Traduit par Laura Derajinski
Editions Gallmeister – Nature Wrinting
Parution le 02/10/2014
Mais il réplique que la pêche est sa seule religion, que la rivière est une sorte de dieu - elle te noie comme une merde, que tu sois un aigle ou un putain de moustique, ça ne fait pas la moindre différence, rien n'est jamais fait à moitié.
Présentation
Dès l’enfance, ici, on semble rompu à la survie. Dans cette famille de pionniers en Alaska, on ne pleurniche pas, trois générations s’entrecroisent pour le prouver. Pêcheuses, pêcheurs, trappeurs, trappeuses, chasseurs ou chassées, la force des liens se mesure au courage, à la capacité de tenir la bouteille, d’encaisser les coups et au don pour raconter des histoires. Tous ont appris très tôt que les bananes portent la poisse sur les bateaux, c’est l’oncle qui le dit. On sait que les hameçons vont se ficher partout quand on les lance, un mannequin à l’hôpital peut en témoigner. Même les poissons dans ces récits semblent parler tant ils sont en vie, tant ils se battent, eux aussi, contre les éléments.
Dans chaque histoire de ce premier ouvrage magistral, Melinda Moustakis donne à voir des paysages d’une rudesse que seule la beauté de l’Alaska peut atténuer, des personnages que seuls le rire, la famille et les histoires peuvent apaiser.
Le livre a été récompensé par le prestigieux prix Flannery O’Connor et le prix O.Henry / PEN.
La colère, les hormones, la sensation d'être impuissant et jeune. Ils ont besoin d'un tel exercice, ou d'un tel exorcisme. Construisez un pont, as-tu envie de leur dire. Construisez quelque chose. Arrêtez de faire les gros yeux et de courber le dos. Construisez un monument à la grandeur de votre malheur. Sculptez une main géante qui lèverait le majeur en direction du ciel. Mais faites quelque chose.
Avis
Pas vraiment des nouvelles, pas vraiment un roman, ce livre regroupe des récits distincts mais qui ont pourtant un lien entre eux. La beauté de cet ouvrage réside dans le décor somptueux de l’Alaska tandis que le côté sombre provient des personnages, on a d’une part la clarté et l’harmonie des couleurs de la nature et d’autre part la violence de l’homme, avec au milieu de tout ça la rivière Kenai comme un pont entre deux civilisations.
Une famille survive sur ces grands espaces, de génération en génération ils vivent de la chasse, de la pêche et de tout ce que la nature a à offrir mais loin des clichés de valeureux pionniers il est plutôt question de rudesse dans ces récits.
Au fil des pages on reconstitue leur histoire, les épreuves qui ont changé leur quotidien, les années s’écoulant au rythme de la rivière et de ses offrandes, les cannes à pêches, les hameçons plantés où ils ne devraient pas, les animaux sauvages, l’alcool et ces femmes et hommes pauvres mais coriaces.
L'Alaska t'a rendue cruelle
Les textes sont tour à tour très court, un rappel ou une note, puis plus long comme une nouvelle, et le tout et le roman d’une famille en Alaska. Drôle d’objet qui ne se range dans aucune catégorie à part celle du Nature Writing.
Une aventure dans laquelle les personnages s’emmêlent, j’ai perdu le fil des liens de parenté, des années qui s’écoulent parce que l’auteur change constamment d’époque ; pourtant ce livre est une merveille la sobriété de l’écriture, la description des paysages, la survie comme qualité de vie donne des personnages endurcies et plus humains que jamais et des situations dont on saisi le sens que plusieurs pages après.
Ce livre est un vrai filet de pêche, chaque fil a un lien avec un autre.
Lu dans le cadre du Challenge 1% Rentrée Littéraire 2014
et du Challence Petit Bac 2015