En deux mots
« Partout où j’allais, je notais des adresses, des détails pour vous les livrer, vous rendre ivres, avides de les dévorer. De les noter pour un jour les rencontrer. Je les versais dans mes posts, et racontais en parallèle un livre nouveau en train de naître. » Voici rassemblées les chroniques newyorkaises de Katherine Pancol, mêlant « la magie de New York et celle de l’écriture ».
Ma note
★★★ (bien aimé)
Ma chronique
« Un jour, j’irai à New York avec toi »
C’est un charmant petit livre, entre la chronique, le récit de voyage et le guide de New York que nous offre la plus américaine de nos romancières. Katherine Pancol a rassemblé ses chroniques pour un voyage inspirant dans la grande pomme.
Tout a commencé par les commentaires de lectrices et lecteurs, ravis de découvrir les posts de la romancière sur les réseaux sociaux : « Pourquoi ne pas rassembler vos chroniques dans un livre ? Comme ça on les aurait sous les yeux tout le temps… On empoignerait le livre et on lirait au hasard. Ça nous fait tant de bien de vous lire… » Une proposition qui a mûri jusqu’au jour l’idée de rassembler « la magie de New York et celle de l’écriture » est née. Mêler « le tintamarre de la ville et le travail en sourdine de l’écrivain (…) La vitesse de l’éclair contre le lent travail de l’écriture. » Alors, comme Katherine Pancol le souligne dans sa préface, « c’est arrivé un petit matin alors que j’étais dans ma cuisine à New York en train de siroter un café insipide. La vitalité, l’énergie de cette ville m’ont donné un élan, ont collé des ailes à mes doigts sur le clavier. Mais oui, bien sûr ! Je pouvais tordre les mots, en inventer de nouveaux, les alambiquer, les faire chanter, hurler, ils résonneraient de plus belle. À New York, dès qu’on met un pied dans la rue, on est éclaboussé par les détails, le bruit, les couleurs, les odeurs. La ville vous emporte. Fait sauter tous les barrages. On marche dans New York comme dans un film. Décapsulée, j’étais ! »
Voici donc le compte-rendu dynamisant de deux voyages dans la grande pomme, le premier d’octobre à novembre 2023, le second d’avril à mai 2024. L’occasion de constater pour la plus américaine de nos romancières combien la ville a changé : « elle change tout le temps, et pourtant c’est la même émotion, la même énergie qui électrise. Des bouts de mon passé défilent. J’ai vécu là et là et là aussi, je relève des noms de rues, de cafés, de stations de métro… C’est comme si je marchais sur du vieux avec des pieds tout neufs ! »
Une énergie communicative qui nous donne envie de prendre son pas, de déambuler avec elle à Manhattan. De retrouver les écureuils de Central Park (qui sont tristes le lundi) puis de monter dans un taxi jaune pour aller au Guggenheim, de se promener dans l’Upper West Side, de s’arrêter dans l’un des restaurants qu’elle nous conseille, d’aller faire du shopping ou encore de prendre le bus pour « descendre et remonter la ville ». Car durant ces voyages d’est en ouest ou du nord au sud, elle observe les gens et récolte « les divins détails de Nabokov », en écoutant leurs conversations, en regardant comment ils sont habillés.
Et quand le temps est maussade, les musées ou la lecture permettent de s’évader. A la Frick Collection (qui n’ouvrira à nouveau qu’en avril 2025, le temps des travaux de rénovation), elle va même jusqu’à « choisir un tableau, puis un morceau de tableau, à le contempler jusqu’à en oublier le reste de l’œuvre, jusqu’à en saisir la beauté, la délicatesse, la singularité, la force de ce détail travaillé par le peintre. » (En l’occurrence, Love Letters de Fragonard).
Dans ces pérégrinations newyorkaises, la magie du roman et celle du cinéma se mêlent allègrement à la légende de la ville qui ne dort jamais, même si « les librairies comme les cinémas disparaissent à New York ». Il reste Breakfast at Tiffany’s de Truman Capote, il reste le Chelsea Hotel où Jack Kerouac a écrit Sur la route et où on pouvait croiser Leonard Cohen, Patti Smith, Tennessee Williams, Bukowski, Janis Joplin, Jimi Hendrix, Bob Dylan, Diego Rivera, Stanley Kubrick et des dizaines d’autres. »
Oui, ce guide ne pouvait pas ne pas nous vendre aussi du rêve. Je ne sais pas si Katherine Pancol goûté un Gimlet sur la cinquième avenue, mais elle partage – et nous fait partager – avec Philippe Labro cette passion américaine. Elle nous fait aussi miroiter un prochain roman en faisant sienne la citation de Sylvia Plath : « Chaque brin d’histoire, chaque bout de conversation, chaque incident est du matériel brut pour moi ». On se réjouit déjà !
Ajoutons à cette chronique deux autres belles idées, les jolis dessins de Julia Gash, à qui on doit également la couverture et la dizaine de pages offertes au lecteur en fin de volume pour y noter ses propres impressions.
NB. Tout d’abord, un grand merci pour m’avoir lu jusqu’ici ! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre et en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.
Signalons que ce 6 novembre La Grande Librairie se met à l’heure américaine. Augustin Trapenard y accueillera notamment Katherine Pancol.
Sous les platanes de Manhattan
Katherine Pancol
Éditions Albin Michel
Récit
128 p., 16,90 €
EAN 9782226498496
Paru le 4/11/2024
Ce qu’en dit l’éditeur
Katherine et New York : une histoire d’amour.
Elle y a vécu des années, et elle y revient souvent. Elle arpente Manhattan, elle « trottine, émulsionne et bavarde », elle nous fait découvrir ses coups de cœur et ses coins secrets, on rencontre ses amis – ce peintre qu’elle connut à la rue et qui est devenu « grand », ce vieux saxophoniste qui a accompagné́ Judy Garland et Maurice Chevalier et qui joue dans un square, quelques vieilles dames indignes…
C’est drôle et tendre, c’est Katherine dans son New York intime.
A la fin, en merveilleux bonus, elle nous livre quelques secrets d’écriture – comment les personnages viennent à elle jour après jour, comment ils s’animent et prennent vie…
Les critiques
Babelio
Lecteurs.com
Les premières pages du livre
« PRÉFACE
UN ÉCRIVAIN QUI N’ÉCRIT PAS CHAQUE JOUR EST UN ÉCRIVAIN QUI ROUILLE.
L’écrivain a besoin d’une gymnastique quotidienne. Exercer ses dix doigts sur le papier ou sur un écran, poser des mots comme des briques, chercher une image qui saute au visage ou pique le lecteur qui pourrait roupiller. La danseuse s’exerce à la barre, le pianiste fait des gammes, la soprano vocalise, le peintre lance des couleurs sur une toile, le cuisinier tente une nouvelle recette, le couturier croque une silhouette à la terrasse d’un café, le tapissier choisit ses fils de couleur. Tous, ils s’échauffent, s’émulsionnent, frétillent, prêts à basculer dans ce mystère délicieux qui torture et s’appelle « créer ». Chaque matin, il faut aller à l’entraînement tel un sportif de haut niveau. Pas de récolte sans sueur. C’est ainsi que les « posts » d’Instagram ou de Facebook ont fait irruption dans ma vie. Ils sont devenus mes exercices du matin. Raconter une ville, une situation, un dialogue ; illustrer une émotion ; montrer la vie du bout des mots. Des mots concrets qui claquent dans le cerveau. Longtemps, j’ai pataugé dans l’écriture de mes posts. Gênée par la longueur imposée, pas plus de 2 200 signes, points et virgules compris, 2 201 et hop ! le couperet tombe. Texte rejeté ! Obligée de trousser une histoire en peu de mots, d’accrocher le lecteur, de l’affriander pour qu’il entre dans le récit et s’y trémousse. J’ai appris à me jouer du format imposé. Coupe, coupe, ma fille, et tu trouveras un joyau.
C’est arrivé un petit matin alors que j’étais dans ma cuisine à New York en train de siroter un café insipide. La vitalité, l’énergie de cette ville m’ont donné un élan, ont collé des ailes à mes doigts sur le clavier. Mais oui, bien sûr ! Je pouvais tordre les mots, en inventer de nouveaux, les alambiquer, les faire chanter, hurler, ils résonneraient de plus belle. À New York, dès qu’on met un pied dans la rue, on est éclaboussé par les détails, le bruit, les couleurs, les odeurs. La ville vous emporte. Fait sauter tous les barrages. On marche dans New York comme dans un film. Décapsulée, j’étais ! Je pouvais faire fi du cadre imposé (2 200 signes) et même, ô bonheur, l’utiliser. Ah ! Ah ! loi des réseaux, vous croyiez m’emprisonner ? Vous m’avez délivrée. J’allais désormais chevaucher à la hussarde. Chercher, récolter, déployer, puis couper, couper pour mieux tendre le jarret.
C’est ainsi qu’est né ce petit livre qui narre deux mystères : la magie de New York et celle de l’écriture. Le tintamarre de la ville et le travail en sourdine de l’écrivain qui rumine. Partout où j’allais, je notais des adresses, des détails pour vous les livrer, vous rendre ivres, avides de les dévorer. De les noter pour un jour les rencontrer. Je les versais dans mes posts, et racontais en parallèle un livre nouveau en train de naître. La vitesse de l’éclair contre le lent travail de l’écriture.
Au lieu de se caramboler, les deux se sont enlacés. Je jubilais. Et vous qui lisiez, vous jubiliez aussi. Encore, encore des mots qui sonnent et empoignent la vie ! Et je m’électrisais, les doigts dans la prise. Heureuse et libre.
Ciel ! Je viens de vérifier : cette préface dépasse le nombre de signes imposé par les réseaux tyrans. Je vais me faire couper la chique… Pas grave, ma fille, tu écris une préface, pas un post, gambille tranquille!
1er VOYAGE : OCTOBRE 2023
6 OCTOBRE (JUSTE AVANT MON DÉPART POUR NEW YORK) :
Oh ! Boy ! Ce regard qui me fixe, lourd, humide de tourments, d’interrogations. « Tu fais quoi à courir à droite, à gauche, à essayer des pulls, des écharpes, des jeans, à prendre des poses devant le miroir, c’est pour qui tout ça ? pour quoi ? »
Et si je n’avais pas compris qu’il souffrait, tremblant, aspiré de chagrin, il se colle contre moi, emboîtant chacun de mes pas, son dos appuyant contre mes jambes quand je suspends ma marche dans l’appartement. Je m’accroupis, caresse sa tête, murmure : « Je vais partir, mais je reviendrai, promis, j’ai besoin d’aller à New York, c’est mon autre ville, tu sais bien, j’y ai vécu dix ans. C’est comme Paris pour moi. Je ne peux pas t’emmener, ce n’est pas un endroit pour les chiens là-bas, tu serais malheureux. »
Et sa presque grève de la faim… « Tu crois que tu vas me faire oublier la grande valise rouge, gueule ouverte sur le parquet, que tu remplis petit à petit ? Tu penses que tu vas m’amadouer avec un petit gâteau ou un plat pour chiens délicats ? Je ne suis pas dupe. »
Il saute dans la valise rouge et me fixe, toujours grave, en apnée de douleur. Et mes bras chargés de pulls, de tee-shirts, de chaussettes retombent et je soupire : « … mais tu seras avec Martine, mon amie libraire. Tu connais sa jolie librairie à façade rouge, tu ne seras pas en terre inconnue au milieu des piles de livres. Elle t’emmènera gambader dans les bois, autour des lacs, elle te parlera anglais, toi, petit border terrier qui vient d’Écosse, elle te mitonnera de bons petits plats… »
Et puis ce n’est que pour un mois, ça passe vite pour un petit Boy qui ne connaît pas le calendrier…
8 OCTOBRE :
Départ pour New York, Orly terminal 4. Je suis assise sur les genoux des anges, un sourire de citrouille heureuse fend mon visage. L’avion a du retard. Une heure, deux heures, trois heures, qu’importe !
Je furète dans les couloirs de ce tout nouveau terminal, tombe sur une fontaine à eau qui dit qu’en France on vit d’amour et d’eau fraîche ! Reviens m’asseoir, reprends mon sourire de citrouille et attends.
Arrivée à Newark. Taxi jaune. Le chauffeur, haïtien, vit depuis quarante-trois ans à NY mais n’a pas oublié son français. Costume en Tergal beige, dos d’athlète, cravate et lunettes noires. Il parle, parle, heureux de faire chanter une langue presque oubliée. La nuit tombe, les gratte-ciels s’allument, ma tête se dévisse, je ne veux rien manquer. On longe l’Hudson River, on traverse Central Park, feux rouges qui se balancent au-dessus de nos têtes, sirènes d’ambulances, de voitures de police, il me raconte l’histoire de son île natale, les Duvalier, les tontons macoutes, la violence quotidienne, les gangs. Il y retourne trois fois par an et en revient secoué de larmes : « Et alors je ne sais plus où habiter… »
Le taxi s’arrête, je lève le nez, je suis arrivée chez mon amie Christy, tout en haut de la ville, on the East Side. La magie new-yorkaise va commencer…
10 OCTOBRE :
Hier, first morning in New York !
6 heures 30 du matin, réveil (décalage horaire oblige !), petit déjeuner, douche, poudre sur le nez, j’ouvre la porte de l’appartement pour aller fureter à Central Park. Christy habite en face du Park, juste après le Guggenheim Museum. Un immense appartement où elle accueille tous ses amis qui viennent à New York. Comme si c’était évident. Comme si c’était une offense d’aller habiter ailleurs. Christy est un tourbillon, parfois dur à suivre. Elle arpente l’appartement (les musées et les rues) deux téléphones collés aux oreilles et mène deux conversations en même temps, l’une avec le plombier, l’autre avec un producteur de films pour mettre en ordre tous ses projets. Christy est une femme d’affaires très, très occupée.
À mon retour du parc, Grace est là ! Grace est la dame qui s’occupe de l’appartement, de Christy, de son emploi du temps, de ses requêtes, de sa tête en l’air. Grace est le cerveau de Christy. On se prend dans les bras, on s’embrasse, on bavarde. Je lui ai apporté un parfum de Serge Lutens (qu’elle a reniflé sur moi, la dernière fois). Grace est une personne très réservée, mais je crois bien qu’elle était contente.
Je repars dans le parc, il fait beau (un peu frisquet, 9 °C), des gens courent, bicyclettent, promènent des chiens réunis en groupe de quatre ou cinq, leurs laisses s’emmêlent, les chiens tirent à hue et à dia, se font rappeler à l’ordre. Boy, qui n’a pas la mentalité d’un chien de traîneau, détesterait.
Nez contre la grille qui entoure le Réservoir, immense étendue d’eau qui alimente la ville. Au loin, les gratte-ciels de Central Park West. Les arbres sont vert-vert, pas de rouge, ni d’orange, ni d’écureuils au pied des arbres qui attendent le touriste. Et pourtant, c’est l’automne, tout devrait être jaune.
Un petit tour au Guggenheim. Juste pour me remplir les yeux de l’escalier qui descend comme une grosse vis du plafond. Déjeuner dans un restaurant chinois sur la 87e Rue et la 3e Avenue avec Charlie, mon amour d’amie new-yorkaise. On se connaît depuis longtemps ! Elle venait étudier un an à Paris, j’étais alors journaliste à Paris-Match et à Elle. Coup de foudre amical. On ne s’est plus jamais quittées. Jamais oubliées. Charlie s’occupe de promouvoir le travail de jeunes artistes auprès de fondations et de musées. La conversation galope.
On repart bras dessus, bras dessous. En zigzag. On se serre les coudes. Les poubelles sur Lexington sont orange. Les terrasses fleurissent. Chaque café, chaque boutique a son appendice sur le trottoir. « C’est nouveau, ça », je dis à Charlie. « C’est depuis le Covid pour attirer le client qui avait déserté ! » Madison Avenue est toujours aussi chic, les boutiques de luxe défilent. Park Avenue, majestueuse… et sinistre, la Cinquième, immuable de traditions et d’histoire. Cary Grant, Deborah Kerr, Audrey Hepburn, Jane Fonda, Tom Hanks et beaucoup d’autres s’y sont promenés.
La ville a changé, elle change tout le temps, et pourtant c’est la même émotion, la même énergie qui électrise. Des bouts de mon passé défilent. J’ai vécu là et là et là aussi, je relève des noms de rues, de cafés, de stations de métro… C’est comme si je marchais sur du vieux avec des pieds tout neufs !
11 OCTOBRE :
Impossible de ne pas galoper à New York. C’est comme si on avait les doigts pris dans une prise électrique ! Hier, la mission, pour My Friend et moi, était de trouver un pub ou un restaurant français qui retransmettrait les quarts de finale de rugby (alerte ! Coupe du monde), samedi et dimanche prochains, à 15 heures, heure locale. Samedi, c’est pour encourager l’Irlande, dimanche pour applaudir les Français.
On repère sur Google des pubs downtown, uptown, et on part à l’’assaut. Métro n° 6 downtown (pris sur Lexington), on descend à Canal Street, gigantesque marché en plein air (on y trouve tout, tout et tout), et on va toquer à l’angle de West Broadway chez Joseph, un restaurant français. Pas de chance, il a fermé (victime du Covid). On repart dans Soho, vire à droite vers l’East Village, traverse Bowery, Forsyth Street (j’y ai habité !), et, en tournant sur Orchard Street au n° 127, je reconnais le restaurant Russ & Daughters où je m’empiffrais de poissons fumés, de pommes de terre, de honey cakes, quand j’habitais le quartier. Delicious, indeed. On s’y sent si bien. My Friend s’y prélasse et commande moult desserts pour ne plus repartir !
À presque chaque coin de rue (downtown), on respire des bouffées de cannabis, en vente libre depuis un an. Pour en acheter, deux conditions : avoir une carte d’identité ou un passeport et payer en liquide. Amazing ! On repart, on visite des pubs (la moitié a fermé, toujours à cause du Covid). On continue. Second Avenue, First Avenue, Avenue A, Avenue B, Avenue C. Au petit trot, on remonte vers Union Square où des joueurs d’échecs s’affrontent, la mine grave comme s’ils avaient le doigt posé sur l’arme atomique. Et hop ! on saute dans un bus, on aura peut-être plus de chance uptown.
On avait vu juste. Au premier pub irlandais, le Dylan Murphy’s sur 3rd Avenue (entre les 82e et 83e St.), bingo ! La serveuse derrière le bar est irlandaise, pétillante, very friendly. Quand on prononce le mot « rugby », elle se frappe la poitrine et crie que les Irlandais vont gagner samedi. « Venez, venez et surtout portez du vert ! On sera tous irlandais ce jour-là ! » Rendez-vous est pris.
Reste le principal : le match France/Afrique du Sud. Lumière dans ma tête : on va aller au consulat de France sur la 5e Avenue. Cap sur Albertine, la librairie française dans les locaux du consulat. Une bonne fée, Miriam, agite sa baguette : oui, il y a une retransmission organisée par les Français de Manhattan au pub 5th & MAD sur 5th Avenue et 36th St. ! Gagné ! On va pouvoir hurler devant un écran géant en mangeant de la baguette et du saucisson.
Le soleil se couche sur Manhattan. Mission remplie.
12 OCTOBRE :
« Sunny day, brilliant day, what a day ! » s’exclamaient les journalistes météo ce matin sur toutes les chaînes de télé, 70 °Fahrenheit assurés (21 °Celsius). Un café, un bout de fromage, trois noix du Brésil, deux œufs coque, un selfie avec Grace toujours royale, j’enfile mes chaussures argentées (j’ai apporté très peu de fringues, va falloir vous habituer !), enroule mon écharpe jaune, attrape mes lunettes noires et hop ! direction Central Park. Tour du Réservoir (je ne m’en lasse pas !). Les gens courent langue pendante ou poitrail arrogant, certains lisent un écran, d’autres discutent un contrat au téléphone, pas une minute à perdre. Time is money !
Comme de bien entendu, je me perds en route. My Friend aussi. On rencontre des écureuils, un p’tit pont romantique, une pelouse anglaise et… je ne sais plus où nous sommes ! Un joggeur au torse sanglé de muscles nous remet sur le droit chemin et repart en courant. Pas une minute à perdre !
Déjeuner chez Nougatine (trois-étoiles, un grand chef qui s’appelle Jean-Georges) au 1 Central Park West avec mon amie Marianne, Française qui vit à Manhattan depuis vingt ans et court tous les marathons du monde. Paris, New York, Buenos Aires, Londres, Chicago, etc. Marianne est encore plus optimiste que moi et ne voit que des verres à moitié pleins. Son mantra : « Elle est pas belle, la vie ? » Oui, oui, oui.
Promenade dans le Upper West Side. J’avais l’habitude d’aller aux puces le dimanche sur Colombus et 77th St. (vestes d’homme, pantalons trop larges, bijoux toc-toc). Un p’tit tour chez Zabar’s. J’achète leur it bag à 20 dollars, p’tit cabas chic et pratique, un presse-citron (pour le jus du matin, teint clair et nettoyage du foie, hihihi !). Balance mon p’tit cabas et me remplis de soleil. La vie est belle… même si je sais que non, pas vraiment. Sur le tronc des arbres, les New-Yorkais ont affiché le portrait des otages israéliens et un avis de recherche. Faites circuler !
À la 72e St. et Central Park West, arrêt devant le Dakota où fut assassiné John Lennon, il y a bientôt quarante-trois ans. Les badauds traînent toujours devant l’entrée, ils déposent des fleurs et allument des briquets. Arrêt suivant à Central Park dans le jardin qui lui est dédié. Strawberry Fields… forever. Des chanteurs grattent leur guitare. Les gens se recueillent. Le soleil décline. Va falloir rentrer.
C’était another glorious day dans cette ville électrique…
13 OCTOBRE :
Encore a glorious day !
Trajet en bus cette fois. Cap sur le bas de la ville et le Whitney Museum. Dans le Meatpacking (c’est le nouveau quartier à la mode qui crée, qui respire). On descend la 5e Avenue, belles vitrines chez Bergdorf Goodman, boutiques de luxe qui scintillent, bretzels et hot dogs dégoulinants dans les petites charrettes, Prométhée portant le monde (comme il pèse lourd en ce moment, notre monde !) au Rockfeller Center, cathédrale Saint-Patrick. On saute du bus et on vire à droite vers Times Square. Mauvaise idée ! Tous les touristes du monde s’y sont donné rendez-vous. Marée de portables, de groupes aveuglés par les néons des pubs, ordres aboyés par des guides affolés, chauffeurs de taxi couchés sur leur klaxon, vite, vite, on dégage vers l’East Side.
Au Whitney… au sixième étage, je suis frappée par la foudre. Accrochés aux murs, les tableaux de Henry Taylor, peintre américain, contemporain, noir, qui raconte la vie des siens. Allégories, détails de la vie quotidienne, fantasmes, violence, douceur, malheur. Je m’arrête devant chaque tableau et le bois. Plus envie d’aller voir les autres étages. Besoin de m’asseoir sur les marches du musée et de digérer. C’est ça, la peinture, montrer sans dire, avec des détails, comme l’écriture…
Souffle coupé. Peux plus marcher. My Friend veut repartir. Pas tout de suite. Envie de monter vers le ciel bleu. Seule. Et je grimpe les marches vers la High Line, une promenade toute verte, suspendue au-dessus des rues de Manhattan (de Gansevoort Street à la 34e Rue). À la 20e Rue, je redescends, toujours ivre. Un petit tour à la Praxis Gallery (20th St. et 10th Avenue), tenue par des amies argentines, désireuses de faire connaître la peinture de leur pays et de l’Amérique du Sud. Justina me montre les tableaux des dernières expos. On bavarde, un café tiédit entre nos mains, je lui raconte Henry Taylor, elle me raconte la vie des artistes immigrés aux États-Unis. Pas facile. Je me souviens du roman de Henry Miller, Lettres à Emil, racontant ses galères et sa frénésie lorsqu’il débarqua à Paris dans les années 1930.
Le soir, une alerte est donnée. À la radio, sur les écrans de télé et de téléphone. Demain, faites attention ! On prévoit des manifestations contre la guerre à Gaza. Éviter les lieux touristiques, les musées, les synagogues, les écoles, le métro, Central Park, « Tomorrow is a rage day », la colère va gronder dans les rues…
14 OCTOBRE :
Mission pour aujourd’hui : trouver un truc vert à porter pour assister au match Irlande/Nouvelle-Zélande au pub Dylan Murphy’s. « Du vert ! du vert ! nous avait dit la serveuse irlandaise. Montrez que vous êtes avec nous ! » Une écharpe, une casquette, un pompon ? Nous optons pour la casquette. Virage sur Lexington, bref arrêt à la hauteur de la 83e Rue devant la Luncheonette où, il y a quatre ans, je m’étais métamorphosée en groupie déglinguée devant Paul McCartney, qui dévorait un hamburger, assis à mes côtés. J’avais fini par me calmer, par reprendre mon souffle, aidée par les petites tapes affectueuses de l’ancien Beatles qui me répétait : « Ça va aller ! ça va aller ! », « Mais vous ne vous rendez pas compte, je hoquetais, vous êtes un grand morceau de ma vie, j’ai grandi avec vos chansons ! », « Je sais, je sais, mais j’aimerais bien déjeuner tranquille. » J’avais fini par m’excuser et l’avais laissé en paix, tout en lorgnant sur lui pour m’assurer que je ne rêvais pas.
On dévale des blocs entiers de rues. Zigzaguons entre Bloomingdale’s, H&M, Old Navy, pas le moindre pois vert ! My Friend a une adresse (downtown) de restaurant recommandé par Nicole Kidman, nous y fonçons tout en salivant et déchantons : le HanGawi n’ouvre (en semaine) qu’à 17 heures. Pas grave ! Il y a un japonais un peu plus bas, le NoNoNo. La serveuse nous tend un menu illisible. Écrit en minuscule. On commande au pif. Et on essaie de deviner ce que l’on mange.
Et si on allait voir le Flatiron Building, cet immeuble en forme de fer à repasser à l’angle de Broadway et de la 5e ? Reprise au galop, nouvelle déception ! Le Flatiron est ficelé dans des échafaudages de plaques et de piques. Méconnaissable ! Je me laisse tomber sur un banc et m’écroule de rire.
Essayons Broadway. Les vendeurs à la sauvette y pullulent. On trouvera bien une casquette verte sous une pile d’écharpes. On en déniche une. Une seule. On va tenter Levi’s (sur Broadway, entre Spring et Broome Street). Là, c’est sûr : on trouvera. Juste avant Levi’s, arrêt chez Brandy Melville, un magasin de fringues dont je garde un souvenir réjouissant. Grincements de dents : tous les vêtements sont en taille XS ou XL. Rien entre les deux. On fouille, on s’énerve, on repart. 22 104 pas au compteur, et il nous manque toujours une casquette.
Une expo photos au Fotografiska, 281 Park Avenue. On tend nos cartes de crédit. Bloquées. Je demande combien vaut un ticket. « 31 dollars », me répond un hautain méprisant. « Whaaaaat ? » je rugis. La veille, pour 23 dollars, au Whitney j’ai eu l’honneur de faire connaissance d’Henry Taylor ! « C’est comme ça. Si ça ne vous plaît pas, dégagez. » On dégage vite fait. On saute dans un bus direction uptown. La clim nous glace, on tousse, on frissonne, le bus tangue.
Mais… demain sera un jour formidable ! On verra l’Irlande triompher (on aime bien les Irlandais, pas beaucoup les Néo-Zélandais).
15 OCTOBRE :
Samedi. Il pleut dru, le thermomètre dégringole, nous avons rendez-vous à 15 heures dans le pub irlandais pour voir le match Irlande/Nouvelle-Zélande. C’est l’événement du jour. Inutile de nous parler d’autre chose. On a commencé dès le matin à faire et à défaire le match. Et si… et si … et si… À organiser les prochaines rencontres… et si… et si… et si… À soupeser le moral des troupes, car il n’y a pas que le physique qui compte, il y a les angoisses, les complexes, les anciens échecs qui reviennent et coupent les jarrets. On suppute en buvant du café, en lisant la presse sur nos portables.
13 heures, on se met en route. On aura ainsi le temps d’étudier la salle et de choisir le point stratégique où nous poser. Je coiffe ma casquette verte en promettant de la partager. Reçois une rafale de pluie sur le trottoir. Avance, courbée à 90 ° degrés pour éviter l’impact et ne pas être plaquée. Mon cœur balance. J’aime le jeu des Irlandais, la grâce, les passes. My Friend préférerait qu’ils soient éliminés car ce sont, à son avis, les seuls qui peuvent nous battre. Et le jeu des « et si… » recommence lorsque, au coin de Lexington et de la 3e Avenue, nous apercevons… une casquette verte sous un plastique trempé. Hourra !
Le pub se remplit. On a pris place à une table, face à un grand écran, au milieu d’une famille irlandaise qui a bien voulu nous accueillir en apercevant nos casquettes. Les bières défilent. Le match commence. Ryan, mon voisin, me fracasse l’épaule et les côtes à chaque élan de son équipe. Rugit : « Come on, Jimmy ! Come on, Johnny ! », se dresse, vocifère et s’écroule quand l’action échoue. À la mi-temps, il m’explique qu’ils reviennent de Las Vegas où ils ont assisté au concert de U2 dans la gigantesque sphère contenant 80 000 spectateurs. Il me montre des vidéos éblouissantes. Toujours jovial. L’Irlande ne perd que d’un point et, c’est sûr, va gagner ! J’opine. Quarante minutes plus tard, l’Irlande s’incline.
Johnny Sexton, James Lowe pleurent sur la pelouse. Ryan aussi, le front posé sur la table.
Et le prochain match ?
On se prépare pour France/Afrique du Sud en claquant des dents…
16 OCTOBRE, JOUR DU MATCH DE RUGBY DE LA FRANCE :
Et pourtant la journée avait bien commencé…
Température frisquette mais ciel bleu et grand soleil.
Un tour aux puces du dimanche sur Colombus Av.et 77e St. Ce jour-là, Colombus est fermée aux voitures de la 66e à la 76e St. On peut s’y promener le nez en l’air.
Les puces sur Colombus, autrefois… quand je vivais à New York, c’était l’endroit où s’habiller. Des pantalons à la Annie Hall, des 501 usés, des vestes de garçon en gros velours ou en tweed, des chemises de grand-mère, des robes années 1950. Aujourd’hui, c’est plutôt fouillis et compagnie, mais on peut y trouver un petit bonheur.
Déjeuner au café Boulud, 1900 Broadway, en face de l’Opéra. Une très bonne adresse. Chaleureux et bon. Je me chauffe les tibias pour le match à venir (France-Afrique du Sud) et bombe le torse. Même pas peur !
Le match est retransmis dans le pub préféré des Français à New York, le 5th & Mad. L’ambiance est bouillante. On se lève tous aux hymnes, la main sur le cœur. Coup d’envoi. Premier essai français. On se déchire de HOURRAS ! Et puis… on ondule. Joie ! Désespoir ! Joie ! DÉSESPOIR ! Un petit point, un tout petit point nous éjecte de la compétition…
Va me falloir marcher au moins 50 blocs avant que le verrou sur ma poitrine ne saute. Je mâche et remâche le match. Je n’arrive plus à respirer et je déteste l’arbitre néo-zélandais.
17 OCTOBRE :
Aujourd’hui, visite au Metropolitan Museum (le « Met », disent les New-Yorkais). Attachez vos ceintures ! Préparez-vous ! C’est comme embarquer pour la Lune. Vous n’y allez pas en passant par là et en achetant un ticket. Non, non, non ! Vous prenez votre billet sur le site du musée (sinon vous piétinez une heure devant les guichets), vous étudiez ce que vous voulez voir (il y a tellement de salles que les gardiens, eux-mêmes, en perdent leur casquette) et vous avalez un tube de calmants pour rester d’humeur égale.
Mais je brûlais d’envie d’aller voir les deux « shows » dont on me parlait : Matisse-Derain et Manet-Degas. Et je me suis lancée. Midi : premiers barrages franchis. Je respire. J’ignore encore que je suis tombée dans un labyrinthe. « Matisse-Derain ? », « Vous allez tout droit, traversez les allées médiévales, passez devant les sarcophages, les bijoux de Néfertiti, les Vierges sculptées, tournez à droite, à gauche, prenez le second ascenseur, descendez au sous-sol, prenez à gauche… et vous y êtes ! » J’ai tout oublié et décide de suivre deux Américaines qui semblent s’y diriger. Bingo ! J’y suis. Et me délecte. Les tableaux, les notes sur les murs, comment les émotions ont explosé les couleurs et les codes de l’époque. Sable rouge, mer violette, bateaux jaunes… Bonheur !
Cap sur Manet-Degas. Le guide que j’interroge bafouille, mais c’est au second floor, il en est sûr. Et ça recommence : à droite, à gauche, traverser, second ascenseur, sarcophages, aller tout droit. Je tourne en rond petit patapon, monte, descends et finis par trouver. Pour m’entendre dire que je dois aller au fond à droite (environ 500 mètres), scanner un code qui m’indiquera le temps d’attente et… je devrai patienter. Je recevrai un sms qui me donnera le feu vert. Je me console avec les œuvres de Rodin dans une salle, le Moyen Âge italien dans une autre, et reçois, une heure après, un message : « Prière de vous présenter dans les plus brefs délais. » Je fonce. Et m’ébahis encore. La profondeur et l’éclat de Manet, la délicatesse parfois cruelle de Degas. J’ai l’impression que les tableaux me regardent et j’entre en eux. Je reste plantée là. Prosternée devant tant de force et de beauté. Mais la foule me bouscule. Bouge de là ! Je me faufile, me tasse, monte sur la pointe des pieds, gîte à droite, à gauche. Allez ! Allez !
16 heures 30. Je ressors étourdie, éblouie… épuisée. Et vais m’écrouler dans le parc avec les écureuils !
18 OCTOBRE :
Il y a une chose que j’aime par-dessus tout à New York, c’est prendre le bus, descendre et remonter la ville. Exemple : je pars de Central Park tout en haut de la ville, monte dans le bus M1 et descends tout en bas à Washington Square. (Compter une bonne heure !) Vais me balader à l’Est ou à l’Ouest selon mon humeur (East Village, West Village) et reprends un bus (sur Madison) qui remonte tout en haut (quand j’habite tout en haut). Ou l’inverse quand j’habite downtown. Dans le bus, j’observe les gens. Récolte des détails, (« les divins détails » de Nabokov). J’écoute leurs conversations, regarde comment ils sont habillés, s’ils se tiennent raides ou étalés, ont les lèvres pincées ou dévorent un hot dog, parlent en agitant les mains ou gardent leurs sacs bien serrés sous leur bras, marmonnent ou hurlent parce qu’ils n’arrivent pas à ouvrir les portes du bus, « touch here to open door », dit pourtant la bande jaune.
Hier, j’ai pris le M1 et suis descendue downtown. Me suis assise sous les arbres toujours verts de Washington Square. Ai visité la caserne de pompiers qui a perdu tant d’hommes lors du 11-Septembre (leurs photos sont affichées sur tout un mur…). Ai retrouvé mon amie Charlie dans un restaurant japonais dé-li-cieux (mais très cher !), le Nami Nori, 33 Carmine Street. Nous avons déambulé dans Soho, tourné à droite vers le West Village (sorte de Saint-Germain-des-Prés), grignoté une gaufre géante, respiré des effluves de cannabis (impossible d’y échapper !), et vers 18 heures 30 j’ai filé à Sant Ambroeus, encore un restaurant dé-li-cieux (mais très cher !), 259 West 4th St., y ai retrouvé Dan, peintre dont j’aime les œuvres, la conversation et la vie. Dan est mon ami depuis longtemps. Je l’ai connu, fauché, le visage creux, la mine angoissée, ne vendant pas une seule toile, cherchant la galerie qui pourrait l’exposer. Le succès l’a arrondi, apaisé. Il a l’humour british, le sarcasme abondant, le dégoût facile et l’intelligence crépitante. Il peut paraître arrogant, mais il m’enchante. J’aime les gens difficiles, fermés comme des huîtres récalcitrantes qui ne veulent pas cracher la perle de leurs entrailles. J’arrive toujours à les ouvrir. Avec une remarque pointue, un sourire innocent.
Les New-Yorkais dînent plus tôt que nous. Vers 19 heures. Parfois même 17 heures 30. Ils ont changé leurs habitudes depuis la pandémie. Un dîner à 20 heures 30 est impensable.
Et puis je remonte vers le Guggenheim et les beaux quartiers, en taxi cette fois, rêvant au lendemain…
19 OCTOBRE :
A beautiful day ! Météo : soleil + nuages, mais pas de pluie. Ouf ! Sur la 5e Avenue, près de Central Park, on croise des troupeaux de chiens agglutinés en spaghettis qui partent se promener avec leur dog-sitter. Boy serait outré, lui qui trottine libre et fier la plupart du temps (sauf dans les rues de Paris, bien sûr).
Cap sur le West Village. On prend un bus Crosstown (ils traversent New York d’est en ouest, d’ouest en est), on saute dans le métro sur Broadway (ligne 1) et hop ! nous voilà tout en bas. Toujours cette odeur de cannabis qui fait tourner la tête. Est-ce pour cela que les gens sont si cool, si gentils ? Ils s’excusent, « Sorry, sorry ! », s’ils vous effleurent le coude, les voitures s’arrêtent devant les piétons et ne démarrent pas comme des Zébulons en faisant hurler leur klaxon et, dans les restaurants, les sourires sont au menu. »
Extraits
« 21 octobre :
Hier, il a plu. Il a plu sans répit. Le ciel, l’humeur, le désir, tout était gris. J’avais « pas envie ». C’était une journée à s’enfermer dans un musée, à choisir un tableau, puis un morceau de tableau, à le contempler jusqu’à en oublier le reste de l’œuvre, jusqu’à en saisir la beauté, la délicatesse, la singularité, la force de ce détail travaillé par le peintre. » p. 48
« Hier, je me suis promenée sur Broadway (West Side). Je me suis arrêtée chez Barnes & Noble, une grande librairie entre la 82° et la 83° Rue. Les librairies comme les cinémas disparaissent à New York. J’ai acheté Breakfast at Tiffany’s de Truman Capote. Vous vous souvenez du film ? Audrey Hepburn, ses lunettes noires, son long fume-cigarette ? En attendant que mes œufs deviennent coque, j’ouvre le livre et… ravissement. J’oublie tout. Les œufs coque seront des œufs. durs. » p. 56
« Je suis descendue, étourdie. Suis entrée au Chelsea Hotel où j’avais rendez-vous pour un brunch avec Chloé. Ah ! Le Chelsea Hotel (222 W 23th St) ! Une légende. Jack Kerouac y a écrit Sur la route, Leonard Cohen, Patti Smith, Tennessee Williams, Bukowski, Janis Joplin, Jimi Hendrix, Bob Dylan, Diego Rivera, Stanley Kubrick (et des dizaines d’autres) y ont vécu, y ont écrit des livres, des chansons, des films. Quand ils avaient de l’argent, is payaient, sinon pas grave, on verrait plus tard. C’était un hôtel miteux où les cafards se promenaient, mais il attirait tous les artistes fauchés et dégageait un charme envoûtant. En 2011, il a été racheté (il n’était pas rentable et pas du tout aux normes) et entièrement refait. Les travaux ont duré des années.
Je l’avais connu miteux, je l’ai retrouvé flamboyant. Mais pas arrogant. Les nouveaux propriétaires ont su garder ce je-ne-sais-quoi qui en avait fait un refuge. Bien sûr, le prix des chambres et des consommations a explosé (comme partout à New York il faut s’accrocher quand arrive l’addition !). Les anciens occupants (de plus en plus âgés) sont restés. Et vivent comme dans le bon vieux temps. Sans payer. Les nouveaux paient… le prix fort. » p. 68-69
« 21 juin :
… Et je m’en vais, ramassant des détails pour mon roman qui grossit telle une dodue pintade. L’oreille et l’œil à l’affût, je cueille des réflexions, des élans ou des chutes. « Chaque brin d’histoire, chaque bout de conversation, chaque incident est du matériel brut pour moi », disait Sylvia Plath, écrivaine et poétesse américaine, qui mourut à trente et un ans de trop de désespoir, après avoir écrit des pages éblouissantes qui ne la consolèrent jamais.
Récolte au hasard des rues, des métros, des rencontres, d’images jaillies d’un film, saisies sur le vif que je reporte sur mon carnet noir, mon cahier rouge ou sur les fiches au mur de mon bureau. Bientôt, je transporterai « mon mur de travail en Normandie. Il débordera sur un autre mur, tombera dans les pages du livre en chantier, se faufilera dans un dialogue, précipitera une séquence, en ouvrira une autre.
Écrire, c’est vivre un long suspense. Être tenu en haleine par sa propre imagination, ses propres personnages, assister à leur éclosion, leur prise d’indépendance, leur abandonner les rênes du récit et les suivre en scribe obéissant. » p. 187-189
À propos de l’autrice
Katherine Pancol : un des plus grands phénomènes d’édition de ces dernières années et un succès mondial, déjà̀ traduite dans 30 pays. Depuis leurs sorties, la saga des Crocodiles, ainsi que la trilogie Muchachas, et Trois Baisers, sont devenus des classiques. Son dernier roman La mariée portait des bottes jaunes est paru en 2023. (Source : Éditions Albin Michel)
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