Sur la place du marché, On raconte que la ville fut bâtie sur des strates d'histoires, et les rues tracées par des géants. On raconte aussi qu'Ivraie est née sur un tas d'ordures lors d'une nuit d'orage ; qu'il fut un temps lointain où Malou la sorcière était Reine. On murmure à qui veut le croire que dans la Salle Ouverte aux Quatre Vents, le Vieux Roi a quitté son trône et marché vers sa mort, égrenant derrière lui la promesse de vœux exaucés, et qu'un Jeune Prétendant naitra de la mer pour faire advenir un nouveau cycle.
Pourquoi ce livre ? C’est suite à un événement (qui ne concernait en rien ce titre) dans ma librairie que j’ai acheté ce roman. Les deux libraires ont été dithyrambiques à un tel point que nous sommes plusieurs à être repartis avec !
Malou dit vrai est un titre intrigant, surtout quand on sait que Malou et Ivraie sont deux personnages distincts dans l’histoire. Même si le jeu de mots n’est pas particulièrement recherché, on sent que l’autrice aime jouer sur le langage et ses sonorités. C’est le cas également dans l’intrigue. Je me suis régalée de cette plume poétique, métaphorique, surtout au début quand on découvre l’univers et les personnages qui le composent. Ce n’est pas un style accessible, dans le fait qu’elle est si imagée qu’il faut une concentration maximale et un amour du langage implicite pour apprécier pleinement cette lecture.
Dans mon cas j’ai adoré le début, comme je l’ai souligné auparavant, parce que c’est une façon merveilleuse de mettre en avant les personnages. La narration, oscillant entre troisième personne et deuxième personne du singulier, est également osée mais j’ai aimé cela car les pensées de chaque personnage restent hermétiques, ce qui laisse une grande place aux secrets et à l’interprétation.
Avec un tel début, j’ai vraiment cru que ce serait un coup de cœur ! Plus je progressais dans l’ouvrage et plus j’avais le sentiment de ne pas comprendre ce que je lisais, voire que l’ensemble brassait du vent. Bien sûr, l’intrigue est réfléchie et il y a un véritable objectif derrière tant de fard. Seulement, le style élégant et imagé s’est mordu la queue, car cela a rendu la lecture trop inaccessible. De fait, j’ai le sentiment d’être passée totalement à côté en n’y comprenant rien... J’avoue même avoir décroché au moment même où le scénario prenait une tournure différente, à la fois plus dramatique et plus mouvementé. La rébellion d’Ivraie, les révélations sur Malou, j’ai lu tout cela sans en tirer quoi que ce soit… Bref, parvenue à la fin, j’étais triste de quitter une si belle plume mais soulagée que cela n’ait pas duré plus encore.
Difficile également de s’attacher aux personnages, en raison de ce style et de ce choix de narrateur qui maintient tout le monde à l’écart de nous. Bien sûr, on déplore la captivité d’Ivraie et sa façon discrète de se rebeller pour s’en sortir, mais mon sentiment vis-à-vis d’elle s’arrête ici. J’ai franchement eu du mal à cerner Malou, sorcière mais pas que, et plusieurs jours après avoir terminé ma lecture, je ne sais qu’en penser ! En revanche, j’ai beaucoup aimé le personnage d’On, notamment la longue description qui introduit son rôle dans tout cela : sûrement mon passage favori !
« C’est un beau roman, c’est une belle histoire… » ou pas ! Effectivement la forme est parfaite, avec un style aérien et un sens du phrasé parfait. Malgré sa poésie et ses métaphores, la plume reste fluide et nous entraîne aisément dans cet univers merveilleux. Le fond m’a moins convaincue, notamment parce qu’il est difficile de s’attacher aux personnages inaccessible, aussi parce qu’il est difficile de comprendre et d’interpréter. C’est une lecture marquante pour de nombreux points et je suis persuadée de ne pas l’oublier de sitôt, seulement je ne peux m’empêcher d’être déçue d’être passée à côté…
14/20