3e tome d’Aâma, Frédérik Peeters finit un cycle tout en action et en réflexion phylosophique…
Scénario et dessin de Frédérik Peeters, Public conseillé : Adultes et grands adolescents
Style : Science-fiction Paru chez Gallimard, le 26 octobre 2013
Share
L’histoire
A la fin du tome précédent, nous avions quitté Verloc Nim et ses compagnons sur Ona(ji) en mauvaise posture. Partis récupérer la substance « Aâma », ils sont confrontés à un environnement en mutation accélérée, depuis que le Professeur Woland a libéré cette « soupe ».
Conrad, le frère de Verloc, est là pour remplir sa mission : ramener un peu de cette substance à son employeur. Pour y parvenir, il lui faut l’aide de Woland et de Rajeev qui peuvent contrôler Aâma, grâce à des implants.
Scène d’ouverture : en pleine scène d’action, le groupe est attaqué par des chimères insectes-robot. Dans la grande confusion qui suit, Rajeev et y Myo perdent la vie. Heureusement, Churchill, le garde du corps robot, toujours aussi efficace, aidé de Verloc, assure la sauvegarde du groupe.
Les survivants sont profondément affectés, mais poursuivent leur marche dans le sous-sol d’Ona(ji). Dans la jungle organique et dense qui les entoure, Rajeev passe aux révélations. Qui est la petite fille qui ressemble tant à la fille de Verloc ? Quel contrôle garde-t-il sur Aâma ?
Autant de questions et des réponses angoissantes pour essayer de comprendre tandis qu’ils approchent du « centre des manifestations »…
Ce que j’en pense
Chic, Peeters nous livre le 3e épisode de cette dépaysante série de S.F. (récompensée par le prix de la série 2013 au FIBD d’Angoulême, ainsi qu’à « Quai des bulles » 2013).
Space-opéra organique et quête spirituelle, il développe un univers foisonnant et déroutant, aussi personnel et inventif que « Le Cycle de Cyann » (de Bourgeon et Lacroix), « La Planète sauvage » (de René Laloux) ou « The Thing » (De John Carpenter).
Dans ce nouveau tome, Peeters avance dans le récit et change de ton. Fini les flash-backs sur Verloc qui dynamisaient la narration. L’épisode débute par une « grosse scène de bataille », car le ton est donné : ça va faire mal !
Quand le groupe s’en sort (tant bien que mal), il exploite les moments plus calmes pour dénouer enfin quelques mystères : qui est vraiment le sosie de la fille de Verloc ? Quelle est la mission de Conrad ? qui sont les commanditaires du projet ? Tandis que le groupe s’enfonce dans un monde souterrain (une « caverne » philosophique ?), toujours plus changeant et dangereux. La « soupe-techno » (Aâma, qui transforme tout à grande vitesse) lui permet d’inventer un monde original et oppressant, en jouant sur l’infiniment grand et l’infiniment petit.
Enfin, avec la sortie du groupe hors du sous-sol (une sorte de renaissance), Peeters opère un glissement vers un récit onirique. Cette perte de repères, c’est le moment qu’il choisit pour aborder l’intime. Relations dans la fratrie, aspiration et réalisation personnelle, mais aussi réflexion sur l’avenir de l’humanité ou les liens entre les hommes et les technologies de communication, il aborde les sujets qui le fascinent ou qui l’effraient…
Aussi bien dans l’action que dans la réflexion, sans émotions aucunes, Peeters bouscule ses personnages. Il les chahute, les blesse de toutes part, pour explorer les parties les plus profondes de leurs personnalités…
Le dessin
Avec ce 3e tome, Frédérik Peeters démontre une nouvelle fois toute sa maîtrise graphique. Son trait classique met en image l’univers fantastique, parfois inquiétant, parfois « magique » d’Ona-Ji avec un plaisir visible et partagé ! Décors délirants et surchargés, scènes d’actions, tout est sous contrôle. Impeccablement mis en scène dans des grandes cases colorées, il joue sur les ambiances avec un sens de l’humour parfois « grotesque ».
Pour résumer
Suivant ses envies de voyage et d’aventure, Frédérik Peeters continue son exploration de la planète Ona-ji, sur-vitaminée à la « techno-soupe » Aâma. Avec de grandes planches à l’ancienne, il nous offre un troisième épisode qui « passe à l’action » sans oublier les réflexions sur l’avenir du genre humain. Malgré les explications qui clôturent ce cycle, il reste encore beaucoup de zones d’ombre que Peteers se garde sous le coude pour de futures aventures.