La série Daredevil et l’avenir des comics à l’écran

Tout le monde a vu la série Netflix Daredevil maintenant ? Si vous êtes un de ces malheureux qui sont passés à côté de ce phénomène, je vais tenter de vous convaincre de rattraper votre retard, et ensuite vous serez probablement d’accord avec moi : si on pouvait craindre la surenchère de super-héros avec tous les films de super-héros qui sortiront d’ici 2020, Daredevil vient de prouver que là où il y a de la qualité, il ne peut y avoir de lassitude !

Comme pour beaucoup de téléspectateurs, Daredevil a été une révélation pour moi. La promotion autour de cette série a été d’une telle qualité et inventivité que l’attente a été insoutenable avant de pouvoir découvrir les épisodes. Au delà des traditionnels teasers et affiches qui donnaient déjà envie, la promo a pris une dimension encore plus épique quand Netflix a utilisé des moyens un peu différents. Par exemple, on a pu retrouver du street art dans tout New York, dont ce poster dessiné par le dessinateur star de Marvel Joe Quesada, qui avait déjà dessiné la première affiche promo qu’on avait vue il y a quelques mois.

série netflix daredevil

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Sublime n’est-ce pas ? Mais ce qui m’a le plus marquée, ce sont ces « motion posters », si on traduit littéralement, des posters qui bougent ! Ce mélange entre photo et vidéo promo est génial ! Voici ma préférée :

Dans cette mini vidéo, on aperçoit tous les personnages : Foggy Nelson qui sort du taxi tout à gauche, Karen Page dans la rue, au milieu Matt Murdock bien sûr, Vanessa et Leland un peu en retrait, Claire Temple en hauteur sur le balcon tout à droite, et enfin Wesley, ouvrant la porte d’une voiture qui laisse sortir Wilson Fisk. Ce qui me fascine encore plus, c’est tout ce qu’on peut trouver dans cette vidéo en l’examinant de près : la tour Avengers en arrière plan, surplombant la ville au loin, le son du réacteur d’Iron Man qu’on entend au début, et bien sûr, le reflet de Matt Murdock qui fait entrevoir le costume final de Daredevil !

Avec tout ça, je me suis abonnée à Netflix à la seconde où je suis rentrée chez moi ce fameux vendredi 10 avril 2015. 13 épisodes disponibles d’un coup, j’aurais pu rester devant toute la nuit si mon conscience (=mon copain qui est bien plus raisonnable que moi) ne m’avait pas rappelée à l’ordre. En un épisode, c’était foutu : j’étais totalement accro ! C’est simple : cette série n’a absolument rien à voir avec tout ce qu’on a pu voir sur les adaptations comics jusqu’à présent. Elle n’a pas grand chose à voir avec le reste des séries non plus d’ailleurs, tellement on sent que Daredevil, c’est la cour des grands ! Si vous connaissez les productions Netflix, vous voyez de quoi je parle : tout ce qu’ils font est d’une qualité irréprochable, quel que soit le domaine. Allez regarder House of Cards, Orange is the New Black ou Marco Polo si vous n’êtes pas encore convaincus ! Daredevil ne fait pas exception à la règle : le scénario, les acteurs, la photographie et la réalisation la placent bien au dessus de toutes les séries et même de beaucoup de films de super-héros !

Rien que le générique est un chef d’oeuvre en soi :

Si on est accroché dès le premier épisode, ce n’est pourtant pas un pilote tel qu’on a l’habitude de le voir : tout n’est pas dit sur le héros par exemple, les fondamentaux sont instaurés en quelques minutes (l’accident qui le rend aveugle, la présence importante du père, le rapport à la religion/la morale) mais Matt Murdock et ses motivations restent bien mystérieux ! On sent que la diffusion particulière de Netflix (tous les épisodes disponibles à la fois) leur impose moins d’enjeux sur le pilote. Comme le disait dans une interview Vincent D’Onofrio, l’interprète de Wilson Fisk, il s’agit plus un film de 13 heures qu’une série, donc ils prennent leur temps pour instaurer l’ambiance et le caractère de chaque personnage. Une série diffusée sur une chaîne traditionnelle ne peut pas se permettre cela, elle doit taper fort dès le premier épisode pour inciter le téléspectateur à revenir la semaine d’après… Ce qui n’est pas toujours facile à doser !

série netflix daredevil

Dès le départ, c’est le réalisme de la série qui frappe. Beaucoup de personnes à qui j’en ai parlé ont été marqués par le fait que pour la première fois, on voit le héros en difficulté : il souffre dans les combats, il n’expédie pas le méchant en deux secondes chrono, et il est essoufflé ! Ça peut sembler sans importance, mais c’est ce souci du détail qui fait tout le charme de la série. Je n’y connais rien en sports de combat, mais j’ai vu passer un commentaire d’un expert dans ce domaine sur les réseaux sociaux qui listait les inspirations dans les scènes de baston : apparemment, le style de combat de Daredevil est un mélange de près d’une dizaine de techniques différentes, ce qui rend les scènes crédibles même pour des connaisseurs. Classe, non ? Justement, parlons-en de ces scènes de combat. Elles sont incroyablement bien réussies. Il y en a une dans l’épisode 2 notamment, qui est incroyable. Instantanément culte ! La façon dont la série met en scène les combats, avec des temps morts, des blessures dans les deux camps etc. : c’est du jamais vu ! Pour les allergiques au gore, attention quand même, certaines scènes sont TRÈS violentes, on voit des fractures ouvertes et des morceaux de cervelle, quand même !

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Le réalisme se situe aussi dans la caractérisation des personnages, notamment du héros. Il est moins super-héros que justicier, justement. S’il a des capacités supérieures à la normale, jamais il n’est fait mention de super-pouvoirs, et jamais ça ne prend le dessus sur ce qui fait qu’il continue à tenter de sauver Hell’s Kitchen. Il n’a pas de super-force, il sait juste prendre des coups ! Les acteurs font tous un travail formidable. Les séries TV emploient en général des acteurs débutants, ici ce n’est pas le cas. Qui ne connaît pas Vincent D’Onofrio,  alias Wilson Fisk ? Ce Caïd n’apparaît pas tout de suite : on ne le voit pas, on ne connaît pas son nom dans les premiers épisodes, il est une force invisible que le héros tout comme le spectateur ne perçoit pas tout de suite. Lorsqu’il apparaît, c’est sa complexité qui frappe le plus : ce n’est pas un méchant unidimensionnel comme on n’a l’habitude de le voir. A bien des égards, Wilson Fisk est autant le héros, ou plutôt anti-héros de cette première saison de Daredevil que Matt Murdock.

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Le costume final de Daredevil

Charlie Cox est quant à lui très différent physiquement du personnage des comics mais on l’oublie en un instant, tellement il est à l’aise dans ce double rôle. Le jour, il avance lentement, raide dans son costume d’avocat. La nuit, il se métamorphose en justicier rapide, fort et agile. Sans pouvoir utiliser ses yeux, l’acteur joue remarquablement bien avec son corps. Je pourrais parler de tous les acteurs de cette façon, mais je préfère vous laisser découvrir par vous-même, je vous en ai assez dit pour vous donner envie de regarder, non ?

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Parlons d’un sujet qui fâche. Moi qui vous ai déjà parlé des séries adaptées de comics de la chaîne CW : Arrow et The Flash, je dois admettre que Daredevil envoie CW au tapis… Si je mets The Flash de côté car le style est totalement différent donc incomparable, j’avoue que j’ai vraiment eu du mal à regarder Arrow la semaine après mon visionnage de Daredevil. Cette série se voulait urbaine et réaliste, notamment lors de la première saison, et la comparaison est particulièrement douloureuse pour Arrow aujourd’hui. C’est pour cette raison que cet article d’intitule « Daredevil et l’avenir des comics à l’écran », car pour moi, c’est vraiment ce que cette série représente. Si Marvel and co veulent continuer à utiliser le très riche matériau des comics, ils ne doivent pas capitaliser uniquement sur leurs premiers succès. Marvel = humour, DC = sombre, c’est vraiment trop simpliste pour accrocher les gens plus de quelques films ! Après le semi-échec de la série TV plus sombre que les films type Avengers : Agents of Shield, Marvel a compris qu’il fallait qu’elle s’allie à d’autres  acteurs du marché pour consolider son emprise sur le marché. Netflix a fait leur succès sur le petit écran !

Chez le concurrent direct DC, un calcul similaire a été fait en lançant The Flash, au ton et à l’esthétique très différents des films Batman de Nolan ou du futur Batman v Superman ! Bien sûr, les moyens ne sont pas les mêmes qu’avec Netflix, pourtant, le succès est là : l’audience augmente de semaine en semaine !

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Alors, si la solution était d’oublier la recherche d’un ton général, d’une production uniformisée pour viser plutôt la qualité de chaque oeuvre individuellement ? Après tout, la série Daredevil est tellement géniale que même les personnes autour de moi n’aimant pas particulièrement ni comics ni super-héros l’ont adorée (coucou Red Beauty !).
Allez Marvel et DC, je vous offre ma solution, parce que je vous aime. On part sur 1% de vos recettes ? 😀