Le livre de poche (1993)
Traduit de l'anglais par Pascale Michon
Ce roman publié en 1925 se déroule au cours d’une journée du mois de juin 1919, à Londres. Clarissa Dalloway, femme de Richard Dalloway, membre du parlement, prépare la réception qui a lieu chez elle, ce soir-là. Elle décide d’aller elle-même choisir ses fleurs et se dirige vers son fleuriste. Au cours de ce trajet, ses pensées la promènent sans arrêt entre le présent et les soucis que lui cause sa fille Elizabeth et le souvenir d’une journée de sa jeunesse, passée à Bourton, dans la maison de son père. En ce temps-là, Peter Walsh voulait l’épouser mais, bien qu’amoureuse de lui, elle lui préféra Richard Dalloway. C’est à Bourton, également, qu’elle échangea un baiser avec Sally Seton, une jeune fille excentrique et pleine de charme. De retour chez elle, Clarissa reçoit la visite impromptue de Peter Walsh, revenu à Londres après de nombreuses années passées en Inde. Ce sont alors les pensées et les réflexions de Peter qui s’expriment, nous donnant un autre éclairage sur leurs anciennes relations et sur sa propre vie.
En parallèle, c’est aussi la journée d’un homme malade, Septimus Warren Smith, qui nous est racontée. Septimus a été blessé à la guerre et a été traumatisé par la mort de son meilleur ami. Lors de sa convalescence à Milan, il a rencontré une jeune italienne, Lucrezia, et l’a épousée. Ils se sont établis à Londres, mais les troubles psychiques de Septimus se sont aggravés, il souffre de schizophrénie. Ce jour de juin, ils se promènent tous deux dans les rues de Londres. Lucrezia, désemparée par la maladie de son époux, cherche de l’aide auprès des médecins. Septimus, lui, oscille entre hallucinations et idées noires.
C’est un roman assez court mais très riche, d’une construction originale. Sans arrêt, le récit nous promène dans le temps, porté par les monologues intérieurs des différents personnages lorsqu’ils évoquent tour à tour leurs souvenirs, leurs impressions passées et leur perception de la réalité. Le roman aborde de nombreux thèmes comme la fuite du temps, l’amour, les regrets sur les choix passés, l’homosexualité, la difficulté de vivre, l’incommunicabilité, la solitude, la condition féminine. Rien n’est raconté, tout est suggéré, au travers des sensations des personnages. Quelquefois, j’ai eu l’impression que l’auteur utilisait des procédés cinématographiques : ainsi lorsque Peter Walsh marche dans Londres et qu’il croise Septimus et sa femme, c’est lui qui décrit le couple, avant de les atteindre. Dès qu’il les a dépassés, ce sont les pensées du couple qui s’expriment et le récit accompagne alors leur progression dans la ville. Une écriture très moderne, finalement.
C’est un livre qui peut sembler difficile au premier abord, parce qu’il diffuse beaucoup de mélancolie, du côté de Clarissa et aussi de Peter, et également des impressions terribles, lorsqu’il s’agit de l’univers effroyable dans lequel se débat Septimus. Mais comme souvent avec les chefs d’œuvre, il faut s’accrocher et la récompense est au bout du chemin, la sensation d’avoir côtoyé quelque chose de sublime, l’envie d’y revenir plus tard pour explorer des aspects que l’on n’a pas forcément perçus à le première lecture, la certitude d’avoir découvert un livre majeur.
J'ai lu ce livre dans le cadre de deux challenges :
- Challenge Virginia Woolf 2013 organisé par Lou où je me suis inscrite dans la catégorie Orlando. C'est ma première participation. Ma prochaine lecture sera La promenade au phare.
- Challenge Litterama 2013 organisé par Anis. Je suis un peu plus avancée, c'est ma troisième lecture.
D'autres avis sur Babelio et des extraits sur le blog de l'Or des chambres.
A découvrir également deux émissions sur France-Culture consacrées à ce roman.