Disparus : l'affaire yves godart en docu bd chez petit à petit

Par Universcomics @Josemaniette

 Je vais vous faire une confession : je ne suis pas particulièrement friand de la petite musique d'introduction de Faites entrer l'accusé et des émissions présentées par Christophe Hondelatte. Les faits divers ne m'intéressent pas plus que cela, mais il y a une exception notable. Lorsque Petit à Petit propose un ouvrage au format docu BD, c'est-à-dire des pages de rédactionnel revenant sur une affaire criminelle célèbre, non élucidée, et d'autres en bande dessinée, pour illustrer l'ensemble. Nous avions déjà eu l'occasion de lire l'excellent La traque qui se proposait de couvrir toute l'affaire Dupont de Ligonnès (lire ici) : le fait est que Disparus s'intéresse ce coup-ci au cas étrange d'Yves Godard et se révèle, une fois encore, être une lecture indispensable. Au centre de cette sordide aventure, Yves Godard est un médecin installé dans le Calvados, aux pratiques peu orthodoxes (médecine douce, naturopathie, acupuncture, une certaine dérive vers une médecine presque chamanique). L'homme est marié, il élève deux enfants, semble avoir accumulé les dettes (essentiellement car il refuse de payer contributions sociales et impôts), a très peu d'amis et va être au centre d'un dossier pour le moins épineux. Tout d'abord, même si le corps n'est jamais retrouvé, sa femme, Marie France, semble avoir été assassinée au domicile du couple, de manière assez atroce. Des traces de sang sont retrouvés un peu partout sur le matelas ou les murs, mais aussi dans le camping-car de la famille. Yves à loué un bateau à moteur pour faire une excursion de plusieurs jours en mer, avec ses deux enfants, alors que ceux-ci auraient normalement dû être à l'école, à l'occasion de la rentrée scolaire 1999. Ils prennent le large dans la Manche et à partir de là, personne n'est plus en mesure de reconstituer précisément le périple et les motivations derrière leurs déplacements, qui vont être au cœur de l'ouvrage publié par les éditions Petit à Petit. Ils disparaissent, tout bonnement. Bien plus tard, des ossements vont être repêchés…

Comme toujours pour que ce genre particulier qu'est le docu BD, ici il faut être capable de présenter les choses avec une grande clarté, de savoir séparer puis bien amener tous les éléments du dossier, en essayant de garder une réelle objectivité et d'insuffler, là où c'est possible et sans trahir l'histoire réelle, quelques éléments narratifs qui permettent de l'enrichir et de la rendre passionnante pour le lecteur de passage. Pascal Bresson (scénario) et Béatrice Merdrignac (documentaires) s'en sorte à merveille, en maniant le regard des enquêteurs pour nous éclairer sur cette affaire si complexe et simple à la fois. On en arrive ainsi au terme de l'ouvrage avec différentes pistes, différentes hypothèses patiemment échafaudées, et chacun pourra se forger une idée sur ce qui a pu se passer. Notons que le dessin est l'œuvre d'un seul artiste d'un bout à l'autre de l'ouvrage, Samuel Figuière, ce qui permet de donner une réelle unité à l'ensemble. Et que les planches, tout en retenue, avec des personnages bien campés et immédiatement identifiables, ajoutent de la clarté à un ensemble qui n'est jamais pris en défaut. C'est toute l'idée d'un docu BD qui est en fait réellement pertinente; plutôt que de proposer une version en bande dessinée, un vrai graphic novel, qui pour le coup nécessiterait une prise de position, un angle de vue un peu plus subjectif, ou bien de se consacrer à un documentaire au format vidéo, le travail de Petit à Petit parvient à unir à la fois une ambition artistique et une transmission pédagogique, ou en tous les cas journalistique, sur des faits d'actualité comme l'affaire Godard. Après cette nouvelle démonstration de savoir-faire brillamment réussie, on a hâte de découvrir celle qui sera consacrée à l'affaire du petit Grégory, que l'éditeur nous promet pour cet automne. On est déjà impatients d'y être !


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