Billet de Maestitia, par Myriam Ould-Hamouda…

Que celui qui lit les conditions d’utilisation et les règles de confidentialité avant de chat qui louche maykan alain gagnon francophoniecliquer sur « accepter », me jette la souris sans fil qui traîne sous son canapé Ikea. Si la vie est un cadeau, on a oublié de lire les petites lignes du contrat, on n’a pas vu que l’offre était soumise à conditions. Et pendant que tu te vautres sur ton canapé, faute d’avoir retrouvé cette putain de souris qui était encore dessous ce matin, que t’allumes la TV et une Marlboro après avoir fait l’amour à ta femme, que tu lui gueules de te ramener un paquet de chips et une bière. Pendant que tu te vautres sur ton canapé, un môme meurt de faim dans un pays voisin, un type meurt de froid sur un trottoir du quartier, une meuf meurt sous les coups d’un mec qui n’aura pas fait que gueuler dans l’appartement d’à côté. Pendant que tu te vautres sur ton canapé, le ciel bleu peut s’effondrer, et la terre peut bien s’écrouler, tu t’en fous. Je ne t’accable pas, ni toi ni ton canapé, nous faisons partie de la même meute d’autruches qui savent si bien fermer les yeux (mais en gardant la plume soyeuse). Je ne t’accable pas, même si je me flagelle souvent quand je me vautre sur ton canapé.

Il y a qu’à peine le col de l’utérus passé, on nous a collé des chaînes aux pieds et un marteau entre les mains pour réparer les conneries que des types ont cachées sous leur moustache dans les manuels d’histoire. On nous a donné la vie, qu’on ne vienne pas nous demander de payer une dette dont on aurait hérité au passage. De payer les mensualités d’une assurance à laquelle on n’a jamais souscrit, de porter le poids d’une culpabilité que des meufs en cavale ont laissé derrière elles à la maternité. On nous a donné la vie, qu’on ne vienne pas nous reprocher notre mâchoire qui craque et notre émail qui s’effrite à force de croquer dedans à pleines dents. Il y n’a que dans les polars où l’intrigue prend des raccourcis, c’est le monde qui porte le taser et qui nous laisse sur le macadam, la toile cirée ou la moquette molletonnée avec nos angoisses, nos regrets et sa putain de culpabilité. Il y a que, parfois, les méchants ont un bon fond et que, souvent, les gentils sont de gros cons, mais qu’ils savent mieux poser le carrelage, et que ça fera la blague. La blague ne nous fait plus sourire, la soupe ne nous fait plus grandir, et la colle a pris avant qu’on ait pu retirer notre doigt.

chat qui louche maykan alain gagnon francophonieL’enfance reste souvent sur le premier carreau quand des bouches trop rouges et des rides, qui se cachent sous le botox, lui collent un revolver sur la tempe et des baisers trop mouillés sur la joue. Qu’on se le dise, les grands ont la tête cabossée à force de se prendre les lustres de ce monde bas de plafond, et aucun môme ne prend plus son pied en s’imaginant footballeur, acteur ou miss France qu’en sautant dans une flaque d’eau avec son innocence et ses trois pommes qui ne demandent rien à personne. Tant que personne ne vient le sermonner avec ses bonnes intentions, son enfer et ses ongles incarnés. Aucun môme ne devrait se prendre une fessée parce qu’un grand a mal au crâne, aucun grand ne devrait s’empêcher de sauter dans les flaques d’eau, de se rouler dans la neige, de faire l’amour dans la boue parce qu’il a peur de salir son costume trois-pièces et de se faire gronder par maman. Certains jours, tu sais, je m’en veux vraiment d’être cette sale môme qui ne sait pas sauver tous ces morts autour d’elle ; et d’autres soirs, mon mètre soixante-dix qui se vautre dans tes bras et sur le canapé Ikea arrête de culpabiliser : au fond, il fait de son mieux.

Notice biographique

Chat Qui Louche maykan alain gagnon francophonieMyriam Ould-Hamouda (alias Maestitia) voit le jour à Belfort (Franche-Comté) en 1987. Elle travaille au sein d’une association pour personnes retraitées où elle anime, entre autres, des ateliers d’écriture.  C’est en focalisant son énergie sur le théâtre et le dessin qu’elle a acquis et développé son sens du mouvement, teinté de sonorités, et sa douceur en bataille — autant de fils conducteurs vers sa passion primordiale : l’écriture. Elle écrit comme elle vit, et vit comme elle parle.  Récemment, elle a créé un blogue Un peu d’on mais sans œufs, où elle dévoile sa vision du monde à travers ses mots – oscillant entre prose et poésie – et quelques croquis,  au ton humoristique, dans lesquels elle met en scène des tranches de vie : http://blogmaestitia.xawaxx.org/

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche :https://maykan2.wordpress.com/)