Petit Pays
D'après le roman éponyme de Gael FAYE (Grasset, 2016)
Scénario de Marzena SOWA
Dessin de Sylvain SAVOIA
Editions Dupuis / Aire Libre, mars 2024
128 pages
Thèmes : Rwanda/Burundi, Génocide, Famille, Enfance
Au Burundi, l'enfance de Gaby s'écoule paisiblement.
Sa petite sœur Anna, l'école, les copains, les mangues, et ses parents qui se disputent fréquemment. Yvonne au caractère impétueux, née au Rwanda, exilée bébé, qui aimerait rentrer chez elle. Michel, un Français, un Blanc, souvent en déplacement, qui se sent chez lui au Burundi, où il s'est et leur a construit une belle vie, avec maison, jardin et domestiques.
Lentement, insidieusement, l'atmosphère change, les tensions se font plus nombreuses, plus houleuses. Des concepts ou mots nouveaux apparaissent, aux informations, à l'école, avec les copains, à la maison.
Je connais l'envers du décor, ici.
Quand tu vois la douceur des collines, je sais la misère des ceux qui les peuplent.
Quand tu t'émerveilles de la beauté des lacs, je respire déjà le méthane qui dort sous les eaux.
Gaby continue à vivre son enfance, malgré les changements, malgré les dangers
Jusqu'à ce que la violence le rattrape, que la Tante Eusébie, restée au Rwanda, donne des nouvelles alarmantes, jusqu'à ce que l'once Pacifique ait disparu, jusqu'à ce que sa mère soit violemment partie une nuit.
J'étais un lâche, doublé d'un égoïste. J'érigeais mon bonheur en forteresse et ma naïveté en chapelle. Je voulais que la vie me laisse intact alors que maman, au péril de la sienne, était allée chercher ses proches aux portes de l'enfer.
J'avais fortement été impactée et remuée par ma lecture du roman de Gaël Faye. Il me restait cette distance qu'il avait souhaitée pour écrire sur le génocide rwandais, celle d'un enfant, victime collatérale, mais aussi directe, avec ses amis qui reproduisent plus ou moins les belligérances adultes. Souvenirs prégnants : les mangues dégustées et les livres de Mme Economopoulos que Gaby empruntait en nombre.
Je n'ai pas vu l'adaptation cinématographique mais j'ai tout de suite voulu lire l'adaptation BD, car j'aime beaucoup le dessin de Sylvain Savoia.
Traits fermes, couleurs profondes, expressions corporelles et gestuelles marquées, décors travaillés et un glissement chromatique qui perd de sa flamboyance pour suivre le récit, les peurs, l'impuissance, la violence...
Et toujours ce bleu du ciel, à la fois narguant, à la fois rassurant.