La malédiction de la mouette

Je suis en retard, je suis en retard ! Voici ma participation pour l'atelier d'écriture de Leiloona. Quelques mots tout simples pour ouvrir le mois de mars :

La malédiction de la mouette

Les mouettes aiment les vents contraires sur le bord de la mer. Ils leur passent entre les plumes et leurs idées fixes, leurs craintes, leurs blessures s'envolent en un souffle, comme des graines de pissenlit semées par le vent et le hasard. Comme elles, elles fécondent les sols vierges et apparaissent, nouvelles, jeunes et renouvelées. Toujours un peu plus loin. Il n'y a que des yeux de mouettes pour penser que ce n'est pas la même chose.

Elles se perchent souvent, les unes contre les autres, sur une petite tourelle en marge du port. Elles y regardent l'horizon, souillant la pierre rougeâtre. Quand passe au-dessus d'elles l'ombre lente d'un cormoran, elles hurlent de toutes leurs forces pour l'appeler. Qu'il reste là, lui aussi, à guetter les rebuts des bateaux revenant de la pêche ; qu'il contemple, avec elles, la mer et ses fantômes ! On voyait tellement bien d'ici, et la lumière était tellement belle !

Elles ne comprennent pas, les mouettes, qu'il y a d'autres lumières et d'autres ports, par-delà leur horizon chéri. On a renoncé depuis longtemps à leur expliquer parce qu'elles crient trop fort. On ne peut même pas leur dire, mais c'est tout de même une forme de malédiction.