Gazelle Punch. Nancy GUILBERT – 2023 (Dès 14 ans)

Gazelle Punch

Nancy GUILBERT

Editions Slalom, mars 2023
384 pages

Thèmes : Adolescence, violences, Solidarité

Violette, pimpante quinquagénaire, vit dans une petite maison cocooning en lisière de forêt en Ardèche.
Chaque mois d'août depuis dix ans, elle accueille pendant quinze jours un adolescent abîmé par la vie, par un contexte familial difficile, avec une estime de soi rabaissée, les émotions à fleur de peau et une colère constante envers tout et tous.

Elle a choisi de recevoir Dempsey, 15 ans.
Un ado qui vit seul avec sa mère et sa petite sœur Chéryl depuis que leur père les a abandonnés. Il a tellement de colère en lui qu'il ne s'exprime que par la violence, des mots rageux, des poings destructeurs, des actes de vandalisme. Et c'est à la suite d'un de plus, d'un de trop, qu'il a été envoyé en EPM (Etablissement Pénitentiaire pour Mineurs).

Leur rencontre est punchy, les mots fusent, mais leur fragile équilibre est menacé par une arrivée impromptue, urgente.
Livia, 15 ans aussi, subit des violences intrafamiliales, arrive chez Violette. Aussi secrète que son apparence est osée, elle s'exprime par le dessin, même si elle garde pour elle ses productions.

Est-ce qu'on peut changer sa vie, son destin, grâce à une seule personne ? Peut-on basculer vers l'ombre ou la lumière en une fraction de seconde ? Chacune de mes rencontres avec l'un de ces ados m'a toujours fait comprendre quelque chose de nouveau. M'a aidée à ouvrir les yeux sur la réalité.

Pour chaque jour, Violette a prévu une activité.
Souvent sportives, elles permettent d'extérioriser, de se confronter, de se surpasser, et d'être en contact avec d'autres gens, de sortir de sa bulle, tout en profitant de la beauté et des bienfaits de la Nature.
Randonnée, rafting, escalade, accrobranches, mais aussi équithérapie, poterie...

C'est ainsi qu'ils rencontrent Salomon, 16 ans.
Sa transplantation cardiaque il y a dix ans avant, a entrainé une surprotection maternelle, qui l'étouffe et le rassure tout à fois. Voulant s'en émanciper, il demande à partir quinze jours en camp de vacances.

Tout ce petit monde va se croiser, s'affronter, apprendre à se connaître, à se côtoyer, à se confronter, à s'entraider, s'apaiser , s'ouvrir aux autres et surtout à eux-mêmes.
Ils seront aidés par Aaron, Chelsea, Yvoire, Arthur, Erin et quelques autres.

Il est des âmes avec lesquelles on se connecte en une fraction de seconde sans aucune raison objective. C'est inexplicable. On a l'impression de les avoir toujours connues.

J'aime l'écriture de Nancy Guilbert. Toujours, elle me touche.
Depuis quelques romans, elle s'est davantage tournée vers les souffrances adolescentes et nous immerge dans ces cruelles réalités.
Servi par une très belle couverture, je savais que ce roman, dont le titre emprunte au langage de la boxe, me plairait.

C'est un roman choral coup de poing (sans mauvais jeu de mots) que nous délivre Nancy Guilbert.
Avec son écriture douce, sensible, sensorielle, elle aborde avec justesse et lumière des thématiques éminemment difficiles : les violences familiales, le deuil, les crises d'angoisse, la maladie, le handicap, la reconstruction, l'estime de soi. Ses personnages sont réellement incarnés et leur situation comme leur caractères (avec leurs mécanismes de défense) nous étreignent.

Au fil de ces jours qui passent aussi vite qu'on tourne les pages, au fil de l'attachement envers ces personnages et des paysages magnifiques dans lesquels on a l'impression d'être, Nancy Guilbert écrit la transformation de ces êtres au contact les uns des autres.
Et même si quinze jours, c'est court, ils marquent un tournant dans leurs trajectoires de vies, à tous.
Elle montre que, malgré tout, la vie peut être belle, que les humains ne sont pas tous mauvais, que la bienveillance, l'entraide et l'amitié existent et que l'adage du temps qui passe est vrai.

Certaines choses ne se comprennent qu'avec le cœur. On ne peut pas les expliquer autrement.