La Vie est un songe [La Vida es sueño]
Auteur : Pedro Calderón de la Barca
Éditeur : Le Livre de poche
Parution : 1998 [1635]
Pages : 162
Prix : occasion
Note : ★★★★☆
Qui n’a jamais entendu parler de cette pièce de théâtre ? Son nom a souvent rôdé auprès de mes oreilles avant que je me lance enfin et que je me plonge dans cette histoire dont je ne connaissais rien sinon le titre. Je dois avouer que le début m’a un peu effrayée : je n’étais pas sûre de comprendre l’intrigue et les dialogues étaient truffés d’adjectifs, de phrases alambiquées, de tournures complexes… un ton tout à fait baroque avec lequel j’ai finalement rapidement appris à composer pour enfin apprécier l’histoire.
Basilio, le roi de Pologne, voit dans les astres que sa femme mourra en couches pour donner naissance à un fils qui cherchera à le tuer afin de prendre sa place et de régner en tyran. Inquiet de voir que la première partie de cette « prophétie » se réalise, Basilio fait enfermer Sigismond dans une tour, à l’écart de la société, en le laissant s’éduquer seul à la manière des bêtes. Mais il décide un jour de libérer son fils afin de vérifier qu’il n’a pas fait une erreur de jugement en l’éloignant. Évidemment, comme nous le rappellent de nombreuses histoires, notamment celle d’Œdipe, c’est bien en essayant de contrer le destin qu’on le provoque… Sigismond laisse alors libre court à sa furie lorsqu’il apprend la supercherie et le pouvoir que lui confère sa naissance. L’histoire s’inspire visiblement de faits réels auxquels l’auteur ajoute des problématiques personnelles et le tout mène à une réflexion à la philosophique et métaphysique très intéressante, à savoir : si la vie que nous vivons n’est qu’un songe, si tout n’est qu’illusions, alors faut-il en profiter pour assouvir ses moindres désirs ou bien au contraire, tenter de réprimer sa nature animale pour s’élever et devenir un Homme ?
J’ai beaucoup aimé l’esprit baroque, incertain, ou tout est double, ou chaque personnage se cache des autres en se travestissant (principe du theatrum mundi, repris à Shakepeare « Le monde entier est un théâtre/ Et tous, hommes et femmes, n’en sont que les acteurs/ Et notre vie durant nous jouons plusieurs rôles », ou chacun est à la recherche de son identité, ou tous luttent avec leurs désirs ; cette pièce résume parfaitement la dualité qui réside en tout Homme et a vocation à montrer que le héros peut aussi bien aller dans le sens de son destin qu’avoir la volonté de le dépasser. Réflexion que j’ai trouvée très moderne et toujours d’actualité. Il s’agit en réalité d’une pièce auto-sacramentale, prévue pour être jouée lors de fêtes religieuses où la question de l’élévation de l’Homme par le refus de ses instincts animaux prédomine.
J’ai eu la chance de trouver cette édition d’occasion, destinée aux bacheliers de la fin des années 1990, parce qu’elle comporte une longue introduction (à lire après la pièce pour ne pas être spoilé) ainsi que des notes de bas de page très complètes qui permettent de mieux saisir les subtilités et le message de l’œuvre. Je ressors donc ravie de cette lecture qui est une très belle découverte !
Et vous, dites-moi : avez-vous lu cette pièce ? Si oui, qu’en avez-vous pensé ? Si non, vous tente-t-elle ?
~ Asty ~