Double meurtre à Rouen de Patrick MOREL
Ravet-Anceau (Polars en Nord),
2012, p. 196
Première Publication : 2012
Pour l'acheter : Double meurtre à Rouen
Après avoir voyagé ici et là, Patrick Morel s'est adonné à l'écriture par plaisir, en commençant par la poésie. De nombreuses nouvelles ont suivi parues dans les différentes revues régionales. Plusieurs de ces textes ont été récompensés aux concours de nouvelles de Saint-Pol-sur-Ternoise, de Mably ou encore du CROUS Haute-Normandie. Une autre a été adaptée sur les ondes de la RTBF (Radio télévision belge de la communauté française). Double meurtre à Rouen est son premier roman policier, un genre qu'il a toujours pratiqué en tant que lecteur passionné.
ucien Povert, un vieux policier au caractère bien trempé, se retrouve en plein Pays de Caux : le cadavre d’un jeune romancier à succès a été retrouvé près d’un hangar isolé au milieu de champs. Tandis qu’il se rend sur les lieux du crime, on découvre, à l’autre bout du département, le corps d’une prostituée installée à Rouen. Etranglée. C’est le début de deux enquêtes minutieuses. Et délicates. '
’est Alice, une amie (et collègue) qui m’a prêté ce livre. Double meurtre à Rouen est le livre de son oncle - Patrick Morel - et elle souhaitait que je le lise pour en donner un avis sincère et détaillé.
Je lis de plus en plus de polars (pour une fois que je tiens une de mes résolutions) notamment des français, et il faut croire que j’y prends goût ! Et ce qui est amusant, c’est que le dernier en date - Nostalgie, quand tu nous tues de Rodolphe Fontaine - se déroulait également à Rouen ! La ville est si glauque et si mal fréquentée que ça ?
La quatrième de couverture annonce deux meurtres dans Rouen et ses alentours (celui d’une vieille prostituée et celui d’un jeune écrivain venant de sortir un best-seller). Les policiers et les gendarmes du coin sont en compétition pour résoudre ces deux affaires mais on suit uniquement l’équipe de la police, divisée en deux pour l’occasion.
Ce qui m’a surprise voire désappointée, c’est que j’ai attendu pendant toute ma lecture ou presque, que les affaires soient réunies ou aient au moins un rapport l’une avec l’autre. Mais en fait non, elles n’ont absolument rien à voir. Je cherchais, réfléchissais, tournais ça dans tous les sens pour découvrir quel pouvait être le point commun entre les deux et, s’il s’agissait du même meurtrier, ce qui pouvait le relier aux deux victimes… Je n’ai pas été déçue mais véritablement surprise de comprendre, sur la fin (oui, je suis un peu longue à la détente !) qu’il s’agissait de deux enquêtes différentes, sans aucun lien. Je vous préviens, au cas où !
Deux enquêtes pour le prix d’une, donc ! J’ai largement préféré le cas de l’écrivain et j’ai bien aimé le tour que prenait l’enquête et sa résolution dans les dernières pages. L’affaire de la prostituée m’a moins passionnée et m’a paru un peu plus « tarabiscotée », un peu moins « abordable » (les affaires d’argent, c’est toujours compliqué), mais l’ensemble reste sympathique à suivre.
En revanche, que ce soit pour l’une ou l’autre, j’aurais un peu le même reproche à formuler : le rythme est un peu lent, notamment au début. Je pense qu’il est bon, surtout lorsqu’il s’agit d’un polar, de lancer l’intrigue et la réflexion assez rapidement pour que le lecteur soit vite happé, vite dans le feu de l’action. Comme un diesel, c’est un peu lent à démarrer mais ça s’améliore par la suite !
Deux victimes, deux affaires, deux équipes d’enquêteurs, deux groupes de témoins et suspects… ce qui fait beaucoup de monde à assimiler ! Je m’y perdais un peu au début (je peinais à faire la différence entre les policiers) mais c’est juste le temps d’adaptation, c’est beaucoup plus clair par la suite.
Finalement, je reconnais à Double meurtre à Rouen, beaucoup de personnages mais tout autant (ou presque) de personnalités travaillées et « complexes » ; c’est un des points forts du titre.
On s’attache à certains (Kamel Dridi), on en déteste d’autres (Céline Cauchy), on est intrigué par un ou deux autres (Lucien Povert en tête)… tous ces personnages sont assez marquants, loin d’être fades. C’est agréable de les suivre pendant la résolution des enquêtes car, finalement, plus qu’un roman policier c’est surtout un texte qui s’attarde sur ses héros…
Patrick Morel a choisi d’alterner les points de vue à chaque nouveau chapitre. On passe donc d’une équipe/enquête à l’autre dès qu’on change de chapitre. Cela dit, ceux-ci sont très courts (quelques pages à peine à chaque fois), on ne part donc jamais bien loin de l’affaire qu’on a laissée deux pages avant. Ce choix offre un rythme assez soutenu qui permet au lecteur d’avancer rapidement dans sa lecture. En revanche, il accentue également la confusion : les chapitres sont tellement imbriqués qu’on peut croire que les enquêtes sont liées et qu’elles vont forcément se rejoindre à un moment ou à un autre.
Dans l’ensemble, c’est agréable à lire. On décèle un certain style, c’est plutôt recherché et travaillé. De ce fait, il vaut mieux être un minimum concentré pour ne pas perdre le fil d’un dialogue, par exemple.
Les deux enquêtes ne sont pas extraordinairement originales mais sont assez bien menées (surtout celle concernant l’écrivain) par contre, attention, elles n’ont aucun rapport l’une avec l’autre ! Le suspense et le rythme mettent un peu de temps à se mettre en place mais la suite est plus « mouvementée ». Les personnalités sont marquées et marquantes et offrent à ce polar un aspect « psychologique » agréable.