" En finir avec Eddy Bellegueule "
LOUIS Edouard
Le Lecteur attendait monts et merveilles de ce roman qui fit la une des chroniques littéraires voilà bientôt dix-huit mois. Il attendit patiemment que l'ouvrage fut enfin disponible sur les rayonnages de la Médiathèque qu'il fréquente assidument. Sa découverte de ce roman-là durant les derniers jours de mai s'achève sur une déception à peine édulcorée par l'intérêt qu'il porta à la description des difficiles conditions d'existence de familles tributaires de l'usine et encloses dans un village où la misère est le lot commun. Là où survit une certaine conscience de classe, en cette Picardie pourtant tentée par le vote frontiste. Sous cet angle-là, Edouard Louis réussit parfois à brosser des tableaux qui laissent penser à du Zola revisité par Bourdieu. Mais le récit de " l'installation " d'Eddy, enfant puis adolescent, dans l'homosexualité (dut-elle relever de l'autobiographie) ne parvient pas à s'extraire des schémas ordinaires. L'incrédulité parentale assortie de tentatives pour réintroduire Eddy dans la " vraie " vie (le football, les filles). L'homophobie quasi généralisée, celle qui conduit deux autres collégiens à faire d'Eddy leur victime expiatoire. L'enseignant qui tendra une main généreuse au gamin qui ne réussit pas trop mal à l'école. Des clichés qui appartiennent peut-être à la vraie vie mais qui décrédibilisent la structure romanesque, reléguant la fiction à une sorte d'outil d'accompagnement de ce qui relève de l'autobiographie. Avec des bribes de monologues visant trop à faire couleur locale. Ce dont, page 82, Edouard Louis semble prendre conscience lorsque, après avoir fait usage d'un de ces monologues, le jeune romancier précise : " je ne le disais pas de cette manière, mais en écrivant ces lignes, certains jours, je suis las d'essayer de restituer le langage que j'utilisais alors... "