La semaine dernière nous apprenions dans Secret Wars #2 ce qu'est exactement Battleworld. Cette semaine, nous commençons à découvrir les différents territoires. Je commence cette exploration avec A-Force de G. Willow Wilson, Marguerite Bennett et Jorge Molina. Et la série met la barre assez haut.
Arcadia. Retenez ce nom. Il s'agit d'une île au sud-est du Battleworld, adjacent au Shield, cette grande muraille qui sépare le monde des Deadlands et des autres territoires interdits. Arcadia est une jolie île où les gens vivent en paix sous la protection de la A-Force, une équipe constituée uniquement de femmes sous le commandement de She-Hulk, la baronne d'Arcadia. Tout se passe normalement pour l'équipe jusqu'à ce qu'elles affrontent un mégalodon sorti des eaux aux côtes de l'île. En effet, Miss America commet une faute grave.
Lorsqu'un éditeur ou une boîte de production nous annonce une série féminine, il y a toujours une crainte de voir quelque chose de très "girly". Par exemple, le trailer Supergirl nous a rappelé Le diable s'habille en Prada ou la nouvelle direction du comic book Batgirl nous fait penser au dessin-animé Totally Spies. Les lois du marketing sont quelques fois impénétrables, et il n'aurait donc pas été étonnant de voir des filles faire des trucs de filles entre deux cassage de gueule de mégalodon.
En tout cas, avec deux femmes aux commandes (et un éditeur gay) nous nous doutions qu'elles allaient éviter le graveleux. Même si Jill Lepore, historienne renommée qui a écrit l'année dernière un livre sur Wonder Woman, a vu dans cet épisode un concentré de femmes qui ressemblaient à des actrices porno. Je dois avoir l'esprit moins mal placé que cette femme. En tout cas, cela confirme que sa tribune plutôt mal foutue sur le site du Newyorker n'était qu'un amas de con**ries et de mensonges justifiant son argumentation sur l'incompréhension d'un gamin qui semble clairement être interdit de télévision et de comicbooks et d'un autre passionné qui, malgré son jeune âge, tente d'expliquer en une phrase des années d'histoire qu'elle démonte avec sa réflexion d'adulte. Cela n'est pas sans rappeler les années sombres de l'industrie des comics et les méthodes fallacieuses de Fredric Wertham. Bien que cela dépasse le contenu de l'épisode, il me semblait important d'évoquer cet article qui aurait pu tromper le lecteur sur le contenu du bouquin.
Pour revenir à la série en elle-même, Wilson et Bennett évitent royalement ces clichés qui imposeraient qu'une équipe de filles soient destinées qu'aux filles. Et pour le coup, nous avons le droit à un titre de super-héros comme on aime les lire. Tout simplement. Les héroïnes sont chacune à leur tâche quotidienne et lorsque la menace arrive elles répondent à l'appel pour frapper le mégalodon qui a osé pointer le bout de son nez à Arcadia. Les personnalités de chacune viennent à s'installer dans un second temps notamment avec une She-Hulk qui n'a clairement pas demandé son statut de Baronne mais qui n'est pas prête à se laisser faire marcher sur les pieds par ses consœurs. en effet, les deux scénaristes relèvent rapidement qu'il y a de nombreuses femmes fortes dans le groupe et que certaines ont eu, par le passé, des responsabilités assez proches de celles que She-Hulk a en ce moment.
La surprise de ce premier épisode est qu'il focalise sur Miss America (America Chavez) et Nico Manoru, deux des plus jeunes membres de la A-Force. L'une parce qu'elle commet une erreur grave selon les lois imposées par Doom, la seconde parce qu'elle se sent proche de America. En tant qu'amie, jamais les deux scénaristes n'insinuent que, parce que America est lesbienne, qu'elles vivent une relation amoureuse. Nous le savons, anciens lecteurs de Runaways, Nico est une fille très sensible qui s'attache rapidement à ses amis. Il parait tout à fait logique qu'elle se sente proche de l'ancienne leader des Young Avengers qui est une fille forte et qui a toujours su être réconfortante avec les siens.
La présence de Loki pouvait étonner dans un premier lieu mais les deux scénaristes l'utilisent comme un vecteur, un personnage proche d'America à qui elle peut avoir confiance sur certains points. Avoir confiance en Loki ? Tout à fait, les lecteurs de Young Avengers de Kieron Gillen peuvent le concevoir.
La série débute et je suis déjà conquis. Wilson et Bennett posent des jalons, elles nous font oublier le côté 100% féminin en faisant cette alchimie naturelle, elles apportent de l'émotion et, elles nous offrent un cliffhanger et un bon twist final. Enfin, vous vous doutez fortement, il y a un message féministe, il est plutôt distillé subtilement, on évite le premier épisode revendicateur comme peut le faire Kelly Sue DeConnick sur le premier épisode de Bitch Planet. Attention, j'adore DeConnick et sa série mais ce n'est pas une experte dans la subtilité lorsqu'il s'agit de défendre les droits des femmes. Wilson et Bennett font ça plus en finesse. Et, justement, cela ne donne pas l'impression que l'épisode a déjà fait le tour de la question mais qu'il nous reste plein de choses à voir.
Jorge Molina est quelqu'un qu'on adore voir sur les couvertures. Il a du panache dans sa mise en scène qui arrive à rendre les couvertures incroyablement parlantes. Forcément, il perd en détails lorsqu'il doit s'attaquer à l'intérieur d'une série mais cela est très beau et dynamique. Les filles n'ont jamais de poses vulgaires et il arrive à gérer le casting large de l'équipe et à retransmettre l'énergie de chacune. Et puis, il donne de la personnalité à Arcadia, ce qui est pas une mauvaise chose non plus.
A-Force #1
Marvel Comics • Par G. Willow Wilson, Maguerite Bennett & Jorge Molina • $3.99
Nous pouvions craindre cette série pour l'aspect marketing mais, à l'instar des changements effectués dans Thor et dans All-New Captain America, les scénaristes sont inspirées et nous offrent le meilleur d'elles-mêmes pour poser les jalons d'une série qui pourrait s'avérer excellente si Wilson et Bennett maintiennent ce cap. Vous l'aurez compris, je vous conseille A-Force fortement.