Auteur : Ingrid Thobois
Editeur : Buchet-Chastel
Date de parution : février 2015
73 pages
Ce livre m’a fait presque le même effet que le roman de Jeanne Benameur, Les demeurées, je suis restée admirative devant tant de talent. Je dis « presque » parce que je crois que nul roman ne pourra jamais égaler ce que j’ai ressenti à la lecture des demeurées. Mais quand même ! Cette comparaison n’est pas anodine.
Tout est dans le style. L’essentiel est dit en peu de mots, soufflés plus que martelés, parfois très poétiques, parfois simples et rustiques. Le récit est relaté avec délicatesse, jamais accentué, toujours suggéré. Et derrière la finesse des mots, un monde rude, dur, une situation dramatique où la folie devient l’ordinaire. Un beau travail d’écriture qui permet au lecteur de comprendre peu à peu ce qui s’est passé, sans aucun voyeurisme, juste des mots pour écrire l’indicible.
Un moment de poésie :
« Le ciel est posé sur les murs du cimetière et les grues cendrées lui fabriquent un grillage. »
Ce récit, relaté par Ingrid Thobois, est inspiré d’une histoire vraie. La voix de Paule, la sœur de Jeannot, nous emporte dans un tourbillon hallucinant pour nous livrer des bribes de la vie de ces trois êtres qui ont vécu de manière fusionnelle et repliés sur eux-mêmes, après la mort du père, un homme violent.
« Le dehors a quatre côtés et une maison en plein milieu. Dans la ferme il y a tout ce qu’il faut. Toi. Moi. La glousse au coin du feu. »
(Celle qui est nommé la glousse est la mère.)
Le plancher de Jeannot est exposé depuis 2007, à l’entrée de l’hôpital Sainte-Anne à Paris. Morceau de parquet de 15 mètres carrés, gravé par Jeannot d’un long texte en lettres majuscules, il a été acquis par un psychiatre, le docteur Roux qui l’a exposé comme un témoignage d’art brut dans plusieurs lieux.
Ce sont Noukette et Jérôme (encore lui !) qui m’ont incitée à le lire.