Les Chroniques de Spiderwick. L'Intégrale de Tony DITERLIZZI et Holly BLACK

Par Melisende



Les Chroniques de Spiderwick.
L'Intégrale

de Tony DITERLIZZI
et
Holly BLACK
(Challenge YA/Jeunesse - 15/20)
Pocket Jeunesse,
2008, p.483
Première Publication : 2003/2oo4



Tony DiTerlizzi est un auteur et illustrateur américain de fantasy, né en Floride le 6 septembre 1969. Il a co-écrit Les Chroniques de Spiderwick avec Holly Black, et a supervisé l'adaptation cinématographique de la série en 2008 en tant que producteur exécutif.
Holly Black (née le 10 novembre 1971 à West Long Branch dans le New Jersey) est une romancière américaine de littérature fantastique pour enfants. Elle a grandi dans une maison victorienne (un manoir délabré) où sa mère lui racontait des histoires de fantômes et de fées.


adame Grace, célibataire depuis peu et mère de trois enfants – Mallory, une jeune fille de 13 ans, et Jared et Simon, des jumeaux de 9 ans – emménage avec sa famille dans une vieille maison, qui appartenait à une grand-tante internée à l'asile... Mallory et ses deux frères sont peu enthousiastes à l'idée de vivre dans cette bicoque qui menace de s'écrouler à tout moment. Au premier abord, l'endroit a d'ailleurs l'air plutôt étrange : la demeure est perdue au fond des bois et recèle des pièces cachées... On y entend même des bruits bizarres... Il semblerait qu'elle soit hantée ! Les enfants ne tardent pas à en avoir la preuve : un lutin, furieux d'avoir été dérangé chez lui s'amuse à jouer de vilains tours à Mallory et à Simon... Comment se réconcilier avec lui ? Et puis, qu'est-ce que c'est que ce grimoire étrange, plein d'histoires de fées, que Jared a déniché dans un coffre secret et qui aurait été écrit par un lointain ancêtre dénommé Arthur Spiderwick ?

’est avec cette grosse intégrale que j’ai débuté le Read-A-Thon il y a trois semaines (oui, un jour j’arriverais à bout des chroniques des livres lus ce jour-là !). Pour être tout à fait franche, j’y allais un peu à reculons, sceptique, songeant que ces aventures pour enfants risquaient de ressembler à celles du Monde de Narnia de C.S. Lewis, qui m’avaient déçue il y a quelques temps (la lecture avait d’ailleurs été très difficile, souvenez-vous). Et bien, quelle belle surprise ai-je eu en découvrant la première chronique… et les quatre suivantes ! J’ai dévoré les presque 500 pages que compte l’ouvrage et je fais de cette lecture, sans aucune hésitation, un beau coup de cœur ! Je serais maintenant curieuse de découvrir l’adaptation réalisée par Mark Waters en 2008, avec notamment Freddie Highmore dans le rôle des deux jumeaux…
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Ces cinq chroniques (« Le Livre magique », « La lunette de pierre », « Le Secret de Lucinda », « L’Arbre de fer » et « La Colère de Mulgarath ») constituent le premier cycle des aventures se déroulant dans le monde « magique » de Tony DiTerlizzi et Holly Black. Chacune d’entre elles équivaut à une petite aventure intégrée dans une intrigue plus générale et met en avant de nouvelles créatures et de nouveaux éléments. Le pitch général est le suivant : les trois enfants Grace découvrent un manuscrit contenant des informations secrètes et Mulgarath, le méchant ogre, veut le récupérer pour pouvoir l’utiliser en sa faveur… Avant d’en arriver à cette conclusion, les enfants font la découverte du monde « magique » jusque là invisible à leurs yeux, en commençant par faire la connaissance du farfadet de leur nouvelle maison (en fait la maison de leur grande tante Lucinda qui est internée à l’asile). Chafouin, de son petit nom, est un farfadet qu’il vaut mieux ne pas contrarier… les héros s’en rendent vite compte. Les ennemis ne tardent pas à passer à l’attaque et enlèvent successivement tous les membres de la famille. Jared doit, à chaque fois, faire preuve de courage pour affronter des choses qu’il n’aurait jamais pu imaginer… jusqu’au combat final avec le grand et laid Mulgarath.
Des enfants propulsés dans un monde « parallèle » (en fait, ils ne bougent pas de chez eux, ils apprennent juste à ouvrir les yeux et à observer ce qui les entoure…) parce qu’ils tombent par hasard sur un grimoire d’une importance capitale, doivent combattre des créatures « magiques » et affronter un grand méchant pour que le monde ne soit pas chamboulé. Tout ça sans rien dire à leur mère qui, évidemment, ne comprend rien à ce qui se passe (ah ces adultes bouchés…). Finalement, un scénario plutôt « classique » dans le monde de l’Imaginaire jeunesse, mais les auteurs insèrent des éléments qui font toute la différence…
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Pour commencer, je me suis rapidement prise d’affection pour les trois enfants Grace, notamment Jared (le personnage « principal », on peut dire). Un peu contrarié par le divorce de ses parents et le déménagement dans cette vieille maison, il est un peu… euh… indiscipliné. Alors évidemment, malgré son honnêteté, dès qu’il y a une embrouille, sa mère (et également son jumeau et sa grande sœur, du moins au début) l’accuse de tous les maux. Voilà un petit garçon de 9 ans bousculé par la vie qui, malgré tout, est très courageux, débrouillard et loyal envers les membres de sa famille.
Son jumeau, Simon, est beaucoup plus en retrait. Je retiens seulement qu’il est passionnée par les animaux et qu’il ne passe pas une semaine sans en adopter un nouveau (des souris au griffon, tous reçoivent ses soins !). C’est le plus discret - et sans doute le plus « sage » - des trois enfants Grace.
L’aînée et la seule fille de la fratrie, Mallory, 13 ans, est un peu agaçante. On sent bien qu’elle est à la frontière entre les rêves de l’enfance et la raison de l’âge adulte. Malgré tout, elle tient un rôle important et, escrimeuse hors pair, n’est pas de trop dans les affrontements un peu trop rapprochés…
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Si les trois héros ont su me convaincre, la plus belle surprise de cette lecture a été la découverte de l’univers mis en place ! Le domaine de Spiderwick recèle de nombreuses créatures merveilleuses que Tony DiTerlizzi et Holly Black nous présentent progressivement et avec force détails : Chafouin le farfadet (petite créature vivant dans la maison, qu’il vaut mieux avoir pour ami au risque de voir les lieux ravagés !), les gobelins (à mi-chemin entre le crapaud et le gremlins), le troll des marais (bestiole énorme, répugnante et légèrement gloutonne…), Tête-de-Lard le hobgobelin (un aspect peu ragoutant mais plutôt du côté des gentils… enfin la plupart du temps ! Sa salive a, par ailleurs, des propriétés… surprenantes !), un griffon (surnommé Byron par Simon son nouveau maître), le Kobold (créature qui s’exprime par énigmes, mi-toqué mi-effrayant ; à mon avis un hommage direct au chat de Cheshire d’Alice au pays des merveilles…), des elfes (beaux, majestueux, vivant dans la forêt… et auxquels il ne vaut mieux pas se frotter !), des nains (qui vivent dans une carrière et sont experts en métallurgie), le Tapoteur (petite créature qui sait parler aux pierres), des dragons (qui se nourrissent d’un produit spécial pour grandir) et évidemment Mulgarath l’ogre (énorme, laid et vantard !)…
Je pense que cette énumération pourra facilement vous convaincre du talent des deux auteurs qui ne se sont pas contentés de poser des créatures magiques dans le décor mais qui leur offrent toute une histoire, des coutumes et un rôle dans l’intrigue… La plupart de celles-ci sont connues des amateurs de folklore et de contes ; on pourrait craindre une énième redite ou au contraire une dénaturation… mais pas du tout ! Tony DiTerlizzi et Holly Black utilisent brillamment des éléments admis par le plus grand nombre (la grande beauté/froideur des elfes ou les dons métallurgiques des nains) et y ajoutent de nouvelles informations de leur cru. C’est bien pensé, complet… c’est brillant !
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Côté style (je me base une énième fois sur une traduction) c’est particulièrement fluide et agréable à parcourir : je l’ai dévoré en très peu de temps, les pages s’avalent à un rythme fou ! Ce n’est pas pour autant simpliste ou niais (on peut parfois douter lorsqu’on se penche sur un texte destiné principalement à un public jeune), c’est juste parfait. Contrairement à Lewis, DiTerlizzi et Black proposent un texte rythmé dans lequel je n’ai eu aucun mal à entrer. Que du bonheur !
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Enfin, impossible de parler de ce cycle sans vous faire part de ma profonde admiration pour le coup de crayon de Tony Diterlizzi. Ce dessinateur a un talent fou et les illustrations très nombreuses (quasiment à chaque page) sont là pour le prouver. Qu’il s’agisse de petits médaillons dans un coin ou de dessins en pleine page, ces « gravures » (en noir et blanc) m’ont vraiment ravie. Si vous avez les moyens, je vous conseille fortement de vous procurer les cinq chroniques éditées en cinq mini-tomes séparés. Le format et la qualité des couvertures font de ces livres des objets aussi beaux dans la forme qu’ils sont bons dans le fond.
Si je n’envisage absolument pas de lire Le Monde de Narnia à mes futurs enfants, il me tarde d’en avoir pour leur faire découvrir Les Chroniques de Spiderwick ! D’ici là, je compte bien relire cette intégrale et jeter un œil sur le cycle suivant…


Les Petits [ + ] : Un univers développé, travaillé, passionnant (j’ai adoré découvrir de nouvelles créatures et les informations les concernant dans chaque tome !) ! Des héros attachants et intéressants, notamment le principal, le jeune Jared. Une lecture plus qu’agréable (aucun mal à s’imaginer les scènes et à tourner les pages, ça glisse tout seul !). Les illustrations sont très nombreuses et absolument MAGNIFIQUES !
Les Petits [ - ] : Les cinq chroniques ne sont pas de qualité égale, notamment la troisième (« Le Secret de Lucinda ») qui est celle qui m’a le moins marquée ; mais c’est un mini-point négatif.

Challenge YA/Jeunesse : 15/20