Dans le même univers que celui du Puits des mémoires, Kaelyn, fille d’un maître d’armes, rêve de reprendre le flambeau paternel, tandis que les autres filles de son âge rêvent d’un beau mariage. Elle a le talent, l’instinct, la volonté. Elle ne demande qu’à apprendre. Mais cela ne suffit pas : c’est un monde dur, un monde d’hommes, où la place d’une femme est auprès de son mari, de ses enfants, de ses casseroles. Il va falloir lutter. Elle s’engage donc dans cette grande armée qui recrute partout des volontaires pour aller se battre au bout du monde. Des milliers de soldats partis « libérer » le lointain sultanat d’Azman, plaque tournante de l’esclavage, terre barbare où règnent les cannibales. Dans la violence de la guerre, elle veut acquérir seule ce que personne n’a voulu lui enseigner. Mais le grand sud, plongé dans le chaos de l’invasion, va bouleverser son destin bien au-delà de ses attentes…
Pourquoi ce livre ? Cela fait des années que j’ai découvert cet auteur, d’abord par sa trilogie Le Puits des mémoires puis par son diptyque Aeternia. Une fois n’est pas coutume, il a ensuite écrite un one shot avec La Maîtresse de guerre, qu’il est a priori conseillé de lire avant d’attaquer une énième saga avec La Part des ombres. J’ai donc fait les choses dans le bon ordre en attaquant ce titre unique, qui se place malgré tout dans l’univers du Puits des mémoires. Je préfère prévenir que cette chronique va révéler des événements clés de l'intrigue. Désolée par avance.
Je ressors profondément déçue par La Maîtresse de guerre et si la plume n'avait pas rendu cette lecture aisée par une fluidité exemplaire, je ne sais pas si je serais allée au bout. Dans la même idée, ayant lu le bouquin en vacances, c'était la lecture parfaite pour reposer le cerveau après quelques lectures parfaites et avant d’attaquer un gros morceau (actuellement en cours, Chroniques des années noires de Kim Stanley Robinson, qui compte plus de mille pages). Pour en revenir à nos moutons, j’ai lu ce one shot au moment opportun, même s’il recèle de la Fantasy qui n’est plus imaginée pour moi.
Le plus gros défaut concerne la facilité dans laquelle tout se déroule. Ok, on a affaire à un maître de guerre et à son élève, probablement la plus douée de tous. Tous les faits d’armes représentent pour eux une bagatelle… Cela n’excuse pourtant pas toutes les facilités qui gravitent autour d’eux, que ce soit de la manière dont ils fuient, la manière dont ils sont crus alors même qu’ils trahissent plusieurs fois leur “camp”, etc. Pour des personnages intelligents et fins stratèges, ils ne voient jamais venir les menaces et semblent se plier aux aléas des évènements sans trop réfléchir. C'est ce que je qualifie de Fantasy trop facile, écrite pour poser son cerveau et passer un bon moment sans avoir à se poser la moindre question.
J’ai également eu un blocage sur la temporalité dans le récit. Des fois, les ellipses sont explicitées par une petite mention dans la narration. On comprend alors à quel point le temps est passé vite, ou non. Vers la fin, c’est bien plus complexe et j’ai plusieurs fois froncé les sourcils en me demandant si l’action avait duré une nuit ou une semaine (attention spoiler alert… je ne peux pas comprendre comment on subit un poison brutal et mortel et se remettre debout en pleine forme en un laps de temps si court. C’est le genre de faits irréalistes qui me sort complètement de ma lecture).
Malgré la facilité et le temps que passe vite, le récit comporte de nombreux temps morts. Quelques combats çà et là, une intrigue faussement pimentée d’un amoureux éconduit et incompris, des arrêts sur image de la cour raffinée. L’auteur a choisir la facilité en multipliant les courts chapitres sur ces fenêtres du quotidien, ça m’aurait semblé plus réfléchi et mature de composer, comme il se fait souvent dans la Fantasy, de courts introductions sur les grands faits, les décisions marquantes de la noblesse, des stratèges sur le champ de bataille, sur la tromperie de Fenia, etc.
Pas de chance, je manque également de convictions quant à la fin. Outre l’histoire du poison, Gabriel Katz a pensé une ultime scène de combat où, malgré les capacités surhumaines de nos maîtres, ils n’avaient aucune chance de finir tous deux en vie… Il faut croire que l’auteur ne sait pas plonger son récit dans le drame, préfèrant là encore la facilité d’un happy end à la brutalité de la réalité.
Je fus moyennement convaincue par les personnages. Je pensais sincèrement m’attacher à Kaelyn, étant donné sa personnalité de femme forte, mais j’ai été fatiguée de la voir s'amuser de ses atouts féminins à des moments peu propices à la sensualité. Elle n’a donc remporté qu’une maigre sympathie pour ses valeurs qu’elle respectera jusqu'à la fin. Son maître de guerre Hadrian est dépeint comme un homme détaché de tout pour rester maître de lui-même, il est ainsi difficile d’eprouver une quelconque émotion quand le personnage lui-même se ne permet pas d’en éprouver… J’ai même été choquée, la fois où il a ri. Les autres personnages sont très secondaires, en dehors des généraux, du camarade éconduit ou de l'épouse de Hadrian. En dehors de cette dernière, que j’aurais bien jetée aux crocodiles (encore qu'elle était loin d'être un agneau…), ils m’ont tous laissée indifférente puisque leur personnalité n’a pas été énormément travaillée. À la rigueur, j’ai ressenti une bouffée d’amour pour Mina, même si sa relation avec l’héroïne fut trop rapide, ne laissant aucune place à la rencontre et au développement du lien familial.
Je suis passée à côté de cette lecture et si je ne l’ai pas abandonnée, c'est uniquement pour sa facilité à lire. Je n’ai que moyennement apprécié les personnages et l'intrigue manque de corps, de rebondissements crédibles et d’une fin un tant soit peu réaliste. C’en est à un point où j'hésite à présent à lire la dernière saga écrite par l’auteur, qui rassemble des personnages issus de toutes ses précédentes productions. Dans tous les cas, je déconseille de commencer par ce one shot, l’auteur a mieux pensé ses intrigues dans ses deux autres séries.
08/20