ornée et agrémentée de détails amusants que se déroule l'histoire. En deux tons doux, un vert plus appuyé que celui de Ladurée à Paris et un rose un peu passé, le spectacle interpelle directement l'enfant lecteur. Lui glisse qu'il sera question de magie, "Prestigieux lecteur"... Il le chambre avec quelques tours simples avant de passer à son véritable propos, lire dans l'esprit de celui ou celle qui lit! Une double page lui présente le public, soit trente-six spectateurs, tous différents. Il s'agit d'en choisir un en secret, de dire à quelle rangée il est assis, de se rendre à la page indiquée, de le repérer à nouveau après l'entracte, de répondre à la même question et de foncer en page finale. Il se trouve là où le livre l'a indiqué! C'est magique, réussi, addictif et terriblement amusant. Et chapeau à l'artiste pour la mise en scène théâtrale de son propos.
Lady Rabbit chauffe la salle, euh, les lecteurs. (c) Grasset
Jeunesse.
Bien sûr, le tour est connu depuis longtemps, depuis le XVe siècle, mais il est drôlement efficace et fonctionne parfaitement dans sa version livresque. Le graphisme très délicat de Marianna Coppo ajoute le plaisir de découvrir ces trente-six personnages plus charmants les uns que les autres, permettant de multiples lectures. Dont celle en flip-book qui fait danser une patate en coin de page, à l'endroit et à l'envers. L'album est encore accompagné d'un thaumatrope, ce jouet optique exploitant la persistance rétinienne.
Tous les spectateurs ont changé de place à l'entracte. (c) Grasset
Jeunesse.
A noter que "Le livre qui peut lire dans ton esprit" paraît également aux États-Unis chez Chronicle Books, en Allemagne chez Peter Hammer Verlag, en Espagne (espagnol et catalan) chez Andana editorial, en Italie chez Quintoquarto, en Roumanie chez Editura Frontiera, ainsi qu’en Chine (chinois traditionnel). Magique!
Et aussi
La meilleure histoire du soir... et au lit Louise Fitzgerald et Kate Hindley traduit de l'anglais par Mathilde Colo Little Urban, 32 pages Il faut bien un grand format presque carré pour accueillir les pitreries, développées sur doubles pages, de ces cinq enfants animaux au moment du coucher. Bain pris et dents brossées, ours, chien, chat, canard et écureuil attendent que leur soit racontée par un adulte la MEILLEURE histoire du soir. Une histoire qui tient en trois phrases seulement! Lesquelles? C'est bien la question car elle va être précédée de nombreux épisodes perturbateurs: promesses des enfants et des adultes, échauffement de la voix, étirements, gonflage des oreillers, ramassage des doudous, fanfare, verre d'eau, pipi... En dessins extrêmement riches et terriblement amusants, voilà tout le rituel du coucher revisité avec humour jusqu'à la fameuse meilleure histoire en trois phrases qui s'accompagne d'une autre, en trois phrases encore plus courtes. Un album de complicité entre parents et enfants.Qui a volé le sommeil? Anete Melece traduit du letton par Emmanuèle Sandron l'école des loisirs/Pastel, 40 pages
De super efficaces dessins aux feutres de couleurs vives, sans serti noir, conférant une belle énergie à cette histoire de sommeil disparu. Que se passe-t-il? Maman doit travailler dans son bureau. C'est donc Papa qui lit l'histoire du soir à Stella. Mais après neuf histoires dont les scénarios apparaissent en dessins, la petite fille ne dort toujours pas. Et pour cause, le sommeil commandé a bien été livré mais il a été volé. Par qui? Avec doudous et peluches, père et fille mènent l'enquête à travers toutes les pièces de l'habitation. Rien. Nulle part. Mais ils n'ont pas visité la dernière pièce... Un cluedo light réjouissant.
A noter le choix des neuf histoires, drôles comme la paire de bas dansant la samba ou la licorne prétentieuse, plus contemporaine quand il s'agit de philosopher avec les arbres ou de voir une Terre sous canicule.