Dolores Clairborne de Stephen King, 2019, 360 pages. Dolores Clairborne est un roman profondément féministe qui me fait d'autant plus aimer Stephen King! Le personnage éponyme se rend, au début du roman, chez le shérif pour y avouer un meurtre: celui de son mari, commis il y a plusieurs décennies de cela. C'est donc sa confession que le lecteur va lire. Il faut d'abord s'habituer au style très particulier du roman. C'est un monologue, sans chapitres. Comme dans un seul souffle, Dolores se confie et revient sur ce que fut sa vie. On sent que c'est une femme qui a reçu peu d'éducation. Elle a parfois du mal à s'exprimer, jure, fait preuve d'une syntaxe maladroite. Le décor est planté. Dolores vient d'un milieu pauvre, sans éducation et là où elle a échoué, faisant office de femme à tout faire chez une riche dame, elle a poussé ses enfants à faire des études et à réussir, pour sa plus grande fierté. Alors pourquoi vient-elle avouer un meurtre trente ans après et pourquoi l'a-t-elle commis? King est une fois de plus brillant. La narration n'est pas linéaire: ellipses, sauts dans le temps, retour en arrière nous permettent de prendre le pouls d'une époque où la femme n'avait que peu de place dans la société, où les hommes tout puissants dirigeaient et menaient le monde. Dolores Clairborne devient ainsi un roman d'émancipation féminine, touchant, poignant, révoltant. C'est un hommage aux femmes, aux mères, aux filles qui ont tant souffert (et qui souffrent toujours). C'est violent, âpre et dur, poussiéreux comme l'Amérique des années 60. A mi-chemin entre le thriller et le roman sociétal, King dresse le portrait d'une société pervertie et déclinante. Avec Dolores Clairborne, le King signe un chef d'œuvre, une œuvre nécessaire.