L’homme que je ne devais pas aimer d’Agathe Ruga

Je le savais en me plongeant dedans : je savais que la plume d'Agathe Ruga allait kidnapper ma tête et cœur avec ce second roman. J'avais raison...

Voici la quatrième de couverture : " Il y a un an, je suis tombée amoureuse comme on tombe malade. Il m'a regardée, c'est tout. Dans ses yeux, dans leur promesse et ma renaissance, j'étais soudain atteinte d'un mal incurable ne laissant présager rien de beau ni de fécond. Son regard était la goupille d'une grenade, un compte à rebours vers la mort programmée de ma famille. " Ariane, heureuse en mariage et mère comblée de trois enfants, fait la rencontre de Sandro. Cette passion se propage comme un incendie et dévore peu à peu les actes de sa vie. Ariane est en fuite. L'amour pour son mari, l'attention à son entourage, à la littérature dont elle a fait son métier, sont remplacés par des gestes irrationnels, destinés à attirer l'attention d'un quasi-inconnu. Quels démons poussent Ariane vers cette obsession adolescente ? Quels pères, quels hommes de sa vie ce jeune roi de la nuit ressuscite-t-il ?

Quand j'avais découvert Sous le soleil de tes cheveux blonds, j'avais été très sensible à la manière virtuose dont l'autrice jouait avec les émotions, les siennes et les nôtres. Sous couvert de souvenirs d'une amitié forte, Agathe m'a parlé à moi, de mes souvenirs, de mes amis, comme elle a parlé à des milliers d'autres personnes, de milliers d'autres passés.

L’homme devais aimer d’Agathe Ruga

Avec L'homme que je ne devais pas aimer, la focale change : on passe de l'amitié à l'amour. Et pourtant. Pourtant, la question centrale dans ce lien à l'autre, c'est le lien à soi. Ariane est un peu chacune de nous. Pas parce qu'on doit toutes tomber amoureuse d'un autre, mais parce que ses doutes, ses espoirs, ses désirs, ses rêves et ses peurs, nous les ressentons presque viscéralement. Dans tout ce récit, celui d'une femme qui devient adultère, je n'ai jamais eu envie de juger Ariane, ni d'être Ariane d'ailleurs. J'étais sa meilleure amie, celle qui, en l'aimant et en lui souhaitant le meilleur, la suivait au bar, regardait avec elle son portable et lui filait des clopes en attendant un regard dans la rue, tout en se disant que c'était sûrement une connerie.

La peinture du désir est centrale, ce désir que l'on veut ressentir, ce désir que l'on veut inspirer. Mais la vision de l'amour aussi est sensible et juste. Le regard porté sur le mariage, sans concession, n'est pas non plus manichéen. La maternité n'est décrite ni comme le frein, ni comme l'épanouissement, elle est un morceau de nous, central, essentiel, envahissant parfois mais vital.

Le style d'Agathe Ruga est puissant, taillé à la serpe. Ses mots sont percutants, le rythme est alerte et elle a un sens de la formule qui, moi, me touche parce qu'il résonne, laissant dans mon esprit, des fins de phrases, des clausules, en écho...pour longtemps !

Priscilla