[BD] Les notes rouges - Nadia Nakhlé (***** pour le dessin et l'intensité des couleurs - **** pour le scénario - *** pour le traitement inégal des personnages)

Par Philisine Cave

Oui, en ce moment, je décline mes notations (je décline tout court, commenteraient certaines perfides mauvaises langues, ... à raison, à raison !).

Les notes rouges propose une fraternité de toute beauté faite de mots laissés, de souvenirs (plus ou moins heureux, plus ou moins douloureux), d'espoir dans une époque sombre (celle de la seconde guerre mondiale, celle de l'après-guerre). Ce roman graphique somptueux présente un duo d'orphelins : une jeune fille pianiste (Anna), un garçonnet en devenir (Dorian) qui se construit à l'ombre et grâce à sa sœur, avant leur irrémédiable et irréversible séparation. Les notes rouges nous montre l'attente d'hypothétiques retrouvailles dans une ère de la haine et des génocides. 

Comme dans Les oiseaux ne se retournent pas, j'ai été scotchée par le graphisme, le lyrisme de la narration de Nadia Nakhlé qui use différents registres. J'aime ses images très arty, son traitement et la profondeur des couleurs qui rend intense et dense l'interprétation de chaque planche. J'avoue avoir été plus accrochée par l'objet-livre, son contenu fait de poèmes, de lettres, de rappels historiques. J'ai apprécié les dessins plutôt classiques respectant l'époque narrée (années 1940-1960). J'ai été moins convaincue par le traitement des personnages et leur devenir. Si on voit et on respire Anna, Dorian reste une sorte de fantôme, a un côté évanescent, malgré un parcours chaotique : il m'a manqué de la profondeur dans ce personnage (et pourtant ce qu'il vit est très lourd), comme si Nadia Nakhlé ne voulait pas l'abîmer. C'est peut-être voulu, dans le sens où l'autrice  peut-être souhaitait mettre la lumière sur l'attente d'Anna, mais j'ai senti le personnage de Dorian comme secondaire, subsidiaire à celui de sa soeur, et c'est bien dommage car leurs réactions  différent et se complètent.

Un roman graphique à découvrir pour le graphisme, la diversité et l'ingéniosité littéraires de l'autrice Nadia Nakhlé, pour une piqûre de rappel historique foncièrement utile pour ne jamais oublier et pour maintenir un état de veille constant face aux didacteurs/autocrates à la propension expansionniste contraire aux droits humains et au droit des peuples à disposer de leur sol.

Editions Delcourt / Mirages

Lu dans la cadre d'une Masse critique privilégiée Babelio en partenariat avec les éditions Delcourt / Mirages : un très très très grand merci pour cette proposition de lecture. J'ai été ravie de retrouver l'univers et la plume fantastiques de Nadia Nakhlé.

De la même autrice : Les oiseaux ne se retournent pas