J’ai Lu – 2023 – 157 pages
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« Avant je voulais que tout se passe bien, maintenant j’ai compris qu’on ne devait rien à personne. » L’autrice a tout plaqué, son travail d’avocate, son mari, sa vie de famille. Elle vit dans une chambre minuscule, elle s’est débarrassée de tous ses meubles, de quasiment toutes ses possessions. Elle a jeté ses livres, elle a coupé ses cheveux. Son ex lui interdit de voir son fils, qui selon lui la déteste et ne veut plus la voir. Alors en attendant d’avoir le droit de le revoir une fois de temps en temps sous surveillance, elle couche avec des femmes qu’elle n’aime pas, elle nage, elle écrit. Elle attend. Elle en crève – pourquoi devoir choisir entre sa liberté d’être et l’amour de son fils ? Love me tender est un texte sur l’amour, celui d’une mère pour son fils. Mais aussi sur son absence d’amour pour toutes ces femmes qui passent dans son lit. Elle qui ne peut plus aucune attache, qui rejette toute propriété. La vie de couple, la vie domestique, elle a donné. Être mère, être femme, être amante, et puis quoi? « Ça me fait crever d’aimer comme ça parfois. » La plume de Constance Debré écorche, son texte percute, elle ne mâche pas ses mots. C’est un roman qui retourne le cerveau et que j’ai dévoré ; j’ai trouvé ça si beau, si douloureux, si vrai.
« Ce jour-là, après l’avoir quitté, en marchant vers la gare pour prendre le train toute seule, j’ai pensé qu’on croise toujours le diable dans une vie, puisqu’il faut bien faire l’expérience du mal, comme il faut faire celles de l’amour, du désir, du chagrin, que le diable n’est pas un monstre tout rouge avec une fourche, qu’il est familier, le diable, le plus familier possible, un diable qui ne fait pas spécialement peur, un diable à ma hauteur, pas toujours plus fort que moi, un type paumé le diable, un pauvre hère, c’est pour Paul que je pleure. »