Dans les rues de Saint-Nazaire a lieu une marche blanche à la mémoire de Hugo, un adolescent dont le suicide à l'âge de quatorze ans a bouleversé la population. A la tête du cortége, Vincent et Juliette, ses parents, affrontent l'insupportable, l'incompréhensible, leur colère est immense : leur fils, harcelé au collège, s'est suicidé. Il s'était confié pourtant, ses parents ont fait de leur mieux pour l'aider, mais ce n'était pas suffisant. Avec pudeur et sensibilité, Philippe Besson se met dans la peau de ce père brisé et décrit le pire, comme s'il témoignait lui-même. Un théme d'actualité brillamment traité.
Au cours de cette journée particulière où la marche blanche rassemble plus de mille cinq cent personnes dans les rues de la ville, Vincent le père d'Hugo convoque ses souvenirs pour nous parler de son fils. " Les choses basculent à cause de presque rien" , des détails qu'Hugo, un garçon introverti, ne raconte pas ou peu. La réaction première du père est universelle, " il apprend la vie... ce n'est pas grave, ça passera, tout le monde y a droit... " , ce sont nos réactions, celles de nos parents avant nous, et puis à l'évidence les ados n'aiment pas que les parents se mêlent de leurs affaires et les parents n'ont pas envie de voir que leur enfant ne va pas bien. Mais les temps ont changé, tout va plus vite, beaucoup plus loin et prend des proportions ingérables: le harcélement survient dans la cour d'école, puis par SMS et sur les réseaux sociaux, pour qu'il y ait un maximum de spectateurs, comme dans une arène où les matadors mettent à mort un taureau.
" En temps de paix, les fils ensevelissent leurs pères. En tant de guerre, les pères ensevelissent leurs fils. " Hérodote, Histoires.
Vous parler de mon fils témoigne d'un combat, et ce combat est l'affaire de tous pour que ces drames ne se reproduisent plus. Les parents d'Hugo ont leurs failles mais ils ont réagi comme ils ont pu, ils ont alerté le collège, sans réaction de l'équipe éducative. A juste titre, l'auteur rappelle que certains établissements scolaires vont réagir avec fermeté et vont tenter de résoudre le problème par des mesures disciplinaires, d'autres seront beaucoup plus laxistes. Les choses avancent car on en parle de plus en plus: des cas (notamment celui dont s'est inspiré l'auteur) font juriprudences, mais ce sont des événements qui ne devraient jamais arriver. Rien n'est fait ou presque au niveau des réseaux sociaux où tout semble toujours permis notamment en raison des posts qui disparaissent rapidement et ne laissent aucune trace. Les parents d'Hugo sont allés expliquer la situation aux parents des harceleurs, qui ne veulent pas reconnaître la gravité des actes commis. Si Hugo a bénéficié d'une aide psychologique, celle-ci est survenue trop tard, le mal était fait, la perte de confiance et le dénigrement de soi ont eu raison de son équilibre. C'était une course contre la montre mais personne ne le savait.
Comment survivre à la mort d'un enfant? La vie après la catastrophe, le quotidien où faire un pas en avant est devenu une torture, la culpabilité partout, tout le temps, l'avenir s'il ne peut pas être effacé, sera mis entre parenthèse. Philippe Besson aborde ces thémes avec beaucoup de justesse et de sensibilité. Un livre à lire absolument pour réfléchir, comprendre et agir différemment. Merci Babelio et les Editions Julliard pour cet envoi dans le cadre d'une Masse Critique Privilège.