Les amants de la Toussaint de Juan Gabriel Vásquez

Par Noann

De JGV, Mathias Enard a dit « l’un des plus grands auteurs d’aujourd’hui, tous territoires confondus. » Quand un écrivain parle ainsi d’un confrère, c’est chelou. Et ma foi…

Il s’agit donc d’un recueil de nouvelles.

La première parle de mort et de chasse. (je résume fortement)

La seconde parle d’amour et de chasse.

La troisième parle de chasse et de chasse.

La quatrième parle d’une dame qui a commis un meurtre.

La cinquième… Je me suis endormi.

La sixième… Je ne suis point maso.

Je n’ai rien trouvé de folichon dans ce bouquin, sauf la jolie couverture en papier glacé. Il faut dire que je ne suis pas le bon candidat… Voici donc un auteur colombien, qui vit à Barcelone, écrit dans sa langue natale, l’espagnol, est traduit en français par une Parisienne. Et ça se passe à Aywaille, un petit bled de Belgique. Précisément là où j’habite. Dès le départ j’étais sceptique, tout en laissant une chance. De ce recueil, l’émission de télé (belge) « Mille-feuilles » dit ceci : « Ce roman est l’un des plus beau livre romanesque écrit sur les Ardennes belges. » ( copie conforme – remarquons l’orthographe!). Je ne partage point cet avis. Cette région, que je connais fort bien, je ne l’aurais pas reconnue si elle n’était nommée. D’ailleurs remplacez Aywaille par Vladivostok et bière par vodka, et vous avez un roman russe.

Mais mon reproche principal ira au style, et quelques exemples valent mieux que des palabres:

Des métaphores subtiles :

« Au bout de quelques secondes, le téléphone a cessé, un peu comme une truite agonisant sur la berge »

« Il était douloureux de parler de l’amour comme d’un chien échappé de la maison en pleine nuit pendant qu’elle était seule »

De précieux détails anatomiques :

« J’ai vu Michelle devant moi, un mouchoir en papier serré dans sa main droite, à hauteur du triangle du pubis. »

Des personnages aux facultés auditives étonnantes :

« J’entendais le murmure de l’eau ruisselant sur Michelle »

« J’ai fermé les yeux pour ne pas entendre la voix qui, peut-être, voulait me parler »

Des dialogues savoureux :

« - je voulais essayer avec toi. Hier j’ai passé la soirée à essayer toute seule » (précision: cela n’a rien d’érotique, enfin je ne crois pas…)

« - Ne dis pas ça. Nos postes se valent. Ce sont des planques pour vieux chasseurs parce que nous sommes de vieux chasseurs. »

Bref, les bizarreries ne manquent pas. Tant au point de vue du style que du contenu, tout semble un peu composé, avec peu de conviction et pas mal d’aberrations. Au fait, en Belgique on dit septante et pas soixante-dix. Mais si ce n’était que ça… A moins d’être méchamment sponsorisé par la maison d’édition ou l’agence de presse, on aura du mal à se laisser emporter par ce bouquin où tout, ou presque, est superficiel et sans ampleur. Même le milieu de la chasse est décrit de façon sommaire et peu convaincante. Les chasseurs de JVG ne ressemblent en rien à ces abrutis qui déambulent avec leurs Range Rover et Cayennes, boivent comme des trous et sont une vraie menace pour la tranquillité publique.

Allez, encore un extrait, c’est bon pour le moral :

« Personne ne comprenait pourquoi on ne la découvrait jamais au même endroit dans l’immense maison ni pour quelle raison elle passait ses étés à vagabonder sur les trois hectares de terrain, comme un chat qui urine pour marquer son territoire »

Les amants de la Toussaint de Juan Gabriel Vásquez. Éditions du Seuil.

Date de parution : 14/04/2011