Chronique « Aâma (T4) » : une fin en apothéose
Scénario et dessin de Frederik Peeeters,
Public conseillé : Adultes / Grands adolescents, style : Science-Fiction,
Paru chez Gallimard BD, le 16 octobre 2014, 104 pages couleurs, 18.50 euros
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L’histoire
A la fin du 3ème tome, Verloc Nim avait reconstitué son parcours : sa venue sur Ona(ji) avec son frère, la rencontre avec les scientifiques du projet Aâma et l’expédition meurtrière, dans un environnement aussi hostile qu’étrange.
Verloc se retrouve donc seul survivant, cerné par une multitude de Lilja. Triste, apeuré, épuisé, il s’enfonce dans un monde de sensations hallucinantes…
A son réveil, Verloc est capable de voler comme un demi-dieu et même de traverser la matière.
Engageant un combat avec Aâma, il lutte pour garder le contrôle de son corps en constante mutation, qui est devenu le véhicule de la soupe cybernétique…
Quand un vaisseau paramilitaire de la société Muy-Tang atterrît sur Ona(ji), Verloc se dirige vers l’équipage et fait exploser l’homme qui le menace. Il prend le contrôle du vaisseau et se dirige vers sa planète d’origine pour retrouver la “vraie” Lilja…
Ce que j’en pense
Avec ce quatrième et dernier tome d’Aâma, Frederik Peters nous en met plein la vue. Son héros de papier, Verloc Nihm, subit un voyage métaphysique, dans lequel il se dissout et se métamorphose en permanence.
Peeters met en image les délires de ces perpétuelles mutations aux formes improbables. Hallucinantes et hallucinés, ses planches font exploser les lois de la narration graphique, en se renouvelant d’une scène à l’autre.
Entre les scènes d’introspection internes et celles de pure action (grandiose le Verloc-Super-Man), il nous offre un récit très ludique, où le moteur est essentiellement le plaisir. Plaisir de dessiner et de raconter de façon assez inédite, Aâma se finit dans une apothéose graphique de toute beauté !
A part les scènes hyper-graphiques qui s’expriment dans de grands formats (jusqu’aux double-pages), Frederik Peeters clôture son récit de façon plus conventionnelle. Les pages en gaufrier et en grandes cases très lisibles bouclent chaque bouts de l’histoire. Qu’est ce que Aâma ? Quel est son but ? Quel sont les rôles de Verloc, de Lilja et du robot-gorille Churchill ? Ce dernier tome ferme toutes les portes.
Malgré l’aspect hallucinatoire qui jalonne le récit, et qui m’a fait penser aux scènes de “2001, Odyssée de l’espace”, il semblerait que Frederik Peeters refuse une lecture mystique. Si vous chercher un sens à ce périple, passez votre chemin. Il faut plutôt y voir une forme de rêverie auto suggérée, que nous fait partager son auteur.
S’il n’y a pas de message mystique, Aâma n’est pas dénué de profondeur. Frederik Peeters nous fait témoins d’une relation d’amour intense entre un père et sa fille. Mais surtout, il nous fait participer à une réflexion humaniste. Quel est le rapport entre humanité et technologie ? A une époque ou la question commence à se poser, Aâma tombe à point nommé.
Pour résumer
Avec un imaginaire complètement débridée et une exécution graphique de toute beauté, Frederik Peeters clôture son périple par un grand moment de BD. Son sens du mouvement et son plaisir du dessin nous plongent une partition graphique aussi intense d’hallucinatoire. Entre moments de réflexions humanistes et grandes scènes de combats titanesques, Peeters joue indifféremment l’interne comme l’externe. Savoureux et très cérébral, ce dernier opus est une pure merveille !