Chronique « Undertaker » (T1) : Six feet under
Scénario de Xavier Dorison, dessin de Ralph Meyer, couleurs de Delabie,
Public : Adultes/Adolescents
Western
Paru chez Dargaud le 30 janvier 2015, 64 pages couleurs, 13.99 euros
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L’histoire
Les croque-morts, personne ne les aiment. Ca tombe bien, Jonas Crow, croque-mort de son état, n’aiment pas les hommes !
Ce matin-là, une bonne nouvelle arrive : la mort d’un de ses clients. Le client s’appelle Joe Cusco, un ancien mineur devenu millionnaire. Mais en arrivant sur place, c’est l’étonnement. Joe est vivant, quoique très atteint par une maladie qui le ronge. Pour éviter de mourir à petit feu, Joe a décidé de se donner la mort dans la nuit. Charge à Jonas de convoyer son cadavre vers le filon qui fit autrefois sa fortune, en compagnie de la très sèche et loyale Rose…Le genre de mission qui ne pose pas de problème à l’Undertaker.
Avant de se donner la mort, en ingérant une grosse dose de poison, Joe explique à Rose qu’il ne laissera aucun héritage. La valeur de la mine, revendue peu de temps avant, a été convertie en or pur… qu’il a l’intention d’avaler. Si Rose ne respecte pas ses volontés, un indien de sa connaissance tuera un otage en représailles…
Au matin, comme prévu, le vieux Joe est raide et la nouvelle se répand très vite dans la ville minière…
Ce que j’en pense
Le tandem Xavier Dorison / Ralph Meyer, qui avait fait des merveilles sur un précédent diptyque (voir “Asgard (T1) » et “Asgard (T2)”) est de retour. Changement de décors, après le “film de monstre”, les auteurs s’attaquent au “bon vieux western”, ou plutôt au film de “Road-Movie”, dans un univers Western.
Dès la première page, Dorison impose un personnage étonnant et contradictoire. “Les hommes ne m’aiment pas. ben moi , je n’aime pas les hommes”, jette-t-il à la gueule du lecteur. Au moins, on est prévenu. Jonas Crow est de ces antihéros absolu, qu’on aurait tord de ne pas “aimer détester”. Mais l’intérêt de “Undertaker” ne s’arrête pas à ce personnage grossier, ténébreux, roublard…et attachant.
Sur une trame assez classique (La révélation qui fait exploser une petite communauté et remonter les histoires anciennes…) Dorison a concocté un récit d’une grande maîtrise narrative. Jouant avec les personnages à contre-emploi (La sévère mais au grand coeur Rose; Madame Li, la petite asiatique pas si innocente que ça, et le sherif Ripoux) il fait monter la sauce et la tension avec une régularité qui touche à la perfection.
Le “picth” du gars qui avale son magot pour éviter de le donner est pas mal non pus. Il manque juste pour finaliser ce Western, mâtiné de thriller, un “méchant” du même acabit que son “Undertaker”. Mais, je fais confiance à Xavier Dorison. Avec un second tome à venir et un parfait “Cliffhanger” en fin d’album, il a toute latitude pour nous étonner.
Le dessin
Découvert en” teasing” sur la page facebook de Meyer, le dessin d”Undertaker” est à tomber par terre ! Rythmé, mouvementé, expressif et détaillé à la fois, Meyer donne le meilleur de lui-même sur ce scénario “sur mesure”. J’ai retrouvé dans son trait classique quelque chose du grand “Giraud”. Sans chercher à comparer avec “Blueberry”, son “Undertaker” a cette qualité d’encrage et de précision cumulés. Chapeau, Monsieur Meyer !
Travailler avec Dorison, signifie de faire passer l’histoire d’abord. Sur ce bon principe, le découpage d’ »Undertaker” est un petit bijou de musicalité, qu’il est impossible de ne pas remarquer. Ou pire, tellement parfait qu’il disparaît derrière le scénario. L’ensemble, passionnant et poignant m’a littéralement bluffé.