Le roman d'apprentissage est un classique de la littérature mondiale, la relation entre le maître et l'élève, la transmission, la succession ou, quelquefois, la rivalité, tout cela est présent dans bien des romans, écrits sous toutes les latitudes et dans tous les genres. Voici encore une preuve de tout cela avec un roman de fantasy, le premier paru en France signé par cet auteur, il y a quelques années déjà. Oui, j'ai du retard, mais, l'opportunité de rencontrer Brent Weeks à Epinal cette année, m'a permis de faire cette découverte, que je poursuivrai bientôt avec la suite de la trilogie "l'ange de la nuit". Mais concentrons-nous sur son premier tome, "la Voie des Ombres", publié chez Bragelonne, et qui permet de découvrir des personnages auxquels on s'attache malgré un statut social un peu particulier et pas très engageant : ce sont des assassins.
Azoth est un gamin des rues qui survit comme il peut dans le Dédale, le quartier le plus mal famé de Cenaria, capitale d'un des principaux royaumes de Midcyru. Avec ses deux seuls amis, Jarl et Poupée, il vit de petits larcins mais reste sous la menace permanente du Rat, une sale brute qui est le représentant de la Guilde dans le quartier.
Disons les choses clairement : petits et faibles, Azoth et ses amis sont victimes d'un racket en règle de la part de ce chef de bande qui aime user et abuser de son pouvoir. Comprenez : tabasser les plus faibles que lui et faire régner une certaine terreur dans le Dédale. Les trois enfants doivent se rationner pour espérer subsister et à trois, cela devient presque impossible.
Un soir, alors qu'il traîne dans les rues à la recherche de quelques pièces ou bourses à voler, Azoth est le témoin d'un meurtre. Et son auteur n'est pas n'importe qui : une véritable légende dans tous Cenaria, nommée Durzo Blint. La rumeur veut qu'il soit le meilleur des pisse-culottes du royaume, autrement dit ces assassins insaisissables à qui les puissants confient les missions les plus délicates.
Peu de gens peuvent se vanter d'avoir rencontré et échangé quelques mots avec cet homme, à l'allure tout à fait quelconque. Azoth lui avait même trouvé l'air gentil avant de le voir déployer ses talents... En effet, en général, lorsque l'on rencontre un tel personnage, c'est qu'on n'en a plus pour très longtemps à vivre.
Mais Blint n'est pas seulement le meilleur dans sa spécialité, il est aussi différent de ses collègues et rivaux. Et, bien que le tueur ait repéré la présence du gamin, il ne va pas éliminer ce témoin gênant. Tuer des enfants, il ne le supporte pas, quand d'autres pisse-culotte y prendrait leur pied. Azoth s'en tire donc avec une sacrée frayeur et la promesse de ne rien dire.
Toutefois, la vie devient de plus en plus difficile dans le Dédale et la haine que ressentent Azoth et Jarl pour le Rat ne fait que grandir. D'autant que ce dernier s'est mis en tête de s'occuper de Poupée, petite fille muette et sans défense, que les garçons considèrent comme leur soeur. Alors, Jarl, réunissant ses dernières économies, propose à Azoth de payer Durzo Blint pour être son apprenti.
Il espère ainsi que Azoth se sortira de ces bas fonds sordides et qu'à deux, Poupée et lui auront moins de mal à trouver de quoi vivre... Espoir bien mince, il est vrai. Mais Blint, là encore, se démarque parmi les pisse-culottes : il a toujours refuser de former d'autres personnes à la difficile profession d'assassins... Il refuse donc l'offre d'Azoth.
Il va falloir à Azoth des trésors de ténacité pour convaincre ce solitaire de Durzo Blint de se plier à sa demande. A une condition, toutefois : tuer le Rat avant la fin de la semaine. Dur, dur, pour le gamin, qui n'est qu'un voleur et n'a jamais eu recours à a violence. Pourtant, sa haine va être décuplée quand il découvre que le Rat a cruellement agressé Jarl et laissé Poupée défigurée...
Trouver le courage de remplir sa mission devient alors très simple et Azoth rapporte l'oreille du Rat en trophée à Blint. Le voilà donc prêt à embrasser une toute nouvelle carrière, bien loin du Dédale et de sa crasse, mais en devant habituer sa conscience à ce qui l'attend : le sang qu'il va devoir verser et les vies qu'il va devoir prendre. Enfin, braver cette peur qui le ronge depuis toujours...
Mais Azoth a encore tout à apprendre avant de devenir un pisse-culotte. Et Durzo Blint est un maître dur et sans pitié. L'enfant va souffrir et transpirer avant d'espérer pouvoir maîtriser tout le savoir indispensable pour faire un assassin fiable. Blint, grand connaisseur, entre autres, en poisons de toutes sortes, est une mine de savoirs, mais rien n'est facile.
Première chose, il va rebaptiser l'enfant Kylar Stern et l'affubler d'une légende faisant de lui un jeune noble pauvre, venu d'une lointaine province. L'objectif : devenir le meilleur ami de Logan Gyre, le fils de l'un des hommes les plus puissants de Cenaria. Pas très difficile en soi, tant ce garçon est timide et solitaire...
Mais, c'est la première étape qui va mener Azoth/Kylar au coeur d'un combat sans merci et particulièrement meurtrier, pour le pouvoir. Une véritable guerre où les pisse-culottes occupent une place de choix. Idéal pour faire ses premières armes, connaître son baptême du feu et même décrocher ses premiers galons.
Et, plus encore, ces événements vont amener Kylar à découvrir certaines facettes de lui-même qu'il ignorait, des aptitudes et des pouvoirs qu'il va lui falloir maîtriser et vite, à défaut de les comprendre. Et peut-être, dans un délai plus ou moins bref, de dépasser ce maître à qui, certainement, il doit la vie, cet assassin atypique qu'est Durzo Blint.
Oui, "la Voie des ombres" a tout pour être un roman picaresque, une quête initiatique et un roman d'apprentissage. Mais, la voie choisie par Azoth, celle des pisse-culottes, est évidemment bien différente de ce qu'on a l'habitude de rencontrer traditionnellement. Ici, le jeune homme, car il va devoir mûrir rapidement, doit apprendre à tuer, de toutes les façons possibles.
Ce n'est pas banal, cette fonction. Et surtout, cela ne supporte aucune forme de médiocrité. L'accomplissement d'un meurtre parfait, du genre qui fondent la réputation des pisse-culottes, et leur valeur sur le marché, ne s'improvise pas. Enfin, lorsqu'on maîtrise la préparation et la réalisation, il faut aussi s'endurcir, pour supporter la présence des fantômes qu'on laisse forcément derrière soi. Et qui, parfois, sont innocents.
Tuer. Un des grands tabous de notre société. "Tu ne tueras point", ce commandement si souvent oublié par ceux qui devraient, au premier chef, le respecter. A Cenaria, c'est carrément une fonction sociale. J'imagine que si on se fait prendre, on passe un mauvais quart d'heure, mais qu'on emploie des professionnels pour accomplir ses basses oeuvres semblent tout à fait connu et reconnu.
Cependant, il faut vivre avec cela. Et ce n'est pas simple. Kylar, plus que tout autre, va en faire l'expérience dans ce premier tome. L'une des scènes-clés, peut-être celle qui lance véritablement le roman, est la première mission de Kylar. Son premier meurtre. Et, comme on n'est dans un roman d'apprentissage et qu'on apprend bien que de ses erreurs, cela va évidemment tourner au fiasco.
Durzo, en second rideau, va assurer, comme le harnais et le filet qui empêchent un funambule de s'écraser au sol s'il perd l'équilibre. Mais, dès ce premier contrat, Kylar va se retrouver confronté à toute la difficulté de cette profession qu'il a choisie d'embrasser. Tuer et ne laisser aucun témoin. Quelle violence il faut alors déployer ! Et quelle absence d'humanité !
Avec Durzo Blint, Kyllar sera à très bonne école. Lorsqu'on rencontre le pisse-culotte, il a beau rester le meilleur dans son domaine, on le sent usé, abîmé, portant sur ses épaules la lourde croix des morts qu'il a laissé derrière lui. Il boit, beaucoup, se pose des questions, sur son avenir, sa situation, son envie de continuer...
L'arrivée d'Azoth tombe à pic : transmettre et en finir. De quelque manière que ce soit. En finir une bonne foi pour toute. Pressent-il ce qui va se passer dans ce premier tome ? A-t-il une idée de la boîte de Pandore qu'il va ouvrir en enfreignant une des règles les plus importantes qu'il s'était fixée ? Difficile à dire, et même si c'était le cas, ce ne serait pas le lieu, ni le moment.
La relation très particulière entre l'inflexible Durzo et le naïf et fragile Azoth est au coeur de ce premier volet. Maître et disciple, c'est certain, c'est même la raison première de cette association en apparence mal assortie. Mais, relation amicale, relation fraternelle, relation père-fils, tout cela y passe également au fur et à mesure de la progression du jeune homme.
Mais, plus que la succession, c'est l'entrée en rivalité de ces deux êtres hors norme, assassins pourvus d'une conscience, contrairement aux autres pisse-culottes que l'on croise et qui sont des sociopathes prenant plaisir à tuer. Les événements auxquels nous assistons vont placer Durzo et Azoth dans ce qui est, certainement, pour eux, la pire des situations... Une difficulté de plus qu'il faudra gérer.
Comme vous le constatez, je suis peu entré dans le récit même de ce premier tome. J'ai préféré axer ce billet sur le duo central de ce roman. Je ne vais pas changer de cap maintenant, mais je dois dire que les différentes alliances, les clans en lice, les événements qui se déroulent dans ce premier volet et la destinée d'un certain nombre de personnages est très intéressant et laisse entrevoir deux livres suivants très mouvementés.
Mais, il faut tout de même évoquer, là encore brièvement, car cet aspect est au coeur de l'intrigue, la place de la magie. Elle est très importante et surtout, prend une place croissante au fil des pages. On comprend même qu'elle sera un des grands enjeux de cette trilogie. Avec pas mal de mystères autour, entre magie blanche et magie noire, usage positif ou non de ce pouvoir, contrôle de sa puissance...
Bien sûr, c'est déjà très impressionnant et spectaculaire, mais sans doute n'en sommes-nous encore qu'au tout début d'un crescendo. Se profile une impressionnante bataille, car ces magiciens, qu'ils s'allient ou s'affrontent à l'avenir, disposent d'un potentiel délétère absolument gigantesque qui pourrait bien se déchaîner à Cenaria et aux alentours...
Ce premier volet comprend son lot de surprises et de rebondissements. Azoth/Kylar est, malgré la vie qu'il a choisie, un personnage très attachant. Sa métamorphose ne se fait pas en un claquement de doigts, il a même du mal à accomplir cette mue, peinant à rompre complètement les amarres avec son passé, en particulier vis-à-vis de Poupée, dont le sort le fait terriblement culpabiliser.
A sa façon, Durzo, plus dangereux, plus néfaste, entouré de ténèbres, est pourtant aussi un personnage duquel le lecteur peut se sentir proche. Ses failles, ses doutes, mais aussi le mystère qui l'entoure, tout cela en fait un homme bien moins monolithique qu'on ne pourrait l'attendre de la part d'un assassin invisible et insaisissable.
L'ambiance globale est majoritairement sombre. La Voie des ombres, oui, c'est une évidence. C'est dans le brouillard ou l'obscurité que frappent les assassins. En pleine lumière, ils sont autres ou invisibles, ils se fondent dans le décor ou jouent des rôles. Mais la noirceur de ce premier tome tient aussi à la menace qui plane sur Cenaria et qu'on cerne encore mal.
Mais on comprend tout de même que cette ville, séparée en deux, entre le Dédale et les quartiers plus chics, ne peut qu'être une source d'affrontement et que les différences sociales pourraient bien entraîner des velléités de révolte. Et le pouvoir et l'opulence, eux, favorisent la convoitise. Quant aux véritables enjeux, il faudra attendre les tomes suivants pour vraiment les appréhender.
Azoth est un gamin des rues qui survit comme il peut dans le Dédale, le quartier le plus mal famé de Cenaria, capitale d'un des principaux royaumes de Midcyru. Avec ses deux seuls amis, Jarl et Poupée, il vit de petits larcins mais reste sous la menace permanente du Rat, une sale brute qui est le représentant de la Guilde dans le quartier.
Disons les choses clairement : petits et faibles, Azoth et ses amis sont victimes d'un racket en règle de la part de ce chef de bande qui aime user et abuser de son pouvoir. Comprenez : tabasser les plus faibles que lui et faire régner une certaine terreur dans le Dédale. Les trois enfants doivent se rationner pour espérer subsister et à trois, cela devient presque impossible.
Un soir, alors qu'il traîne dans les rues à la recherche de quelques pièces ou bourses à voler, Azoth est le témoin d'un meurtre. Et son auteur n'est pas n'importe qui : une véritable légende dans tous Cenaria, nommée Durzo Blint. La rumeur veut qu'il soit le meilleur des pisse-culottes du royaume, autrement dit ces assassins insaisissables à qui les puissants confient les missions les plus délicates.
Peu de gens peuvent se vanter d'avoir rencontré et échangé quelques mots avec cet homme, à l'allure tout à fait quelconque. Azoth lui avait même trouvé l'air gentil avant de le voir déployer ses talents... En effet, en général, lorsque l'on rencontre un tel personnage, c'est qu'on n'en a plus pour très longtemps à vivre.
Mais Blint n'est pas seulement le meilleur dans sa spécialité, il est aussi différent de ses collègues et rivaux. Et, bien que le tueur ait repéré la présence du gamin, il ne va pas éliminer ce témoin gênant. Tuer des enfants, il ne le supporte pas, quand d'autres pisse-culotte y prendrait leur pied. Azoth s'en tire donc avec une sacrée frayeur et la promesse de ne rien dire.
Toutefois, la vie devient de plus en plus difficile dans le Dédale et la haine que ressentent Azoth et Jarl pour le Rat ne fait que grandir. D'autant que ce dernier s'est mis en tête de s'occuper de Poupée, petite fille muette et sans défense, que les garçons considèrent comme leur soeur. Alors, Jarl, réunissant ses dernières économies, propose à Azoth de payer Durzo Blint pour être son apprenti.
Il espère ainsi que Azoth se sortira de ces bas fonds sordides et qu'à deux, Poupée et lui auront moins de mal à trouver de quoi vivre... Espoir bien mince, il est vrai. Mais Blint, là encore, se démarque parmi les pisse-culottes : il a toujours refuser de former d'autres personnes à la difficile profession d'assassins... Il refuse donc l'offre d'Azoth.
Il va falloir à Azoth des trésors de ténacité pour convaincre ce solitaire de Durzo Blint de se plier à sa demande. A une condition, toutefois : tuer le Rat avant la fin de la semaine. Dur, dur, pour le gamin, qui n'est qu'un voleur et n'a jamais eu recours à a violence. Pourtant, sa haine va être décuplée quand il découvre que le Rat a cruellement agressé Jarl et laissé Poupée défigurée...
Trouver le courage de remplir sa mission devient alors très simple et Azoth rapporte l'oreille du Rat en trophée à Blint. Le voilà donc prêt à embrasser une toute nouvelle carrière, bien loin du Dédale et de sa crasse, mais en devant habituer sa conscience à ce qui l'attend : le sang qu'il va devoir verser et les vies qu'il va devoir prendre. Enfin, braver cette peur qui le ronge depuis toujours...
Mais Azoth a encore tout à apprendre avant de devenir un pisse-culotte. Et Durzo Blint est un maître dur et sans pitié. L'enfant va souffrir et transpirer avant d'espérer pouvoir maîtriser tout le savoir indispensable pour faire un assassin fiable. Blint, grand connaisseur, entre autres, en poisons de toutes sortes, est une mine de savoirs, mais rien n'est facile.
Première chose, il va rebaptiser l'enfant Kylar Stern et l'affubler d'une légende faisant de lui un jeune noble pauvre, venu d'une lointaine province. L'objectif : devenir le meilleur ami de Logan Gyre, le fils de l'un des hommes les plus puissants de Cenaria. Pas très difficile en soi, tant ce garçon est timide et solitaire...
Mais, c'est la première étape qui va mener Azoth/Kylar au coeur d'un combat sans merci et particulièrement meurtrier, pour le pouvoir. Une véritable guerre où les pisse-culottes occupent une place de choix. Idéal pour faire ses premières armes, connaître son baptême du feu et même décrocher ses premiers galons.
Et, plus encore, ces événements vont amener Kylar à découvrir certaines facettes de lui-même qu'il ignorait, des aptitudes et des pouvoirs qu'il va lui falloir maîtriser et vite, à défaut de les comprendre. Et peut-être, dans un délai plus ou moins bref, de dépasser ce maître à qui, certainement, il doit la vie, cet assassin atypique qu'est Durzo Blint.
Oui, "la Voie des ombres" a tout pour être un roman picaresque, une quête initiatique et un roman d'apprentissage. Mais, la voie choisie par Azoth, celle des pisse-culottes, est évidemment bien différente de ce qu'on a l'habitude de rencontrer traditionnellement. Ici, le jeune homme, car il va devoir mûrir rapidement, doit apprendre à tuer, de toutes les façons possibles.
Ce n'est pas banal, cette fonction. Et surtout, cela ne supporte aucune forme de médiocrité. L'accomplissement d'un meurtre parfait, du genre qui fondent la réputation des pisse-culottes, et leur valeur sur le marché, ne s'improvise pas. Enfin, lorsqu'on maîtrise la préparation et la réalisation, il faut aussi s'endurcir, pour supporter la présence des fantômes qu'on laisse forcément derrière soi. Et qui, parfois, sont innocents.
Tuer. Un des grands tabous de notre société. "Tu ne tueras point", ce commandement si souvent oublié par ceux qui devraient, au premier chef, le respecter. A Cenaria, c'est carrément une fonction sociale. J'imagine que si on se fait prendre, on passe un mauvais quart d'heure, mais qu'on emploie des professionnels pour accomplir ses basses oeuvres semblent tout à fait connu et reconnu.
Cependant, il faut vivre avec cela. Et ce n'est pas simple. Kylar, plus que tout autre, va en faire l'expérience dans ce premier tome. L'une des scènes-clés, peut-être celle qui lance véritablement le roman, est la première mission de Kylar. Son premier meurtre. Et, comme on n'est dans un roman d'apprentissage et qu'on apprend bien que de ses erreurs, cela va évidemment tourner au fiasco.
Durzo, en second rideau, va assurer, comme le harnais et le filet qui empêchent un funambule de s'écraser au sol s'il perd l'équilibre. Mais, dès ce premier contrat, Kylar va se retrouver confronté à toute la difficulté de cette profession qu'il a choisie d'embrasser. Tuer et ne laisser aucun témoin. Quelle violence il faut alors déployer ! Et quelle absence d'humanité !
Avec Durzo Blint, Kyllar sera à très bonne école. Lorsqu'on rencontre le pisse-culotte, il a beau rester le meilleur dans son domaine, on le sent usé, abîmé, portant sur ses épaules la lourde croix des morts qu'il a laissé derrière lui. Il boit, beaucoup, se pose des questions, sur son avenir, sa situation, son envie de continuer...
L'arrivée d'Azoth tombe à pic : transmettre et en finir. De quelque manière que ce soit. En finir une bonne foi pour toute. Pressent-il ce qui va se passer dans ce premier tome ? A-t-il une idée de la boîte de Pandore qu'il va ouvrir en enfreignant une des règles les plus importantes qu'il s'était fixée ? Difficile à dire, et même si c'était le cas, ce ne serait pas le lieu, ni le moment.
La relation très particulière entre l'inflexible Durzo et le naïf et fragile Azoth est au coeur de ce premier volet. Maître et disciple, c'est certain, c'est même la raison première de cette association en apparence mal assortie. Mais, relation amicale, relation fraternelle, relation père-fils, tout cela y passe également au fur et à mesure de la progression du jeune homme.
Mais, plus que la succession, c'est l'entrée en rivalité de ces deux êtres hors norme, assassins pourvus d'une conscience, contrairement aux autres pisse-culottes que l'on croise et qui sont des sociopathes prenant plaisir à tuer. Les événements auxquels nous assistons vont placer Durzo et Azoth dans ce qui est, certainement, pour eux, la pire des situations... Une difficulté de plus qu'il faudra gérer.
Comme vous le constatez, je suis peu entré dans le récit même de ce premier tome. J'ai préféré axer ce billet sur le duo central de ce roman. Je ne vais pas changer de cap maintenant, mais je dois dire que les différentes alliances, les clans en lice, les événements qui se déroulent dans ce premier volet et la destinée d'un certain nombre de personnages est très intéressant et laisse entrevoir deux livres suivants très mouvementés.
Mais, il faut tout de même évoquer, là encore brièvement, car cet aspect est au coeur de l'intrigue, la place de la magie. Elle est très importante et surtout, prend une place croissante au fil des pages. On comprend même qu'elle sera un des grands enjeux de cette trilogie. Avec pas mal de mystères autour, entre magie blanche et magie noire, usage positif ou non de ce pouvoir, contrôle de sa puissance...
Bien sûr, c'est déjà très impressionnant et spectaculaire, mais sans doute n'en sommes-nous encore qu'au tout début d'un crescendo. Se profile une impressionnante bataille, car ces magiciens, qu'ils s'allient ou s'affrontent à l'avenir, disposent d'un potentiel délétère absolument gigantesque qui pourrait bien se déchaîner à Cenaria et aux alentours...
Ce premier volet comprend son lot de surprises et de rebondissements. Azoth/Kylar est, malgré la vie qu'il a choisie, un personnage très attachant. Sa métamorphose ne se fait pas en un claquement de doigts, il a même du mal à accomplir cette mue, peinant à rompre complètement les amarres avec son passé, en particulier vis-à-vis de Poupée, dont le sort le fait terriblement culpabiliser.
A sa façon, Durzo, plus dangereux, plus néfaste, entouré de ténèbres, est pourtant aussi un personnage duquel le lecteur peut se sentir proche. Ses failles, ses doutes, mais aussi le mystère qui l'entoure, tout cela en fait un homme bien moins monolithique qu'on ne pourrait l'attendre de la part d'un assassin invisible et insaisissable.
L'ambiance globale est majoritairement sombre. La Voie des ombres, oui, c'est une évidence. C'est dans le brouillard ou l'obscurité que frappent les assassins. En pleine lumière, ils sont autres ou invisibles, ils se fondent dans le décor ou jouent des rôles. Mais la noirceur de ce premier tome tient aussi à la menace qui plane sur Cenaria et qu'on cerne encore mal.
Mais on comprend tout de même que cette ville, séparée en deux, entre le Dédale et les quartiers plus chics, ne peut qu'être une source d'affrontement et que les différences sociales pourraient bien entraîner des velléités de révolte. Et le pouvoir et l'opulence, eux, favorisent la convoitise. Quant aux véritables enjeux, il faudra attendre les tomes suivants pour vraiment les appréhender.