L'année de la pensée magique

L'année de la pensée magiqueL'année de la pensée magique - Joan Didion
Publié chez Grasset en 2007
Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pierre Demarty

Le 30 décembre 2003, à New-York, John Gregory Dune, le mari de Joan Didion, s'effondre au début du dîner, victime d'une crise cardiaque. Les secours ne réussiront pas à le ranimer.
Ce livre, que Joan Didion commence à écrire neuf mois après cet évènement, va couvrir l'année qui suit le décès de John. Joan y raconte sa stupeur après ce drame, la difficulté du deuil auquel elle ne peut se laisser aller dans un premier temps.
En effet, leur fille Quintana avait été victime d'une pneumonie peu de temps avant le décès de John et elle était plongée dans le coma depuis cinq jours, en ce 30 décembre. Joan Didion doit donc assumer l'inquiétude où la plonge la santé de sa fille et tenter de surmonter la perte de son mari. Ce qu'elle doit faire, les endroits où elle se rend, tout la ramène à ce qu'elle a vécu avec John, pendant les quarante années de leur vie conjugale et de leur travail en commun.


Pendant longtemps, elle ne peut accepter que son mari soit "parti" pour toujours. Elle en prend conscience lorsqu'elle réalise qu'elle arrive à se débarrasser de ses chemises mais qu'elle ne peut donner ses chaussures. Que mettrait-il s'il revenait ?


Elle décortique les moments qui ont précédé la mort afin de trouver ce qu'elle aurait pu faire afin de l'éviter. C'est seulement plusieurs mois après le décès, lorsqu'elle prend connaissance du rapport d'autopsie et qu'elle se documente afin de comprendre les termes médicaux employés, qu'elle réalise que la mort a été immédiate. De plus, elle était prévisible car John avait été opéré du coeur plusieurs années auparavant. Lui-même se considérait en sursis, mais elle ne l'avait jamais perçu. A ce moment-là, seulement, elle peut échapper à la culpabilité qu'elle ressentait de n'avoir rien pu faire.


La mort de John lui fait prendre conscience de sa propre condition de mortelle. Elle réalise qu'elle a vieilli dans le regard des autres alors que dans celui de John, elle se voyait toujours comme une jeune femme.

J'ai trouvé ce livre magnifique. L'auteur ne s'apitoie jamais, elle raconte ce qu'elle ressent, sobrement et sans pathos. Elle ne s'abandonne pas au désespoir mais trouve dans le souvenir de la vie passée la force de continuer. Elle évoque sa douleur, sans complaisance mais ne s'y enferme pas. Il ne s'agit pas du récit d'une femme repliée sur elle-même. Au contraire, à travers les moments passés, on l'accompagne dans une vie riche et variée, celle d'un couple de créateurs, elle auteur, journaliste, et lui scénariste de film. On les suit sur les tournages, on les accompagne dans leurs voyages et on ressent leur complicité.
Ce fut un très beau moment de lecture et de réflexion, car un tel sujet ne peut laisser indifférent. Il rappelle des souvenirs et fait surgir des craintes.
Ce livre a été consacré "livre de l'année 2006" aux Etats-Unis et il a été couronné du National Book Award. En France, il a reçu le prix Médicis de l'essai en 2007.
Le premier chapitre sur le site de Grasset.
Les articles de Lire et Le Temps.
Les avis de Clochette, Cathe, Sophie, Clarabel, Sentinelle, Kathel, Cathulu et Joëlle.