Gérer un blog est souvent un plaisir. Les échanges sont souvent sympathiques, on rencontre des passionnés. De fil en aiguille, de véritables amitiés se créent, même si elles restent trop souvent virtuelles.
Cependant les revers ne sont pas rares. Les commentaires volent. Les insultes parfois, aussi. Des lecteurs qui ont adoré un livre que nous avons démonté. Ou l’inverse. Des gens qui se défoulent sur leur clavier. Des supercheries aussi. Des intervenants qui empruntent des noms réels pour les ridiculiser. Tout ceci est le contrepoint désagréable de l’Internet.
Cependant, les relations avec le milieu professionnel ne sont pas toujours des plus agréables elles non plus.
Tout le monde s’en est rendu compte : les blogs de lecture poussent comme des champignons en automne. Il y a deux ans, un blogueur dont le nom m’échappe en avait répertorié 800. Il doit bien y avoir plus de mille à présent. De quoi se perdre. Le sérieux et la qualité sont aussi très variables. Si l’on compte de véritables orfèvres, qui rédigent avec talent une chronique par jour, ou presque, d’autres sont moins assidus et publient au rythme de leurs lecture de vacances. Tout cela donne une véritable diversité, et comme dirait Nicolas Hulot, la (bio)diversité est essentielle.
Mais pour celui qui ne connait par cette sphère, l’ensemble ressemble à une jungle épaisse. Certains professionnels, comme Gilles Paris, ont patiemment débroussaillé le terrain, et établi des relations avec ce monde un peu complexe. Lisez à ce sujet son article au sujet des blogs ici. Mais c’est une exception. Le monde de l’édition tend à rester hermétique à la blogosphère littéraire… Frédérique Deghelt évoquait quelques tensions ici … Je cite :
« Au final, certains éditeurs envoient, d’autres pas. Et, de ce que j’en sais, certains blogueurs ne se vantent pas forcément de recevoir leurs livres, trop jaloux à juste titre d’être élus et de se battre contre les périodes de rentrées. Mais un éditeur m’a quand même glissé dernièrement, en guise de confidence: “On a arrêté, ils sont ingérables et ne parlent pas des livres quand on le voudrait !”. »
De manière générale, le milieu de l’édition semble regarder le phénomène de l’Internet avec un œil parfois amusé, mais parfois hostile…
…
Une petite anecdote… Nous suivons depuis des années un auteur belge qui s’appelle Francis Dannemark. À ce titre, nous lui avons consacré une série d’articles. C’est d’ailleurs l’auteur le plus cité sur livrogne.com. Je n’ai pas manqué de communiquer à l’auteur certains billets (positifs)… Il m’a gentiment remercié, mais a aussi versé mon adresse dans sa mailing list. Ceci est contraire aux recommandations du CNIL en France, et carrément illégal en Belgique, selon la loi du 8/12/1992 sur la protection de la vie privée. En outre, c’est une mauvaise pratique. Les gens, importunés par des mails non désirés, cliquent sur « spam ». Et quand une certaine proportion l’a fait, toutes les messageries envoient les messages ultérieurs dans un dossier « Spam », « indésirable » ou « Junk ».
Des années plus tard, je reçois un mail dudit auteur, pour me présenter son prochain livre. Et là je me dis tiens, peut-être pourrait-il me l’envoyer gratuitement, en service de presse. Réaction quasi immédiate et assez froide :
« Les demandes de SP doivent être adressées à evilleneuve@robert-laffont.fr pour la France, à auteurs@skynet.be pour la Belgique… »
J’envoie donc un gentil mail un peu laconique, avec quelques mots et l’adresse du site, pensant que cela suffirait pour que l’agence se fasse une idée, et me réponde, par oui ou par non. Je me doutais de n’avoir aucune réponse et de passer pour un importun… Mais bon, qui n’essaie rien… Je sais pas expérience que les éditeurs répondent une fois sur quatre ou cinq.
En en effet, je ne reçois aucune réponse. C’est leur droit le plus strict, cela dit.
Je fais part de cette absence de réponse à l’auteur. Voici sa réaction :
« Bonjour,
Vous n’imaginez peut-être pas le nombre de gens qui demandent des SP aujourd’hui.
Les éditeurs sont en droit, me semble-t-il, d’attendre que les demandes soient justifiées.
Si vous oubliez de vous présenter, pourquoi vous étonnez-vous de n’avoir pas de réponse ?
Par ailleurs, je m’étonne un peu : comment quelqu’un qui se présente comme un professionnel peut-il ignorer que Robert Laffont (qui publie mon roman, c’est mentionné clairement) est un éditeur français ?
Bien à vous.
FDK »
Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi je traduis par « arrêtez de nous faire ch… »
Je lui ai répondu que, effectivement, je n’en avais pas dit très long sur mes activités, mais je pensais que donner l’adresse du site suffisait… Je ne m’étendrais pas sur la suite de mails, où l’auteur s’est montré… Pas vraiment sympa. Eh oui voyez-vous, tous les Belges ne sont pas de la famille Poelvoorde, Geluck, ou Manneken-Pis. Il y en a de la famille royale…
Alors, Monsieur Dannemark, détendez-vous… Si je ne vous ai pas envoyé d’argumentaire détaillé, c’est aussi parce que je doutais de recevoir une réponse favorable. Et puis, un mail, c’est par définition concis. Moi aussi je reçois des mails et j’en envoie par dizaines. C’est le lot de l’homo informaticus, espèce génétiquement modifiée du XXIième siècle.
Il existe de nombreuses façons de se tirer d’affaire en restant poli. On peut éluder en quelques mots. On peut avoir un texte tout près, dont on fait un copier-coller, simplement pour expliquer qu’on n’a pas vraiment le temps de répondre à tous ni de parcourir ce vaste champ (de mines)….
Mais avec des réponses comme celles-là, l’homo informaticus s’en retourne, frustré.
Ce n’est pas comme ça que j’envisage les relations humaines. Tout devrait être plus simple à notre époque, avec ces moyens de communiquer si efficaces. Mais bon, il faut dire que plus l’ordinateur devient malin, moins l’homme doit l’être…
Le monde de l’édition peut se sentir importuné par la déferlante internet. On le comprend. Pour des raisons valables certes… Ou pour de moins bonnes ?
Que ces blogueurs sont mesquins, ils disent la vérité, on n’a aucun contrôle sur eux. Ils massacrent des talents et encensent des trublions… Et voilà qu’ils se mettent à nous envoyer des mails, les abrutis.
J’imagine que c’est ce que nombre d’entre eux pensent… (et ma foi…) Mais diable, il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Compte tenu de leurs moyens, ils pourraient se pencher sur la question, et répondre quand on leur parle. On m’a appris ça à trois ans. Il faut se taire tout le temps, mais quand on te parle il faut répondre.
Il est vrai que tout ceci ne fait pas sérieux. Quel éditeur se risquerait à envoyer des bouquins à un site nommé Livrogne, qui pourrait le classer dans sa catégorie ‘comestible’ . Allons messieurs les éditeurs, détendez-vous. Le monde de demain est celui des loisirs. Le second degré devrait vous être coutumier, vous qui publiez des romans, de la fiction… Pfff que vous êtes stressés. Vous devriez boire plus et fumer moins…
Allez, je vous offre un pot