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Je suis l'homme qui a lu l'homme qui a vu l'homme, le nouveau roman de Marin Ledun. Et encore une fois, l'auteur m'a étonné.
Son intrigue est certes complexe, à l'image de l'enquête de son héros journaliste mais comme ce dernier, on rentre de plein pied dans un univers dont on ne connait ni les coutumes, ni les codes, ni le fonctionnement.
Petit à petit, on commence par entrevoir les articulations, les engrenages et surtout les enjeux d'un engagement très inégal.
« Nuit blanche peuplée d'ombres noires. »
Comme dans les Visages Écrasés, l'impression de lire un livre témoignage plutôt qu'une simple œuvre de fiction est flagrante. Un peu comme si on se retrouvait embarqué dans un reportage via le point de vue d'une caméra sur l'épaule.
De la même manière que dans les autres livres du romancier, la quête de vérité du héros va devenir une addiction, presque une obsession. Plus on lui met de bâton dans les roues, plus il tente d'avancer encore un peu plus.
La prose viscéral transpire d'humanité et fait beaucoup penser à deux autres romans assez percutant de Marin Ledun : la Guerre des vanités et Les Visages écrasés.
Comme je le disais pour la Guerre des vanités, Marin Ledun donne corps à son personnage et s'efface pour raconter simplement son histoire.
Méticuleusement, patiemment et sans dénouement extraordinaire, il amène le journaliste vers la révélation finale, en enchaînant avec régularité des chapitres linéaires mais de plus en plus oppressants.
« La guerre est le règne de l'organisation et de la prévision, mais personne ne pense à la paix. » Louis Althusser, philosophe.
Un livre organique prenant son temps pour laisser ses racines suivre leurs chemins, avec une bande son qui pourrait être le bruit de battements de cœur du héros.
J'ai eu du mal à rentrer dans l'histoire mais c'est ce qui permet à cette identification au héros de fonctionner encore mieux : comme lui au début, on est sceptique, on se retrouve à évoluer dans un univers que l'on ne comprend pas et qui ne nous intéresse pas forcément au premier abord.
Comme lui, on commence à lire entre les lignes et deviner que la vérité est belle et bien enterrée, et que l'on n'est jamais trop nombreux pour tenter de la mettre à jour.
Un livre ambitieux, à l'image d'un romancier qui s'emploie roman après roman à devenir une voix incontournable dans le paysage du polar actuel.
Frédéric Fontès, 4decouv.com