Vassia Nesterenko est ce vieil homme abandonné dans un self-service des Champs-Élysées et confié à la charge du narrateur, un fonctionnaire espagnol venu à Paris pour participer à la conférence internationale des poids et mesures. Il est aussi celui qui trouve refuge dans la cabine des auto-tamponneuses de Pripiat (la ville la plus proche de Tchernobyl) pour échapper aux chiens et qui circule à vélo entre les immeubles abandonnés. Mais il est également ce physicien menacé de mort par le KGB pour avoir dévoilé l’effroyable réalité de la catastrophe nucléaire et dénoncé la désinformation permanente mise en place par les sources officielles. Il fut l’un des tout premiers envoyés sur place et l’un des plus lucides aussi. Dès le début, il décida de venir en aide en priorité aux enfants et chercha à alerter les médias sur l’ampleur du drame. Une sincérité et une volonté de transparence qui lui valurent bien des inimités.
Il y a ce formidable décalage entre l’implacable réalité des chiffres (des millions de cancers), le discours politique rassurant qui relève forcément du mensonge d’état et la vie qui perdure dans les zones contaminées. Le monde des survivants de Pripiat, ou plutôt celui des condamnés en sursis, est un condensé d’optimisme et d’humanité, une volonté farouche de rester debout et de résister, quoi qu’il arrive : « Ils savent tous qu’ils doivent partir. Sinon ils vont mourir. Et pourtant ils sont là. » Parce que c’est ici qu’ils sont nés, parce que c’est ici qu’ils reviennent affronter une mort certaine, parce que c’est ici qu’ils veulent s’aimer, danser et chanter une dernière fois. Emmanuel Lepage avait parfaitement retranscrit cela dans Un printemps à Tchernobyl, Antoine Choplin aussi avec La nuit tombée et Javier Sebastian l’exprime ici à son tour. Un monde interlope où se croisent les résidents permanents, les pillards à la recherche de derniers vestiges à monnayer et même quelques touristes en quête de sensations fortes. Une communauté vibrante et solidaire dans un univers apocalyptique.
Le cycliste de Tchernobyl est un roman engagé, profondément antinucléaire. Sebastian parvient à mélanger des éléments scientifiques purement factuels et des tranches de vie romanesques avec une facilité déconcertante. La figure héroïque de Vassia, physicien altruiste seul contre tous, ayant très vite compris l’ampleur de la catastrophe et voulant à tout prix témoigner de la réalité de la situation, est d’une grande pureté. Un texte sombre, désespéré et humain, une grande réussite.
Le cycliste de Tchernobyl de Javier Sebastian. Métailié, 2013. 204 pages. 18 euros.
Une fois de plus, c’est une lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec Marilyne.
L’avis de Leiloona
Il y a ce formidable décalage entre l’implacable réalité des chiffres (des millions de cancers), le discours politique rassurant qui relève forcément du mensonge d’état et la vie qui perdure dans les zones contaminées. Le monde des survivants de Pripiat, ou plutôt celui des condamnés en sursis, est un condensé d’optimisme et d’humanité, une volonté farouche de rester debout et de résister, quoi qu’il arrive : « Ils savent tous qu’ils doivent partir. Sinon ils vont mourir. Et pourtant ils sont là. » Parce que c’est ici qu’ils sont nés, parce que c’est ici qu’ils reviennent affronter une mort certaine, parce que c’est ici qu’ils veulent s’aimer, danser et chanter une dernière fois. Emmanuel Lepage avait parfaitement retranscrit cela dans Un printemps à Tchernobyl, Antoine Choplin aussi avec La nuit tombée et Javier Sebastian l’exprime ici à son tour. Un monde interlope où se croisent les résidents permanents, les pillards à la recherche de derniers vestiges à monnayer et même quelques touristes en quête de sensations fortes. Une communauté vibrante et solidaire dans un univers apocalyptique.
Le cycliste de Tchernobyl est un roman engagé, profondément antinucléaire. Sebastian parvient à mélanger des éléments scientifiques purement factuels et des tranches de vie romanesques avec une facilité déconcertante. La figure héroïque de Vassia, physicien altruiste seul contre tous, ayant très vite compris l’ampleur de la catastrophe et voulant à tout prix témoigner de la réalité de la situation, est d’une grande pureté. Un texte sombre, désespéré et humain, une grande réussite.
Le cycliste de Tchernobyl de Javier Sebastian. Métailié, 2013. 204 pages. 18 euros.
Une fois de plus, c’est une lecture commune que j’ai le plaisir de partager avec Marilyne.
L’avis de Leiloona