Il est inutile de tenter de nous la faire à l'envers, à nous qui avons vécu la fin des années 1980 et le début des années 1990 en temps réel. Ces décennies marquantes nous rendent naturellement plus circonspects face à ce que nous lisons aujourd’hui, notamment en ce qui concerne la série consacrée à Spider-Man. Il faut bien le dire : nous avons été nourris par des artistes d’exception comme Todd McFarlane, puis Erik Larsen. C’est d’ailleurs de cette époque dont nous allons parler aujourd’hui, car cette intégrale nous replonge dans une ère fabuleuse que certains critiquent parfois un peu trop précipitamment. On rembobine : Peter Parker est marié à une Mary Jane absolument splendide. Bien que toujours confronté à des problèmes d’argent, il parvient régulièrement à renflouer son compte en banque grâce à quelques bons plans. Ainsi, nous le voyons évoluer aux côtés de Paladin et de la mercenaire Silver Sable, engagés dans une intrigue internationale mêlant complots politiques et scènes d’action spectaculaires. C’est également l’occasion de rencontrer Solo, un personnage intriguant, à mi-chemin entre le mercenaire et le terroriste, doté d’un dispositif de téléportation comparable à celui de Cable. Ce pouvoir lui permet d’apparaître et de disparaître à volonté. Si cela peut sembler anecdotique aujourd’hui, il faut savoir que Solo a connu son heure de gloire, allant jusqu’à bénéficier d’une mini-série. Et bien sûr, dès qu’il est question de complots et de politique, Captain America ne peut être absent. Sa présence entraîne naturellement celle de Crâne Rouge, son éternel adversaire. Quelle affiche ! Comme si tout cela ne suffisait pas, Spider-Man doit ensuite affronter les Sinister Six, le célèbre groupe de super-vilains mené par le Docteur Octopus, revenu sur le devant de la scène. Parallèlement, fidèle à la tradition des comics de cette époque, le super-héroïsme s’entremêle à des intrigues dignes de feuilletons, ce qui enrichit la vie quotidienne des personnages secondaires. C’est cet équilibre qui fait tout le charme de la série dans ces années-là. Par exemple, nous assistons à l'évolution de la relation sentimentale entre Felicia Hardy, alias la Chatte Noire, et Flash Thompson, l’ancien caïd du lycée devenu avec le temps un proche de Peter. Pourtant, les intentions de Felicia ne sont pas innocentes : son véritable but est de briser le cœur de Flash et de se venger de celui qui l'a abandonnée dans le même temps. Dans un autre registre, nous découvrons les mésaventures de Nathan, le compagnon âgé de Tante May, malheureusement cloué dans un fauteuil roulant. Ce dernier est victime d’une agression orchestrée par une bande de voyous, derrière laquelle se cache en réalité une histoire d’addiction aux paris. En fait, à chacun ses problèmes…
Cette intégrale propose aussi un crossover qui s'insère dans les célèbres Actes de Vengeance de 1989. Raison pour laquelle vous lirez aussi six épisodes un peu différents, issus de Spectacular Spider-Man et Web of Spider-Man, qui viennent compléter ceux de Amazing. Pour gagner un peu d'argent et assouvir sa passion pour les sciences, Peter Parker travaille également comme assistant du Professeur Lubisch, qui tente de capter une source d'énergie inconnue avec un appareillage loin d'être à la hauteur. Du coup, ce qui devait arriver arriva. Une explosion, et une décharge si puissante que notre monte en l'air préféré va découvrir, combat après combat, qu'il est désormais doté de nouveaux pouvoirs totalement inattendus. Le premier a en faire les frais est le pauvre Trapster (le Piégeur), qui avait pourtant mis la pile à Spidey peu de temps auparavant. Puis c'est au tour de Titania. Le tisseur lance désormais des rayons avec les doigts, sa toile assume formes et constructions selon sa pensée, un peu sur le modèle de ce que peut faire Green Lantern avec son anneau vert. Mieux encore, un affrontement avec Magneto lui révèle qu'il peut altérer et modifier la structure moléculaire des substances, transformant ainsi l'acier en verre, rien qu'en le souhaitant. Et ce n'est pas tout ! Spidey vole ! Spidey est capable d'envoyer Hulk en orbite autour du globe d'un bon montant du droit ! Mais que se passe t'il donc avec les pouvoirs de Spider-Man, et n'y a t'il pas de quoi avoir peur, au final, quand on devient aussi puissant, d'un instant à l'autre, au point d'en devenir quasi invulnérable ? Sans parler de la convoitise de certains vieux ennemis du Tisseur, qui au même moment se lance dans ce que Marvel appela donc à l'époque les Actes de Vengeance. En fait, les grands noms du mal made in Marvel s'échangent leurs ennemis naturels, pour mieux les surprendre et en venir à bout. Absolument pas grand chose à retirer au niveau introspection et psychologie dans cette saga (hormis le sens des responsabilités et la culpabilité récurrente de Peter), par contre, action à foison, et le plaisir jouissif de voir l'Araignée assumer un rôle et un costume qui le rapproche étonnamment de Superman, l'homme d'acier de Dc comics. Place à Captain Universe, un nouvel avatar pour Peter Parker ! Coté artistes, saluons le travail de Gerry Conway et David Michelinie, les démiurges derrière cette idée sympathique. Aux dessins, on retrouve forcément Todd McFarlane (Spidey Vs Hulk) et son épigone d'alors, Erik Larsen, pour une version légendaire et ultra dynamique du héros. Mais aussi les crayons anguleux et immédiatement identifiables de Sal Buscema, ou encore Alex Saviuk, le plus brouillon et oubliable de ces grands noms, qui était en charge du titre Web of Spider-Man, souvent le parent pauvre de la famille à la fin des années 1980. Un petit bijou de comic-book naïf, pour revivre des moments si particuliers et étranges dans la vie de Peter Parker. Désormais incorporé à la ligne Intégrale, qui n'en finit plus de s'étoffer et de rendre honneur à la grande Histoire Marvel.
Rejoignez la communauté sur Facebook :