Le sexe précaire : Ethnographie en milieu porno amateur francophone – Éléonore HADDIOUI

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Le sexe précaire : Ethnographie en milieu porno amateur francophone
Par
Éléonore HADDIOUI
Chez Academia, collection « Antropologie perspective #27« 

Avertissements de contenu : sexe, violences sexuelles et sexistes (VSS), objectivation du corps féminin, grossophobie, transphobie, sexisme, violences verbales, putophobie.

Comment est produit le porno aujourd’hui ? Quels sont les vécus des personnes travaillant dans ce secteur, au-delà des préjugés et des considérations morales ? Basée sur une enquête de terrain en milieux pornographiques amateurs francophones, cette recherche interroge les vécus du travail pornographique à partir des travailleurs et travailleuses elles-mêmes. Sur des plateformes majoritairement en ligne, cette production vient remettre en question nos sexualités, notre rapport au numérique, et au capitalisme.


J’allais dire que je lis très peu d’essais ou de rendus d’études d’anthropologie avant de me rappeler 1, c’est une branche de la sociologie et 2, la plupart des essais que j’ai lu en psychologie utilise les mêmes mécaniques d’études que l’anthropologie.
Bref.

Face à l’étude d’ÉléonoreHaddioui, Le sexe précaire, j’ai vraiment eu peur de recevoir une claque pas très sympathique de la réalité sexiste de ce monde.
Du coup : oui, la réalité de ce monde est profondément sexiste mais notre autrice-chercheuse ne souhaite pas vraiment nous frapper avec ses données. Elle préfère qu’on les comprenne, les assimile. Pourquoi sortir un livre pour le grand public si on parle dans un jargon que seul-es ses camarades scientifiques comprendront ? Éléonore Haddioui a su se mettre à mon niveau et je lui en remercie.

Son travail utilise trois sites de récupération de données différentes :
– Le monde du porno fait par des amateurs professionnels via les réalisateurs et les actrices rencontré-es lors d’un Salon de l’Érotisme ;
– Le monde des show par webcam via le site cam4 et quelques unes de ses performeuses ;
– Le monde de la vente de nudes via Twitter et ses photographes-modèles – dont un homme trans.
Certaine personne rencontrée dans un chapitre se retrouve dans l’autre car très vite, Le sexe précaire nous apprend que vendre des prestations sexuelles en ligne, c’est en effet précaire. Et comme tout travailleureuse précaire : il faut multiplier les jobs – ou ici : la visibilité de son corps et de ses prestations.
Toutes les personnes questionnées par Éléonore Haddioui sont majeures et francophones. Son étude de terrain se passe entre 2019 et 2020.
Comme elle l’explique très bien en préambule : internet est une toile d’araignée changeante, comme le sont également les règlements intérieurs des sites utilisés ou encore les lois des pays francophones. En quatre ans, tout peut changer. Ce qu’elle nous explique donc dans son livre est une vision du milieu pornographique amateur datée.

Et pourtant, c’est une vision ô combien important. Il est important d’humaniser les travailleureuses du sexe, qu’iels soient sur les trottoirs ou sur le web. Avec Le sexe précaire, le travail d’Éléonore Haddioui est impressionnant de justesse. Elle n’entre pas dans un surplus d’affect blessant. Son étude est aussi sérieuse qu’excellemment bien menée.