Comme souvent, c’est la faute d’une femme (pas taper !). C’est à cause de Raquelita que Rogelio croupit derrière les barreaux depuis vingt ans. C’est à cause d’elle qu’il a commis un meurtre. Du moins c’est ce qu’il raconte dans une confession à un mystérieux destinataire. Amoureux fou de cette belle blonde, il partit à sa recherche après sa soudaine disparition. Tombant dans les griffes d’une autre femme (eh oui, forcément !), la sulfureuse mademoiselle Galiffi, fille d’un parrain de la pègre locale, Rogelio plongea la tête la première dans un nid de vipères dont il ne pouvait ressortir indemne.
A Rosario, dans l’Argentine du début des années 30, la ville appartenait au crime organisé. Les italiens et les juifs, spécialisés dans la prostitution, se partageaient le gâteau et les pouvoirs publics, corrompus, fermaient les yeux. Mais avec les troubles sociaux prenant de l’ampleur et l’implantation de plus en plus importante des anarchistes et des syndicalistes, la mafia trouva un ennemi commun à combattre.
C’est l’histoire d’un homme piégé par la passion amoureuse et devenu une marionnette dans les mains de malfaiteurs sans scrupules. Un polar noir à souhait, extrêmement classique, même si, vu le nombre de protagonistes et les incessants flash-back, l’ensemble peut paraître à première vu dense et complexe. L’ambiance de la ville portuaire sud-américaine au début du 20ème siècle, de sa coterie et de ses bas-fonds, est parfaitement restituée. Les manigances sont permanentes, les clans, en apparence soudés afin de lutter contre les mouvements d’extrême gauche, ne manœuvrent en fait que pour leurs propres intérêts. Un scénario mêlant affaires troubles et politique sans grande surprise qui ne me marquera pas durablement je pense. J’ai par ailleurs trouvé assez étrange ce tic du scénariste consistant à révéler l’avenir funeste de ses personnages en plein milieu de l’action, comme s’il voulait spolier son propre récit et lui ôter une bonne dose de suspens.
Graphiquement par contre, rien à dire, le trait épais et les couleurs directes à l’aquarelle sont superbes. Pas suffisant cependant pour emporter mon adhésion. Décidément, le polar, même en BD, j’ai du mal.
Rosario de Sampayo et Stassi. Ankama, 2015. 76 pages. 14,90 euros.