Didier Fédou est un auteur auto-édité dont les histoires sont bien plus efficaces qu'au moins la moitié de ce qu'on trouve en magasins de nos jours. Ayant lu et commenté plusieurs de ses nouvelles l'année passée, j'ai jugé (un peu tard, il est vrai) qu'elles avaient toute leur place ici. Voici donc 5 mini critiques, que j'avais déjà posté à l'époque sur le compte Amazon des textes concernés, pour 5 nouvelles passionnantes, qui empruntent autant au monde de l'horreur pure et dure qu'à l'univers de la poésie.
Retrouvez son compte et ses histoires, nouvelles comme romans, ici.
Rouages : "Henry l'a vu trop souvent : parfois, si on les malmène, les machines se vengent. Au crépuscule de sa vie, il faut qu'il se libère de ces souvenirs, qu'il passe le relais."
Mon avis : D'habitude, je ne suis pas trop fan de ce genre d'histoires (où les machines "prennent vie"), mais là, comme je l'avais supposé, c'est tellement bien distillé et raconté que ça passe tout seul. Les scènes gores pleuvent, certaines plus originales que d'autres, mais toutes prenantes à mort (c'est le cas de le dire) et sans jamais tomber dans un excès inutile. Ça se lit tout seul et, bien que les réactions du personnage à qui on raconte les faits peuvent paraître faciles par moments, on se retrouve comme lui pris dans une morbide fascination et on veut absolument savoir la suite. Et une fois à la fin, on en redemande même.
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L'ange d'automne : "C'est enfant qu'Adrien la rencontra, alors qu'il allait mourir. Elle vint sur les ailes d'un vent chargé des feuilles d'automne et le ramena à la vie. Ce n'était pas son heure. Elle était un ange. Il en tomba amoureux. Mais comment pouvait-il vivre, lui qui aimait l'ange de la mort ?"
Mon avis : Le style comme l'histoire sont très poétiques et sombres, ils créent une ambiance mélancolique bien spécifique. On entre donc directement dans l'histoire et on en ressort pas avant la fin. Et pourtant, je préfère de loin les histoires d'horreur pures, dans lesquels Didier Fédou excelle d'ailleurs, mais voir qu'il n'est pas l'auteur d'un seul genre est une très bonne chose. Surtout quand on voit qu'il manie aussi bien la poésie mélancolique ici que la terreur dans les autres textes que je lui connais. Bref, une bonne petite surprise, on ne regrette pas sa lecture.
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L'âme en peine : "Que la tempête gronde et menace, il rejoindra sa belle coûte que coûte. Elle. Son obsession, envoûtante, elle par qui le jour se lève, la femme-fée qui vit recluse au fond de cette vieille forêt.
Mais pourquoi ne veut-elle pas partir avec lui et quitter pour de bon les ruines de cette maison où elle vit recluse ? Et quel rapport avec les accidents dont il est victime ? Quel est le secret de la belle aux bois oubliés ?"
Mon avis : J'ai moins adhéré à cette histoire qu'à L'ange d'automne. On retrouve dans les deux la même poésie sombre et un style fluide, bien mené. C'est immersif, on ne lâche L'âme en peine qu'à la dernière phrase. Mais j'ai trouvé l'histoire, en somme, un peu trop basique. Très jolie, assez sombre au final, mais ça ne m'a pas accroché autant que L'ange, qui joue pourtant avec les mêmes ingrédients.
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Fake : "Les légendes urbaines... Sont-elles réelles ou pure invention ? Souvent des rumeurs qui, à force d'être répétées, auraient pris des proportions incontrôlables, comme cette légende concernant les anciens abattoirs. Pour le vérifier, il faudra attendre la tombée de la nuit et une panne de voiture..."
Mon avis : Un style plutôt prenant, qui rend les personnages principaux crédibles et consistants. Le tout à des airs de Scream (l'humour nul en moins) que ce soit par rapport aux meurtres que par rapport à la mise en abîme plus ou moins prononcée.
Le début est très cliché. Je le vois personnellement comme un hommage à ces histoires d'horreur à la pelle où un couple se fait surprendre par un danger quelconque. Les personnages de cette introduction sont d'ailleurs assez insupportables, là encore en référence auxdites histoires, à mon avis.
Par chance, les personnages principaux sont, eux, bien moins stéréotypés et bien plus intéressants. On les croirait réels, et on finit par vraiment redouter ce qui les attend. Surtout qu'on n'est jamais trop sûr avant la dernière ligne, vu le titre de cette nouvelle.
En bref, un style sans détour, des personnages réalistes, de l'horreur bien menée. Les fans de slashers, légendes urbaines et autres films/livres d'horreur devraient adorer.
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Les profanateurs : "L'été. Les grandes vacances. Une villa de campagne isolée. Les triplés, huit ans et demi, ont tout pour être heureux, un terrain de jeu immense, presque sans limites, c'est le paradis. Avec leur cabane secrète sous le sapin, là où ils peuvent s'occuper tranquillement du sacrifice rituel du chat. Et puis aller chercher la vénéneuse Datura à la ferme en ruine. Là où ils ont aussi trouvé le grimoire de démonologie. Mais il faut faire attention, rester discret et bien cacher tout ça. Que personne ne le trouve, que les parents ne le voit pas. Pas parce que les parents vont les gronder, non... Mais parce que leurs parents ont été remplacés par les Profanateurs..."
Mon avis : J'ai gardé le meilleur (selon moi) pour la fin. Entre Evil dead, L'invasion des profanateurs de tombes et The children, ce presque huis clos est une perfection d'horreur, autant visuelle que psychologique. On cerne les personnages en quelques lignes et on s'imagine sans mal derrière leur épaule, à voir ce qu'ils voient.
Le genre d'histoire qu'on voudrait voir durer bien plus longtemps, mais il faut avouer que sa rapidité donne un rythme effréné au déroulement de l'action.
Même après avoir fini de lire, je me rejoue certaines scènes dans ma tête et j'ai vraiment envie de lire cette perle une nouvelle fois.
Que demander de plus ? La seule réponse qui me vienne c'est : d'autres histoires comme ça !
Murphy