Les ombres de l'enfance

Par Stéphanie @Sariahlit
" Mais l'avenir, dans ces années-là, ne réservait hélas rien de bon. "

Bernier Henriette
335 pages
Éditions Presses de la Cité (2015)
Collection Terres de France
Villers est un village d'à peine cent habitants, dans la Meuse profonde. En 1950, l'instituteur y gère la classe unique, où il " tient " les enfants avec autorité et bienveillance. Parmi ses élèves, il y a Dilette, la petite orpheline qui ne parle, ne rit, ne joue presque plus. Seule sa grand-mère veille sur elle. Luigi, dit Gigi, petit dernier d'un couple d'origine italienne, est l'enfant heureux d'une famille heureuse. Enfin, Claude, dit Bouboule, arrivé longtemps après trois aînées. Ses parents ne le maltraitent pas, mais il manque de tendresse. Il a conscience de sa singularité, ce qui le rend taciturne et sournois. C'est à l'école que vont naître dans ce trio des sentiments d'enfants - jalousie, envie, trahison, amour - tenaces et vécus avec une intensité qui échappe souvent aux adultes, et qui vont construire ou déconstruire leur vie...
Extrait :
« Il ne se passe pas un jour sans que Louise se remémore cette période hors du commun. Puisqu'elle savait que Margot et Dédé s'aimaient, elle n'avait pas eu la force de les empêcher de se voir. Elle se souvient des conseils de prudence qu'elle donnait à sa fille quand celle-ci courait rejoindre son amoureux, qui l'attendait dans une cabane de bûcheron désaffectée. Elle ne savait cependant pas grand-chose de ce garçon qui de son côté venait de temps en temps frapper à sa porte. »
Mon avis :
Odile, qu'on surnomme Dilette est une enfant illégitime d'un père maquisard disparu du jour au lendemain et d'une mère qui s'est mariée bien plus tard avec un homme de son village, marchand connu et respecté de tous. Mais, alors qu'elle n'est toujours qu'une enfant, ses parents décèdent dans un accident de voiture. Odile vit chez sa grand-mère et, c'est une jeune fille fermée et qui parle peu fait sa première rentrée à l'école. Luigi (Gigi) est le dernier enfant d'une famille italienne qui s'est installée en France peu avant la guerre. C'est un enfant gentil et choyé par sa mère. Claude, appelé Bouboule, est le petit dernier d'une fratrie de trois sœurs. Issu d'une grossesse tardive, le petit garçon n'était pas désiré par sa mère, une femme froide et aigrie par la charge de ses nombreuses grossesses. Dans Les ombres de l'enfance, l'auteure prend le temps de nous présenter chaque famille, leur histoire, dans quel milieu et quelle condition est né chaque enfant. Au cœur de la Meuse, durant la Seconde Guerre mondiale, la jeune Dilette fait battre le cœur de ses deux chevaliers servants. Mais comme dans chaque trio amoureux, elle n'en choisira qu'un. Les deux garçons se battent pour être le centre d'attention de la jeune fille. Dans le cas de figure présent ici, il n'y aura pas de mauvais choix, mais les répercussions sur la vie du « laissé pour compte » vont être importantes : il va mener une vie isolée, vide, faite de rancœur, de ressentiments, de haine à l'encontre d'autrui. Il n'y a pas de réel suspense dans l'intrigue puisqu'on imagine assez rapidement vers qui l'affection de Dilette va tendre. Il s'agit plus d'un récit qui met en avant le destin d'enfants nés dans certaines conditions, comme une prédisposition à mener telle ou telle vie sans pouvoir échapper à son « destin ».Une lecture du terroir sympathique qui manquait toutefois de profondeur et d'inattendu.
★★★☆☆