C’est un village isolé au bord d’un lac. Un village sur roulettes où chaque maison peut être déplacée quand les eaux montent pour éviter l’inondation. Un village où les cochons sont fluorescents et savent nager. Au fond du lac repose une forêt de cercueils, ceux des habitants morts qu’on laisse glisser sous les flots sombres en guise d’enterrement. Dans ce village est née « Petite boîte d’os », la fille du pasteur. A l’adolescence, la gamine est en crise : « Je ne les supporte plus, tous, leurs vies, nos vies ordonnées, régulières et policées. Je déteste notre joli village aux maisons multicolores, bien droites et propres au-dessus de leur joli reflet. Je hais les jours qui se succèdent, toujours les mêmes. Le temps passe, je grandis, mon destin se dessine au-dessus de l’eau plate, planche après planche, pas après pas : mariage, enfants, promenade, vaisselle… et je n’en veux pas. » Mais quand le vieux Joseph réapparaît comme par enchantement, la donne change. Le vieux Joseph que la légende qualifie de cannibale et qui va devenir l’amour de sa vie.
Ce premier roman est magique. Une bulle hors du temps et des modes. Karin Serres vous prend par la main et vous emmène dans un univers étrange, à la fois improbable et tellement réel. Elle raconte une histoire d’amour et de mort(s), la fin d’un monde. Sa prose au lyrisme contenu est ciselée, très musicale. On traverse avec délice l’existence de Petite boîte d’os, ses joies et ses peines. L’originalité tient dans le ton choisi, ce souffle de liberté que l’on ressent dans chaque phrase. Aucune timidité dans cette écriture qui allie poésie, sensualité et réalisme mais au contraire beaucoup d’audace. Forcément je suis fan.
Le texte est truffé de très beaux passages :
- sur la mort (après une fausse couche) : « Je ne pense qu’à la mort. Elle est entrée en moi, elle y a tué quelque chose que je n’ai pas su protéger réparer, ressusciter, alors elle peut bien rester, me coloniser tout entière, je ne résisterai pas. Plus de force. Je suis une enveloppe vide, une cosse humaine qui parle, mange ou dort sans savoir pourquoi. »
- sur la douleur (au moment d’un accouchement) : « La douleur est peut-être un organisme vivant, invisible mais réel, qui habite à l’intérieur de notre corps. Parfois il se réveille, s’agite violemment, mais le reste du temps il dort. Du bout de ses tentacules, soudain, il appuie sur nos gencives, nos tympans, nos seins adolescents ou notre utérus comme là, maintenant, aaargh ! […] Mais que devient-il quand on meurt ? »
- sur la perte des êtres chers : « On ne sait jamais, la dernière fois qu’on voit les gens qu’on aime, que ce sera la dernière fois. »
Un grand premier roman, je pèse mes mots.
Monde sans oiseaux de Karin Serres. Stock, 2013. 106 pages. 12,50 euros.
Un lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Marilyne. Mon petit doigt me dit qu'elle a aussi beaucoup aimé.
Ce premier roman est magique. Une bulle hors du temps et des modes. Karin Serres vous prend par la main et vous emmène dans un univers étrange, à la fois improbable et tellement réel. Elle raconte une histoire d’amour et de mort(s), la fin d’un monde. Sa prose au lyrisme contenu est ciselée, très musicale. On traverse avec délice l’existence de Petite boîte d’os, ses joies et ses peines. L’originalité tient dans le ton choisi, ce souffle de liberté que l’on ressent dans chaque phrase. Aucune timidité dans cette écriture qui allie poésie, sensualité et réalisme mais au contraire beaucoup d’audace. Forcément je suis fan.
Le texte est truffé de très beaux passages :
- sur la mort (après une fausse couche) : « Je ne pense qu’à la mort. Elle est entrée en moi, elle y a tué quelque chose que je n’ai pas su protéger réparer, ressusciter, alors elle peut bien rester, me coloniser tout entière, je ne résisterai pas. Plus de force. Je suis une enveloppe vide, une cosse humaine qui parle, mange ou dort sans savoir pourquoi. »
- sur la douleur (au moment d’un accouchement) : « La douleur est peut-être un organisme vivant, invisible mais réel, qui habite à l’intérieur de notre corps. Parfois il se réveille, s’agite violemment, mais le reste du temps il dort. Du bout de ses tentacules, soudain, il appuie sur nos gencives, nos tympans, nos seins adolescents ou notre utérus comme là, maintenant, aaargh ! […] Mais que devient-il quand on meurt ? »
- sur la perte des êtres chers : « On ne sait jamais, la dernière fois qu’on voit les gens qu’on aime, que ce sera la dernière fois. »
Un grand premier roman, je pèse mes mots.
Monde sans oiseaux de Karin Serres. Stock, 2013. 106 pages. 12,50 euros.
Un lecture commune que j'ai le plaisir de partager avec Marilyne. Mon petit doigt me dit qu'elle a aussi beaucoup aimé.