Encore une bien jolie découverte chez Gallmeister, avec ce petit (par la taille, pas par le talent) roman de Larry Watson. Allez-y les yeux fermés : c'est une petite pépite. "Ce que j'entendis annonçait une telle rupture dans nos existences, un tel abîme séparant désormais ce que nous étions de ce que nous ne serions plus jamais, qu'il faudrait, semble-t-il, mesurer le temps à cette aune."
C'est l'été. David Hayden a douze ans. Et il n'oubliera jamais cet été. Un été où tout bascule, un été qui le fait soudainement grandir. "Si j'étais rentré dans la maison, si j'étais resté dans la cuisine, ou à l'inverse si j'étais parti dans la même direction qu'Oncle Frank, je n'aurais jamais entendu la conversation entre mon père et ma mère et j'aurais peut-être gardé toute ma vie des illusions sur ma famille en particulier et sur le genre humain en général."
Cet été-là, une femme amérindienne accuse l'oncle du garçon, l'un des notables les plus respectés du comté, de violences, une affaire qui embarrasse bien le père et shérif de la petite ville, amené à enquêter sur son frère très respecté. "C'est ainsi que la vérité m'apparut. Oncle Frank était le frère de mon père. Et mon père le connaissait aussi bien que n'importe quel autre homme ou femme. Et mon père savait qu'il était coupable."
A la hauteur des grands classiques de l'ouest américain, à l'instar d'un Norman Maclean à qui la structure du titre est empruntée (voir Montana 1919 où l'auteur mythique raconte l'été de ses 17 ans). Sobre, efficace, tout en retenue, émouvant et touchant, avec Montana 1948, Larry Watson s'inscrit clairement dans la lignée de ces auteurs du Montana - on parle improprement d'école - que sont Raymond Carver, James Lee Burke, Richard Ford ou Thomas Savage (voir mon billet sur le sublime Pouvoir du chien), souvent injustement réduits à du nature writing et des histoires de randonnée et de pêche à la mouche.
Une bonne entrée en tous cas, toute en petites touches et en finesse, dans cette littérature.