Chacun est libre de passer ses vacances où il le souhaite, mais il faut bien admettre de l'idée de rester un mois dans un cimetière et d'occuper en guise de petit appartement des cryptes mortuaires… c'est un peu singulier ! C'est néanmoins ce qui se déroule chaque année en Italie et nous allons retrouver une joyeuse troupe de vacanciers, à l'occasion de ce qui sera leur dernier été, puisque nous apprenons en cours d'album que le cimetière va être bientôt fermé, pour des raisons de sécurité. En fait, chacun vient en vacances dans ce cadre étrange pour des raisons différentes. Nous suivons en particulier le couple composé de la jeune Diletta et de son mari Adam (ils habitent désormais de l'autre côté de l'Atlantique). Ils sont accompagnés de Cosmo, leur petit garçon, encore naïf. Diletta n'a toujours pas digéré la mort de ses parents, qui ont récemment péri dans un accident. Pire encore, elle n'a pas pu être là pour l'enterrement. Elle a encore besoin de temps pour accepter les faits et cela se fera progressivement, à travers des séquences oniriques dans lesquelles elle va parvenir, peu à peu, à donner un sens à sa tristesse. C'est quelqu'un qui en temps normal ne parvient pas à communiquer facilement, qui garde pour elle toutes ses émotions. Son mari est très à l'écoute, il fait de son mieux pour lui faciliter la tâche, tandis que le petit garçon va enfin se faire des amis et vivre à sa manière des aventures singulières.
Giorgio, lui, est un autre personnage important, qui est à une autre phase du deuil. Sa compagne est morte depuis des années; pour autant, il éprouve le besoin de hanter les lieux, dans le cimetière, car il ne peut pas se détacher du souvenir de celle qui n'est plus là, même si pour lui la chose est définitivement actée. Pendant que les adultes sont empêtrés dans leurs sentiments personnels, dans leurs souvenirs, dans la nécessité d'aller de l'avant, les (petits ou pas, il y a de grands ados) enfants eux se réunissent, découvrent une crypte remplie d'eau, qui va leur servir de piscine, ainsi que des ossements. Tout pour eux semblent merveilleux, ou en tous les cas bien plus léger qu'aux yeux de leurs parents. Marco, Chiara et son "amoureux" Ivan, ont des soucis différents, il y en a pour tous les âges. Un dernier été au cimetière est aussi l'occasion d'aborder des thèmes comme l'homosexualité, à travers un personnage qui subit une forme de rejet et de méfiance et qui va permettre à un des adolescents de s'accepter, de comprendre qu'il vaut mieux une vérité, certes difficile mais porteuse d'avenir, que de s'enfermer dans un mensonge, auquel plus personne, au bout d'un moment, ne croit. Plusieurs niveaux de lecture et de vision de la réalité se croisent dans cette œuvre réalisée par une jeune artiste turinoise (Serena Ferrero, alias Santamatita) qui signe ici son premier roman graphique, et parvient à exprimer à sa manière tous ces regards différents, dans un style brut et parfois abstrait, où la forme et les couleurs prédominent sur les détails, qui sont souvent volontairement éludés. Une manière de faire particulière qui risque de ne pas forcément séduire tout le monde, mais qui est en tout les cas la marque de quelqu'un qui a choisi de développer son propre univers, avec un album qui se veut le pont entre la tristesse du deuil, son élaboration nécessaire et des lendemains où il sera possible de partir à nouveau, de se détacher. Bref, de vivre tout simplement. Touchant et singulier, disponible chez Ankama.
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